Enquête indépendante sur l'événement survenu à Mirabel le 30 mai 2023 : le DPCP ne portera pas d'accusation
QUÉBEC, le 23 janv. 2024 /CNW/ - Après examen du rapport produit par le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI), le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) conclut que l'analyse de la preuve ne révèle pas la commission d'une infraction criminelle par la policière et le policier du Service de police de Mirabel (SPM).
L'analyse portait sur l'événement entourant les blessures subies par un homme à Mirabel le 30 mai 2023.
L'examen du rapport d'enquête préparé par le BEI a été confié à une procureure aux poursuites criminelles et pénales (procureure). Cette dernière a procédé à un examen complet de la preuve afin d'évaluer si à la lumière de la preuve retenue, celle‑ci révèle la commission d'infractions criminelles. La procureure a informé la personne blessée de la décision.
Le 30 mai 2023 à 11 h 35, un appel est fait au 911 par une personne manifestant des inquiétudes au sujet de la sécurité d'un proche, car il ne répond pas à ses appels téléphoniques.
Vers 11 h 42, une policière arrive à l'adresse de la résidence de l'homme située dans le secteur de Saint-Canut à Mirabel. Elle constate que les rideaux de l'appartement situé au sous-sol sont fermés et qu'un camion noir se trouve dans le stationnement. Elle attend dans son véhicule de patrouille l'arrivée de son collègue.
Vers 11 h 47, le policier arrive sur les lieux et le duo descend les marches menant à l'entrée de l'appartement. Ils constatent que la porte est entrouverte. Le policier interpelle l'homme par son nom et indique qu'ils sont là pour s'assurer qu'il va bien. Ils sont en mesure de voir le haut du corps de l'homme dans le salon à droite de l'entrée mais pas ses mains. La policière l'invite à sortir dehors pour jaser avec eux et que l'un de ses proches est inquiet, car il ne répond pas à ses appels téléphoniques. L'homme répond que cela ne sert à rien.
Environ une minute plus tard, l'homme arrive devant eux avec un couteau de cuisine dans la main. Les agents reculent et inversent leurs positions afin que la policière, utilisatrice d'une arme à impulsions électriques (AIE), se retrouve devant. Elle ordonne à l'homme de déposer son couteau et lui mentionne qu'ils vont discuter. L'homme avance de nouveau vers eux et la policière lui crie de lâcher son couteau et de reculer. L'homme recule et retourne dans le salon. Pour des motifs sécuritaires, les policiers n'entrent pas dans le logement et la policière effectue une démonstration de l'arc électrique émise par l'AIE et indique à l'homme qu'elle ne veut pas utiliser l'AIE. Elle somme de nouveau l'homme de jeter son couteau et de montrer ses deux mains. L'homme répond que cela ne sert à rien et qu'il est tanné de vivre. Les policiers tentent toujours d'établir une communication et la policière fait une seconde démonstration avec l'AIE en sommant de nouveau l'homme de déposer son couteau.
L'homme revient quelques instants plus tard devant la porte d'entrée tenant le couteau enfoncé dans son abdomen et a des saignements au cou. Les policiers lui crient alors de lâcher le couteau, mais ce dernier l'enfonce davantage dans son abdomen avec ses deux mains. La policière déploie alors l'AIE en direction de l'homme afin d'empêcher ce dernier de se blesser davantage. Il tombe au sol et lâche finalement le couteau qui est ensuite sécurisé par le policier. Une ambulance est appelée et les policiers administrent les premiers soins jusqu'à l'arrivée des ambulanciers qui prennent l'homme en charge.
L'homme est transporté en ambulance vers une centre hospitalier afin d'y recevoir les soins nécessités par ses blessures.
