Aucun pays n'est à l'abri des menaces pour la santé engendrées par les changements climatiques, alors que la pandémie actuelle offre un avant-goût des perturbations potentielles sur la vie et les moyens de subsistances au Canada et ailleurs English
OTTAWA, ON, le 2 déc. 2020 /CNW/ - Des chercheuses canadiennes ont extrait des données du rapport 2020 du Lancet Countdown sur la santé et les changements climatiques pour dresser le portrait de la situation au pays. À l'instar des autres pays, le Canada entrevoit un avenir inquiétant alors que les changements climatiques et la santé de sa population demeurent intrinsèquement liés.
À partir de plus de 40 indicateurs mondiaux mesurés annuellement par le Lancet Countdown, les Dres Claudel Pétrin-Desrosiers et Finola Hackett, deux jeunes médecins interpellées par les enjeux de santé globale, ont mené une analyse canadienne, accompagnée de recommandations, qui met en lumière l'incidence croissante de la chaleur extrême et de la pollution atmosphérique sur la santé de la population canadienne.
« En offrant simultanément des solutions aux crises convergentes des changements climatiques et de la pandémie, il sera possible d'en limiter les effets pour mieux soutenir la santé et l'économie », indique la Dre Claudel Pétrin-Desrosiers, coauteure de l'analyse et résidente en médecine familiale à l'Université de Montréal. « Le rapport général et le compte rendu à l'intention du Canada cernent les principaux enjeux dont doivent s'occuper les gouvernements et les différents secteurs de la société. » De nouvelles données générées par The Lancet portent sur la mortalité associée à la chaleur et ses coûts économiques, la perte de main-d'œuvre, ainsi que le problème récurrent de la pollution atmosphérique.
« Quand on pense à l'après-pandémie, ces données nous rappellent que nous avons la capacité et la possibilité de corriger des inégalités profondes qui demeurent des freins aux avancées sociales et économiques favorables à une population en meilleure santé », ajoute la Dre Finola Hackett, résidente en médecine familiale rurale à l'Université de Calgary (programme de Lethbridge). « Nous ne pouvons plus ignorer les effets des changements climatiques. » Le rapport demande une réponse commune aux crises concurrentes de la COVID-19 et du climat. Ce faisant, trois gains importants pourraient être obtenus : une population en meilleure santé, une économie carboneutre viable et la protection de l'environnement.
Les principales conclusions touchant le Canada sont les suivantes :
- Effets de la chaleur extrême et du réchauffement climatique :
- Au pays, les décès liés à la chaleur chez les personnes de plus de 65 ans ont augmenté de 58 % au cours des 20 dernières années. Un record de 2 700 décès ont été enregistrés en 2018 chez cette tranche de la population.
- Le coût économique de la mortalité associée à la chaleur est estimé à 0,7 % du produit intérieur brut (PIB) en 2018, comparativement à 0,2 % en 2000. Ces coûts correspondent grosso modo au revenu moyen de 263 400 Canadiens et Canadiennes, soit l'équivalent de la population de Gatineau (Québec) ou de Saskatoon (Saskatchewan).
- Au Canada, le réchauffement est deux fois plus rapide que dans le reste du monde, et trois fois plus rapide dans les régions nordiques. Cinq des dix années comptant le plus de vagues de chaleur sont survenues depuis 2010.
- Les personnes âgées sont particulièrement vulnérables à la chaleur, tout comme les personnes ayant une maladie chronique préexistante, comme l'asthme ou le diabète.
- Au cours des quatre dernières années, l'exposition quotidienne annuelle de la population canadienne à des feux de forêt a grimpé de 14 % comparativement au début des années 2000. Ces feux ont mené à l'aggravation de maladies respiratoires et à l'évacuation de communautés dans l'Ouest canadien.
- Le rapport recommande de soutenir les stratégies qu'adoptent les Autochtones pour s'adapter au réchauffement rapide dans leurs communautés, particulièrement celles du Nord, et d'apprendre de celles-ci.
- Pollution atmosphérique
- En 2018, la pollution atmosphérique par les particules fines a entraîné 8 400 décès prématurés au Canada, dont 7 200 découlant de sources de pollution causée par l'humain (émissions domestiques [p. ex., utilisation de combustibles pour le chauffage et la climatisation], transports, production d'énergie, déchets, etc.). Ce nombre correspond à plus de quatre fois celui des décès attribuables aux accidents de la route au pays.
- Le secteur des transports demeure la plus importante source de pollution atmosphérique.
- Le Canada progresse quant à l'utilisation de l'électricité comme source d'énergie renouvelable pour le transport routier, utilisation qui a augmenté de 40 % entre 1990 et 2017. Toutefois, les combustibles fossiles sont toujours à l'origine de plus de 95 % des émissions associées aux transports.
- Les personnes à faible revenu et celles de minorités ethniques, des communautés autochtones ou d'autres groupes vulnérables sont touchées de façon disproportionnée par les répercussions de la pollution atmosphérique sur la santé.
- Systèmes de santé
- La pandémie de COVID-19 a mis en lumière la capacité actuelle des systèmes de santé à faire face aux défis de santé qui pourraient être engendrés par les changements climatiques, et a fait ressortir des options pour la prestation de services de santé tendant vers la carboneutralité.
- Selon les études, le secteur de la santé canadien est responsable d'environ 5 % des émissions annuelles de gaz à effet de serre et est reconnu pour avoir l'une des plus grandes empreintes carbone par personne au monde.
- Les répercussions des changements climatiques, comme celles de la COVID-19, touchent de façon disproportionnée les groupes en situation de vulnérabilité et souvent sous-représentés dans les sphères décisionnelles.
Les auteures de l'analyse canadienne abondent dans le même sens que les 120 professionnels de la santé et universitaires spécialisés en santé et en changements climatiques : le réchauffement climatique et les phénomènes météorologiques extrêmes engendreront sans doute des bouleversements qui menaceront la santé mondiale, perturberont des vies et des moyens de subsistance, et surchargeront les systèmes de santé. Elles soulignent également que le Canada a l'occasion de créer une société plus juste et viable en faisant participer plus directement les personnes les plus touchées dans la réponse à cette double crise climatique et sanitaire.
Les auteures terminent leur analyse en affirmant qu'à l'aube du cinquième anniversaire de l'Accord de Paris, dans lequel le monde s'est engagé à limiter le réchauffement climatique, le Canada doit montrer l'exemple, bonifier sa contribution déterminée nationalement et respecter ses engagements afin de faire sa part pour limiter l'augmentation de la température mondiale à bien moins de 2 °C. Selon les Dres Claudel Pétrin-Desrosiers et Finola Hackett, ces efforts, s'ils s'alignent avec ceux de la relance post-pandémie, pourraient avoir des retombées sanitaires et économiques immédiates et à long terme.
Le Lancet Countdown sur la santé et les changements climatiques est le fruit de la collaboration d'experts issus de plus de 38 organisations, dont l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), la Banque mondiale, l'Université College de Londres et l'Université Tsinghua.
SOURCE Association médicale canadienne
Contact pour les médias : Lisa Brazeau, The Hillbrooke Group, +1-(613)-807-0663, [email protected]
Partager cet article