Analyse des finances publiques : Malgré les surplus accumulés, les engagements électoraux ne devraient pas être financés à même la réserve budgétaire
MONTRÉAL, le 14 juin 2018 /CNW/ - Dix ans après la dernière récession, un constat s'impose : les finances publiques du Québec sont en ordre, mais elles demeurent vulnérables. « Une nouvelle récession pourrait entraîner plusieurs années de déficits et alourdir considérablement la dette, soutient Mia Homsy, directrice de l'Institut du Québec (IdQ). Pour s'y préparer, il faut poursuivre les efforts de réduction du poids de la dette, limiter la croissance des dépenses à celle des revenus et mieux baliser l'usage des surplus passés. Financer les engagements électoraux à crédit irait donc clairement à l'encontre de ces principes. » Voilà les grandes conclusions d'un rapport publié aujourd'hui par l'IdQ.
Cette étude vise plusieurs objectifs. D'abord, évaluer l'état des finances publiques du Québec comme le fait régulièrement l'IdQ. Puis, estimer l'impact d'un éventuel ralentissement économique, voire carrément d'une récession, dans un but ultime de déterminer quelles sont les stratégies les plus pertinentes à emprunter pour que le Québec affronte la prochaine récession en minimisant l'impact sur les services publics et le fardeau fiscal.
« Les finances publiques du Québec sont aujourd'hui bel et bien redressées. Le poids de la dette diminue depuis quelques années, de sorte que la province devrait atteindre ses cibles de réduction de la dette en 2025. Il faut profiter de l'embellie économique et de la vigueur du marché du travail pour poursuivre les efforts dans cette direction. », considère Raymond Bachand, président de l'IdQ. Selon le Plan économique du ministère des Finances, le gouvernement parviendra, au cours des prochaines années, à maintenir un budget équilibré en ayant recours à la réserve de stabilisation, un fonds théorique constitué des surplus passés, qui s'élève présentement à plus de 5 G$.
L'impact d'une récession sur les finances publiques
Pour aider les élus à prendre des décisions éclairées, appuyées sur des données probantes, l'IdQ a simulé l'impact d'une récession moyenne au Québec - similaire à celle de 2008 - sur les finances publiques selon deux scénarios.
Une récession moyenne au Québec entraînerait un déficit supplémentaire de 2 G$ dès l'année du ralentissement. Cinq ans plus tard, cette somme atteindrait 3 G$. Si aucun ajustement n'était effectué pour réduire les dépenses et/ou accroître le fardeau fiscal, le total des déficits s'élèverait à 13,1 G$ après cinq ans et à 20,5 G$ après sept ans.
Scénario 1 : Toutefois, si le gouvernement choisissait de retourner à l'équilibre budgétaire en cinq ans conformément à la Loi sur l'équilibre budgétaire, les déficits cumulés se chiffreraient alors à 10 G$ après versements au Fonds des générations (3 G$ avant les versements) et la croissance des dépenses de programmes serait nettement moins élevée que la croissance des clientèles et de l'inflation.
Scénario 2 : Si le gouvernement visait plutôt l'équilibre budgétaire en sept ans, les déficits cumulés seraient alors de l'ordre de 16 G$ après versements au Fonds des générations (3,7 G$ avant les versements). La croissance des dépenses de programmes suivrait une trajectoire décroissante mais légèrement moins abrupte que dans le scénario précédent.
À la lumière de ces simulations, tout porte à croire que recourir à des compressions dans les dépenses de programmes et/ou à une hausse importante du fardeau fiscal deviendrait inévitable pour retrouver l'équilibre budgétaire. Ainsi, cette analyse révèle que plus l'endettement serait faible et contrôlé, plus le gouvernement aurait de la marge de manœuvre pour soutenir le niveau des services lors d'une récession, ce qui lui permettrait d'attendre que l'économie reprenne avant de redresser la situation.
« Autrement dit, la meilleure stratégie à adopter serait de continuer de libérer de l'espace sur la carte de crédit du Québec afin de préserver notre capacité d'emprunt pour les mauvais jours, et éviter d'accroître les dépenses de façon marquée alors que l'économie tourne à plein régime, conclut Mme Homsy. Sur cette toile de fond, il semble alors évident qu'utiliser la réserve de stabilisation pour financer les engagements électoraux créerait un déséquilibre budgétaire qui aurait un impact considérable sur les services ou le fardeau fiscal à moyen terme. »
L'IdQ recommande donc de :
- Poursuivre la réduction de la dette brute et de la dette des déficits cumulés afin d'atteindre les cibles fixées pour l'échéance 2025-2026, et d'ajouter de nouvelles cibles pour l'échéance 2034-2035, tout en faisant preuve d'une certaine souplesse.
- Plafonner le solde de la réserve de stabilisation et mieux baliser son utilisation. La réserve devrait servir uniquement à gérer les imprévus et les ralentissements économiques légers et de court terme. Au-delà de 2 G$, les surplus devraient être utilisés pour rembourser directement la dette. Ces sommes s'avèreraient suffisantes pour pallier, à court terme, aux imprévus.
- Limiter la variation de la croissance des dépenses en santé et en éducation. La variance sur cinq ans devrait être établie en tenant compte de l'inflation et de la variation des clientèles sur cette période. Cela permettrait une meilleure prévisibilité et une meilleure gestion des ressources dans les réseaux de la santé et de l'éducation.
Le rapport Dix ans après la récession, les finances publiques sont en ordre mais…est disponible sur le site www.institutduquebec.ca.
À propos de l'Institut du Québec
Issu d'un partenariat entre le Conference Board du Canada et HEC Montréal, l'Institut du Québec axe ses recherches et ses études sur les enjeux socioéconomiques auxquels le Québec fait face. Il vise à fournir aux autorités publiques et au secteur privé les outils nécessaires pour prendre des décisions éclairées, et ainsi contribuer à bâtir une société plus dynamique, compétitive et prospère.
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