Avis sur les activités de procréation assistée au Québec : Le statu quo est inacceptable
QUÉBEC, le 6 juin 2014 /CNW Telbec/ - Aujourd'hui, le Commissaire à la santé et au bien-être publie son Avis sur les activités de procréation assistée au Québec. « L'intérêt de l'enfant motive l'ensemble des actions que nous proposons. Elles appellent à une responsabilité partagée de tous les acteurs et à une transparence au regard des orientations privilégiées, des coûts engagés et des informations relatives aux pratiques et à leurs retombées », déclare Robert Salois, commissaire à la santé et au bien-être. Bien que certains enjeux soulevés par le programme québécois de procréation assistée puissent remettre en question sa pertinence, ses retombées positives, conjuguées aux risques liés au maintien de ces activités en marge du système de santé et de services sociaux, plaident pour sa préservation.
Toutefois, le Commissaire est d'avis qu'il faut soutenir son amélioration en lui apportant des modifications importantes visant à clarifier ses finalités et à recadrer ses critères d'accès. « Une gestion plus rigoureuse de ce programme par la mise en œuvre des recommandations proposées dans cet avis, notamment un resserrement des critères d'accès à la fécondation in vitro, entraînerait des économies potentielles de l'ordre de 30 % », souligne M. Salois. De plus, il est impératif qu'une banque de données centralisée soit mise en place de toute urgence afin de suivre les résultats de ce programme sur la santé des mères et des enfants. L'avis détaillé, l'avis synthèse et des documents complémentaires sont disponibles sur le site Internet du Commissaire au www.csbe.gouv.qc.ca.
Recommandations du Commissaire
Afin de mieux encadrer le programme, d'en améliorer les retombées et d'arriver à une meilleure gestion des fonds publics, le Commissaire formule 12 recommandations ayant les visées suivantes :
- Établir des limites d'accès au programme et prioriser le recours aux techniques les moins invasives;
- Favoriser un accès plus équitable en région;
- Mieux contrôler les coûts du programme;
- Évaluer les effets de la procréation assistée sur la santé des femmes et des enfants;
- Consolider la gouvernance du programme;
- Favoriser la pertinence et l'intégrité de la recherche en procréation assistée;
- Améliorer l'organisation et la continuité des services;
- Mieux accompagner les patients dans leur prise de décision;
- Organiser l'évaluation psychosociale des parents d'intention;
- Limiter le « magasinage » de services;
- Reconnaître la légitimité de la quête des origines par le remboursement équitable des gamètes;
- Mettre le sort des embryons surnuméraires et la gestation pour autrui à l'ordre du jour.
À court terme
« Nous estimons que la mise en œuvre des cinq premières recommandations est incontournable à court terme si l'intention du gouvernement est de maintenir le programme de procréation assistée au Québec, ce qui permettrait d'exercer une vigie à l'égard de l'évolution des pratiques et des enjeux qu'elles posent », affirme M. Salois. De fait, plusieurs enjeux éthiques ont été portés à l'attention du Commissaire au cours de la réalisation de ce mandat. L'acceptabilité sociale du programme de procréation assistée, l'allocation juste et raisonnable des ressources, l'équité d'accès aux services, les risques inhérents à la pratique, la quête des origines, l'évaluation des capacités parentales ainsi que le consentement éclairé comptent parmi ces enjeux. Le Commissaire arrive également à la conclusion que plusieurs pratiques concernant les dons de gamètes méritent d'être considérées de plus près relativement à leurs implications éthiques et psychologiques. De plus, il insiste sur le fait que le sort des embryons surnuméraires et la gestation pour autrui devraient être examinés de manière prioritaire.
Quelques données
À l'origine, les objectifs du programme québécois de procréation assistée visaient à réduire les grossesses multiples; à permettre aux couples infertiles d'avoir des enfants; à promouvoir la natalité ou à permettre à chaque personne de fonder une famille. Même si le nombre d'enfants conçus par procréation assistée a connu une nette progression, le poids démographique des enfants issus de la fécondation in vitro (FIV) reste modeste, avec 2 % des naissances en 2012-2013.
En ce qui a trait à l'objectif de réduire les naissances multiples, les données disponibles confirment sa contribution. La proportion des nouveau-nés vivants issus de grossesses multiples est passée de 38,5 % en 2009-2010 à 17,2 % en 2012-2013. Cette diminution, de l'ordre de 55 %, est remarquable, mais il n'en demeure pas moins que 1 nouveau-né sur 6 nouveau-nés vivants issus de la procréation assistée provient encore d'une grossesse multiple, comparativement à 1 sur 40 nouveau-nés de conceptions spontanées. Cela dit, en matière de réduction des naissances multiples, les résultats obtenus au Québec sont excellents par rapport à ceux rapportés pour le reste du Canada et sur le plan international.
En ce qui concerne les hospitalisations en soins intensifs néonataux des nouveau-nés issus de la procréation assistée, leur nombre tend à augmenter plutôt qu'à diminuer, tout comme les coûts globaux de ces hospitalisations. Le Commissaire constate donc que la prédiction d'autofinancement du programme sur la base d'une diminution des hospitalisations ne s'est pas réalisée.
Plus de 131 M$ ont été déboursés par la RAMQ et le régime public d'assurance médicaments en quatre ans, auxquels s'ajoutent 15 M$ d'investissements accordés par le gouvernement pour le développement de nouveaux centres de procréation assistée. Lors de la mise en place du programme, soit pour l'exercice financier 2010-2011, le Conseil du trésor y consacrait un montant de 30,32 M$. Les prévisions officielles du ministère de la Santé et des Services sociaux, pour l'exercice 2013-2014, sont de près de 70 M$.
Mandat et démarche
Le mandat de produire un avis sur la pertinence d'offrir certaines activités de procréation assistée au Québec, tout en précisant ce qui devrait constituer un service assuré par ce programme, a été confié au Commissaire en février 2013 par le ministre de la Santé et des Services sociaux. Pour mener à bien ce mandat, le Commissaire a procédé par un appel de mémoires, un appel de témoignages, des rencontres avec son Forum de consultation, une revue documentaire, des sondages quantitatifs, des entrevues individuelles, des visites de centres de procréation assistée et des rencontres avec des professionnels qui œuvrent dans le domaine.
Mission du Commissaire à la santé et au bien-être
Rappelons que la mission du Commissaire à la santé et au bien-être est d'apporter un éclairage pertinent au débat public et à la prise de décision gouvernementale, dans le but de contribuer à l'amélioration de l'état de santé et de bien-être des Québécoises et Québécois. Pour ce faire, le Commissaire apprécie les résultats atteints par le système de santé et de services sociaux en s'intéressant aux différents facteurs qui influencent la santé et le bien-être, tout en intégrant les questions éthiques à son analyse. Il recommande au ministre des changements qui visent, entre autres, à accroître la performance du système.
SOURCE : Commissaire à la santé et au bien-être
Linda Lévesque, 1 877 393-3178, 514 242-8909 (cellulaire); Source : Commissaire à la santé et au bien-être, Elaine Bernier, 418 643-6086
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