Enquête indépendante sur l'événement survenu à Montréal le 16 décembre 2021 : le DPCP ne portera pas d'accusation
QUÉBEC, le 19 juill. 2022 /CNW Telbec/ - Après examen du rapport produit par le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI), le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) conclut que l'analyse de la preuve ne révèle pas la commission d'une infraction criminelle par les policiers du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM).
L'analyse portait sur l'événement survenu à Montréal le 16 décembre 2021 entourant les blessures subies par un homme.
L'examen du rapport d'enquête préparé par le BEI a été confié une procureure aux poursuites criminelles et pénales (procureure). Cette dernière a procédé à un examen complet de la preuve afin d'évaluer si à la lumière de la preuve retenue, celle‑ci révèle la commission d'infractions criminelles. Malgré plusieurs tentatives pour la joindre, la personne blessée n'a pu être informée des motifs de la décision.
Le 16 décembre 2021, à 16 h 59, un appel est fait au 911 pour un homme intoxiqué et agressif dans un magasin situé sur la rue Granby à Montréal. Deux agents du SPVM sont assignés à l'appel. Arrivés sur les lieux, les agents trouvent un homme à genou, la tête au sol, dans l'allée des réfrigérateurs.
Les agents tentent d'entrer en contact avec l'homme de façon verbale, mais ce dernier ne répond pas. Les agents lui indiquent qu'ils vont le menotter pour des raisons de sécurité. Les agents font un premier contact physique auprès de l'homme en lui touchant le bras. Un agent se charge du bras droit de l'homme tandis que l'autre prend le bras du côté gauche. L'homme réagit à la tentative de menottage, se met à crier et à bouger. À un certain moment, un des agents a l'impression que l'homme tente de se relever. Il applique alors une pression sur son épaule afin qu'il ne se relève pas. Les agents réussissent à le menotter. Il est placé en position latérale de sécurité afin de l'aider à respirer. Rapidement, les agents demandent une ambulance. Durant l'intervention, l'homme a des épisodes où il se ferme les yeux et se met à ronfler pour ensuite se réveiller en criant. Une fois l'ambulance arrivée, l'homme est transporté à l'hôpital.
Au moment de son admission, il est intubé car il ne respire plus de lui-même. Selon le médecin traitant, l'état de l'homme serait lié à un problème de consommation. Ce dernier confirme avoir consommé des substances intoxicantes à son entrée dans le magasin. L'homme est libéré de l'hôpital le lendemain.
L'article 48 de la Loi sur la police prévoit que les policiers ont pour mission de maintenir la paix, l'ordre et la sécurité publique, de prévenir et de réprimer le crime.
Dans ce dossier, l'intervention était légale. La preuve révèle que les policiers sont intervenus auprès de l'homme à la suite d'une demande jugée crédible et sérieuse. Leurs premières constatations ont permis de confirmer les faits rapportés. Les agents se sont approchés de l'homme pour des motifs valables, soit afin d'éviter que ce dernier se blesse, qu'il ne cause des dommages ou encore qu'il trouble autrement la paix.
De plus, dans la présente affaire, le DPCP est d'avis que les conditions énumérées à l'article 25 du Code criminel sont remplies.
Cette disposition accorde une protection à l'agent de la paix qui emploie la force dans le cadre de l'application ou de l'exécution de la loi.
Le paragraphe 25(1) accorde une protection à l'agent de la paix employant la force dans le cadre de l'application ou de l'exécution de la loi, pourvu qu'il agisse sur la foi de motifs raisonnables et qu'il utilise seulement la force nécessaire dans les circonstances.
Il peut s'agir, notamment, d'une arrestation légale, ou encore de manœuvres visant à désarmer une personne ou à maîtriser une personne en crise, en raison du risque qu'elle représente pour elle-même ou pour autrui.
Les policiers, étant agents de la paix, sont donc autorisés à employer une force qui, dans les circonstances, est raisonnable et nécessaire pour exercer leurs fonctions et qui n'est pas excessive.
Les tribunaux ont établi que l'appréciation de la force ne devait toutefois pas être fondée sur une norme de perfection.
En effet, les policiers sont souvent placés dans des situations où ils doivent rapidement prendre des décisions difficiles. Dans ce contexte, on ne peut exiger qu'ils mesurent le degré de force appliquée avec précision.
L'ensemble de la preuve au dossier ne me permet pas de conclure que l'intervention des policiers équivaut à l'utilisation d'une force excessive lors de l'intervention des agents.
La preuve démontre que les policiers ont utilisé la force nécessaire, soit des manœuvres de contrôle articulaires pour poser les menottes à l'homme qui leur semblait à la fois mal en point et susceptible de troubler la paix. Les policiers sont même soucieux de placer l'homme en position latérale de sécurité le plus rapidement possible. Le degré de force utilisé s'est limité à ce qui était requis pour arrêter et maîtriser l'homme.
Ainsi, rien dans la preuve ne démontre que les policiers ont fait preuve de négligence ou d'utilisation d'une force excessive. L'emploi de la force par les agents de la paix était donc justifié en vertu de l'article 25 du Code criminel.
Conséquemment, à la suite de son analyse, le DPCP est d'avis que la preuve ne révèle pas la commission d'une infraction criminelle par les policiers du SPVM impliqués dans cet événement.
Le DPCP fournit, au nom de l'État, un service de poursuites criminelles et pénales indépendant, contribuant à assurer la protection de la société, dans le respect de l'intérêt public et des intérêts légitimes des victimes.
Chaque dossier soumis au DPCP est analysé avec rigueur et impartialité. La norme qui guide les procureurs concernant l'opportunité d'entreprendre une poursuite est prévue à la directive ACC-3. En droit criminel, le fardeau de la preuve que doit satisfaire la poursuite est très exigeant. En raison du principe de la présomption d'innocence, la poursuite doit en effet faire une démonstration hors de tout doute raisonnable de la culpabilité de l'accusé devant le tribunal.
La décision de poursuivre ou non est une décision discrétionnaire prise par le procureur dans l'exécution de ses obligations professionnelles sans crainte d'ingérence judiciaire ou politique et sans céder à la pression médiatique. Par ailleurs, ce n'est pas la tâche du procureur de se prononcer sur une possible faute civile ou déontologique. Il ne cherche que les éléments lui permettant de conclure qu'un acte criminel a été commis et de déterminer s'il peut raisonnablement en faire la preuve. Il ne lui appartient pas non plus de formuler des commentaires ou des recommandations concernant les méthodes d'intervention policière.
La publication des motifs qui étayent la décision de ne pas porter d'accusation dans certains dossiers revêt un caractère exceptionnel et s'appuie sur des lignes directrices.
SOURCE Directeur des poursuites criminelles et pénales
Me Patricia Johnson, Porte-parole adjointe, Directeur des poursuites criminelles et pénales, 418 643-4085
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