L'intervention était légale. L'article 48 de la Loi sur la police prévoit que les policiers ont pour mission de maintenir la paix, l'ordre et la sécurité publique, de prévenir et de réprimer le crime. La preuve révèle que les policiers sont intervenus auprès d'un homme à la suite d'un appel 911 fait par un proche manifestant des inquiétudes au sujet de la sécurité de l'homme. Le but de l'intervention était de s'assurer de la sécurité de celui-ci et de lui offrir de l'aide, le cas échéant.
Dans la présente affaire, le DPCP est d'avis que les conditions énumérées à l'article 25(1) du Code criminel sont remplies.
L'article 25(1) accorde une protection à l'agent de la paix employant la force dans le cadre de l'application ou l'exécution de la loi, pourvu qu'il agisse sur la foi de motifs raisonnables et qu'il utilise seulement la force nécessaire dans les circonstances.
Il peut s'agir, notamment, d'une arrestation légale, ou encore de manœuvres visant à désarmer une personne ou à maîtriser une personne en crise, en raison du risque qu'elle représente pour elle-même ou pour autrui.
Les policiers, étant agents de la paix, sont donc autorisés à employer une force qui, dans les circonstances, est raisonnable et nécessaire pour exercer leurs fonctions et qui n'est pas excessive.
Les tribunaux ont établi que l'appréciation de la force ne devait toutefois pas être fondée sur une norme de perfection.
En effet, les policiers sont souvent placés dans des situations où ils doivent rapidement prendre des décisions difficiles. Dans ce contexte, on ne peut exiger qu'ils mesurent le degré de force appliquée avec précision.
La preuve révèle que l'homme s'est avancé avec un couteau à la main et que les tentatives des policiers pour le désarmer ont été vaines. C'est lorsque la policière a constaté que l'homme s'était poignardé qu'elle a utilisé l'AIE en mode projection en sa direction, tentant ainsi d'empêcher qu'il se blesse davantage. La policière avait des motifs raisonnables de croire que l'utilisation de l'AIE était nécessaire pour protéger l'homme contre la mort ou d'autres lésions corporelles.
Conséquemment, à la suite de son analyse, le DPCP est d'avis que la preuve ne révèle pas la commission d'une infraction criminelle par la policière et le policier du SPM impliqués dans cet événement.
Le DPCP fournit, au nom de l'État, un service de poursuites criminelles et pénales indépendant de toute considération de nature politique, et ce, de façon à préserver l'intégrité du processus judiciaire tout en assurant la protection de la société, dans la recherche de l'intérêt de la justice et de l'intérêt public, de même que dans le respect de la règle de droit et des intérêts légitimes des personnes victimes et des témoins.
Chaque dossier soumis au DPCP est analysé avec rigueur et impartialité. La norme qui guide les procureurs concernant l'opportunité d'entreprendre une poursuite est prévue à la directive ACC-3. En droit criminel, le fardeau de la preuve que doit satisfaire la poursuite est très exigeant. En raison du principe de la présomption d'innocence, la poursuite doit en effet faire une démonstration hors de tout doute raisonnable de la culpabilité de l'accusé devant le tribunal.
La décision de poursuivre ou non est une décision discrétionnaire prise par le procureur dans l'exécution de ses obligations professionnelles sans crainte d'ingérence judiciaire ou politique et sans céder à la pression médiatique. Par ailleurs, ce n'est pas la tâche du procureur de se prononcer sur une possible faute civile ou déontologique. Il ne cherche que les éléments lui permettant de conclure qu'un acte criminel a été commis et de déterminer s'il peut raisonnablement en faire la preuve. Il ne lui appartient pas non plus de formuler des commentaires ou des recommandations concernant les méthodes d'intervention policière.
La publication des motifs qui étayent la décision de ne pas porter d'accusation dans certains dossiers revêt un caractère exceptionnel et s'appuie sur des lignes directrices.
SOURCE Directeur des poursuites criminelles et pénales
Source : Me Patricia Johnson, Porte-parole adjointe, Directeur des poursuites criminelles et pénales, 418 643-4085, [email protected]
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