Des chercheurs de l'IRCM ouvrent la voie à une meilleure compréhension de
l'infection du VIH et du sida
Une percée scientifique sur les mécanismes par lesquels le VIH prend le contrôle de la division cellulaire
MONTRÉAL, le 3 sept. /CNW Telbec/ - L'équipe du Dr Éric A. Cohen, directeur de l'unité de recherche en rétrovirologie humaine à l'Institut de recherches cliniques de Montréal (IRCM), a publié hier dans la revue en ligne libre d'accès PLoS Pathogens, les résultats de leur plus récente recherche sur le rôle de la protéine Vpr dans l'infection du VIH (virus de l'immunodéficience humaine) et le sida (syndrome de l'immunodéficience acquise).
« Nous avions déjà identifié que le VIH, lorsqu'il infecte des lymphocytes T, bloque la division cellulaire et induit la mort cellulaire. Nous avions alors démontré que la protéine Vpr était impliquée dans ce processus » a mentionné le Dr Cohen.
Le VIH-1 encode plusieurs protéines, dont la protéine virale R (Vpr), qui contribue de manière importante au développement du sida. La protéine Vpr bloque la division cellulaire normale, un processus qui favoriserait la multiplication du virus et provoquerait la mort des cellules du système immunitaire. Les chercheurs ont déjà démontré que Vpr induit cette activité en interagissant avec un complexe protéique (ligase E3) impliqué dans l'ubiquitination. L'ubiquitination est un mécanisme par lequel une petite protéine appelée ubiquitine est conjuguée à des protéines cibles afin de moduler leur activité biologique ou de causer leur dégradation. Ils ont aussi montré que la Vpr utilise ce complexe protéique afin d'ubiquitiner un facteur cellulaire encore non identifié et dont la dégradation déclenche l'arrêt de la division cellulaire.
« On connaît le processus, mais on ignore encore quel facteur cellulaire est ciblé par Vpr pour bloquer la division cellulaire et où se produisent ces événements à l'intérieur de la cellule infectée. Si on parvient à identifier ce facteur cellulaire inconnu et à déterminer son rôle dans le cycle cellulaire, cela fera sans aucun doute progresser notre compréhension de l'infection du VIH et des processus de mort cellulaire qui caractérisent le sida. Nous croyons que l'identification de ce facteur cellulaire pourrait, à long terme, nous conduire à de nouvelles cibles thérapeutiques potentielles » a expliqué le Dr Jean-Phillipe Belzile, stagiaire postdoctoral dans l'unité de recherche du Dr Cohen et premier auteur de l'article.
Dans leur étude, les chercheurs ont démontré que Vpr forme des structures mobiles nommées « foyers » sur l'ADN des cellules de l'hôte. Ils ont également trouvé que la formation de ces foyers nucléaires par Vpr est requise afin de bloquer la division cellulaire. La protéine Vpr recrute la ligase E3 dans ces structures mobiles et les utilise afin de cibler et de dégrader une protéine cellulaire liée à l'ADN. Ce mécanisme cause ainsi l'activation d'une réaction de la cellule hôte menant à un blocage de la division cellulaire.
« Il est très important d'avoir un aperçu détaillé de ce processus car cela nous permet, à mon équipe ainsi qu'à la communauté scientifique, de mieux diriger ces efforts visant à identifier le facteur cellulaire ciblé par Vpr, contribuant ainsi à une meilleure compréhension du rôle de cette protéine virale dans l'infection du VIH et la pathogenèse du sida » a ajouté le Dr Cohen.
Pour mener ses travaux de recherche, l'équipe du Dr Cohen a reçu l'appui des Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), de la Fondation canadienne pour l'innovation (FCI) et du programme de Chaires de recherche du Canada. « Ceci est une étape importante dans la lutte contre le VIH/sida. L'amélioration de nos connaissances sur le mécanisme moléculaire de l'infection du VIH est un excellent exemple de ce qu'est la recherche fondamentale : trouver de nouvelles approches et, à travers les découvertes, mieux orienter la recherche afin de mener à des thérapies efficaces » a dit le Dr Marc Ouellette, le directeur scientifique de l'Institut des maladies infectieuses et immunitaires des IRSC.
À l'échelle mondiale, il est estimé qu'en 2010, 33 millions de personnes vivaient avec le VIH et 2 millions de décès étaient liés au SIDA.1 D'après l'Agence de la santé publique du Canada, environ 65 000 personnes vivaient avec le VIH au Canada en 2008 (y compris celles atteintes du sida). Ils ont également estimé que le nombre de nouvelles infections du VIH se situe entre 2 300 et 4 300 par année.
À propos du Dr Éric A. Cohen
Éric A. Cohen est docteur en biologie moléculaire de l'Université de Montréal. Il est directeur de l'unité de recherche en rétrovirologie humaine à l'IRCM. Il est aussi professeur de virologie au Département de microbiologie et immunologie à l'Université de Montréal et membre associé au Département de médecine (Division de médecine expérimentale) à l'Université McGill. Le Dr Cohen est titulaire de la Chaire de recherche du Canada en rétrovirologie humaine.
En 2007, l'équipe du Dr Cohen a identifié un complexe protéique cellulaire recruté par la protéine Vpr du VIH-1 pour induire l'arrêt de la division des cellules infectées. Cette année, son laboratoire a découvert un nouveau mécanisme par lequel le VIH-1 manipule l'immunité naturelle. Son équipe de recherche a également identifié un mode d'action utilisé par la protéine Vpu du VIH-1 pour contrecarrer la Tetherin, un facteur cellulaire qui bloque la production et la transmission du VIH-1. Cet antagonisme viral a vraisemblablement contribué à l'implantation du VIH-1 chez l'humain. Ces percées scientifiques pourraient ouvrir de nouvelles avenues d'intervention thérapeutique pour lutter contre le VIH et le sida.
À propos de l'Institut de recherches cliniques de Montréal (IRCM)
Créé en 1967, l'IRCM (www.ircm.qc.ca) regroupe aujourd'hui 37 unités de recherche spécialisées dans des domaines aussi variés que l'immunité et les infections virales, les maladies cardiovasculaires et métaboliques, le cancer, la neurobiologie et le développement, la biologie intégrative des systèmes et la chimie médicinale, et la recherche clinique et la bioéthique. Il compte aussi trois cliniques spécialisées et deux plateformes de recherche dotées d'équipements à la fine pointe de la technologie. Plus de 450 personnes y travaillent. L'IRCM est une institution autonome affiliée à l'Université de Montréal et sa clinique est associée au Centre hospitalier de l'Université de Montréal (CHUM). L'Institut entretient également une association de longue date avec l'Université McGill.
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1 Programme commun des Nations Unies sur le VIH/SIDA (ONUSIDA), Rapport sur l'épidémie mondiale de SIDA 2008.
Renseignements:
ou pour une entrevue avec le Dr Cohen, veuillez communiquer avec :
Lucette Thériault Directrice des communications Institut de recherches cliniques de Montréal lucette.thé[email protected] 514-987-5535 |
Julie Langelier Chargée de communication Institut de recherches cliniques de Montréal [email protected] 514-987-5555 |
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