Budget du Québec : un « Québec fort » se donnerait les moyens d'éviter l'austérité
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IRIS - Institut de recherche et d'informations socioéconomiques25 mars, 2025, 18:42 ET
MONTRÉAL, le 25 mars 2025 /CNW/ - Dans le budget déposé aujourd'hui, le gouvernement du Québec propose des mesures timides pour augmenter ses revenus et ne parvient pas à atteindre le niveau de dépenses nécessaires pour éviter l'austérité dans les services publics.
« Beaucoup de choses ont changé dans la dernière année. Pourtant, le gouvernement utilise la même recette qu'il y a trente ans en matière de finances publiques. Plutôt que de miser sur l'augmentation de ses revenus, il préfère agir sur les dépenses, ce qui limite sa capacité de soutenir adéquatement le secteur public et à transformer l'économie pour la rendre plus autonome et plus écologique », déplore Guillaume Hébert, chercheur à l'IRIS.
« Le gouvernement n'a pas perdu le contrôle sur ses dépenses. Il gagnerait toutefois à prendre le contrôle de ses revenus et à se donner de nouveaux leviers pour mieux intervenir en période de crise », soutient Guillaume Hébert.
Un budget austère en dépit du déficit
La hausse des dépenses en santé (3,04 %), en éducation (2,2 %) et dans les autres portefeuilles des services publics (1,3 %) ne suit pas les hausses minimales pour éponger la hausse des coûts. Selon les calculs de l'IRIS, il faudrait une hausse minimale des dépenses de 3,76 % en santé, de 4,69 % en éducation et de 2,33 % pour les autres portefeuilles des ministères pour ne pas détériorer les services. Autrement dit, pour simplement maintenir les services, il y a un manque à gagner annuel de 460 M$ en santé, de 580 M$ en éducation et de 1,7 G$ pour tous les autres portefeuilles.
« Les dépenses pour tous les services à la population ne suivent pas la hausse des coûts attribuables à l'inflation, aux hausses de salaire et à l'augmentation du nombre d'usagers par exemple, ce qui contribuera à détériorer les services publics déjà mis à mal depuis longtemps », explique Guillaume Hébert.
Examen des dépenses: des économies de bout de chandelle
En 2025-2026, la révision du régime fiscal rapportera 32 M$ au gouvernement. Dans les années subséquentes, le gouvernement engrangera davantage de revenus, notamment en taxant les voitures électriques et en haussant la taxation des assurances des particuliers, ce qui permettra de générer de nouveaux revenus de l'ordre de 1G$ par an. De même, pour les dépenses budgétaires, le gouvernement prévoit faire des économies de 600 M$ en 2025-2026 en « améliorant » l'efficacité de l'intervention gouvernementale.
« Le gouvernement pourrait également réaliser des économies en limitant le recours à la main-d'œuvre indépendante dans le secteur de la santé, or les autres mesures qui consistent à optimiser l'administration et « transformer l'État relève davantage de la pensée magique », soulève Guillaume Hébert.
Un impôt sur le patrimoine permettrait d'aller chercher 6 G$ en revenus supplémentaires chaque année, ce qui est deux fois plus que ce que prévoit économiser le gouvernement sur 5 ans grâce à sa révision du régime fiscal.
« Pour briser le cycle de l'austérité, il faudra aller chercher de l'argent là où il y en a, c'est-à-dire dans les poches des ménages les mieux nantis. Ce sont d'ailleurs ces derniers qui ont le plus bénéficié des baisses d'impôt dans les dernières années ».
En raison des baisses d'impôt accordées aux contribuables depuis 2000, les Québécois•es paient aujourd'hui 14 G$ de moins que si l'on prélevait toujours le même taux d'imposition qu'il y a 25 ans. Seulement pour le gouvernement du Québec, cela représente une perte fiscale annuelle de 6,9 G$.
Stimuler l'économie sans la transformer
Le gouvernement Legault consacre 1,6 G$ sur cinq ans au programme Frontière, qui accorde des prêts substantiels aux grandes entreprises touchées de manière significative par les nouveaux tarifs douaniers. Pour être admissible à ce programme, une entreprise doit avoir un chiffre d'affaires d'au moins 3 M$ et être directement assujettie aux nouveaux tarifs douaniers.
« Le gouvernement souhaite ainsi améliorer la position concurrentielle des entreprises sur le marché mondial et à développer de nouveaux marchés, mais il n'en fait pas assez pour diversifier le tissu industriel du Québec, favoriser les circuits courts et l'autonomie », explique Guillaume Hébert.
« Ce programme a des conditions d'admissibilité qui reflètent l'étroitesse de la vision économique du gouvernement. Il ne faut pas uniquement soutenir l'économie, il faut aussi la transformer. Le gouvernement pourrait par exemple stimuler l'activité économique tout en favorisant la transition écologique en ciblant certains secteurs, plutôt que d'offrir de l'aide principalement aux entreprises exportatrices », soutient Guillaume Hébert.
Par exemple, des investissements dans les sociétés de transport en commun permettraient d'accroître l'offre de transport en commun tout en soutenant des emplois de qualité dans l'industrie du transport terrestre qui compte 620 entreprises et emploie 32 000 personnes au Québec.
À propos de l'IRIS
Depuis 20 ans, l'Institut de recherche et d'informations socioéconomiques analyse les politiques publiques et l'économie du Québec. À but non lucratif et indépendant, l'Institut produit et diffuse des recherches sur les grands enjeux de l'heure, tels que la crise climatique et environnementale, la marchandisation de l'éducation ou de la santé et la croissance des inégalités.
SOURCE IRIS - Institut de recherche et d'informations socioéconomiques

Source : Camille Legault Thuot, Responsable des relations publiques et des communications, 438 506 9525, [email protected]
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