Enquête indépendante sur l'événement survenu à Pontiac le 25 juillet 2021 : motifs pour lesquels aucune accusation n'a été portée
QUÉBEC, le 8 févr. 2023 /CNW Telbec/ - Les procédures judiciaires étant terminées, le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) expose les motifs l'ayant mené à ne pas déposer d'accusation dans ce dossier.
Rappelons qu'il concluait, dans son communiqué intérimaire du 23 mars 2022, que l'analyse de la preuve ne révélait pas la commission d'une infraction criminelle par le policier du Service de la sécurité publique de la MRC des Collines-de-l'Outaouais (MRC des Collines). Cette décision faisait suite à l'examen du rapport produit par le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) en lien avec l'événement entourant les blessures subies par un homme à Pontiac le 25 juillet 2021.
L'examen du rapport d'enquête préparé par le BEI avait été confié à une procureure aux poursuites criminelles et pénales (procureure). Cette dernière avait procédé à un examen complet de la preuve afin d'évaluer si à la lumière de la preuve retenue, celle-ci révélait la commission d'infractions criminelles. La procureure a informé la personne blessée de la décision.
Le 25 juillet 2021, à 16 h 47, un policier de la MRC des Collines circule en solo à bord d'une autopatrouille munie d'une caméra véhiculaire en fonction lorsqu'il aperçoit au loin un véhicule circulant à haute vitesse dans la voie inverse. L'agent déverrouille l'antenne du cinémomètre et capte le véhicule conduit par un homme et roulant effectivement à vitesse excessive. L'agent fait demi-tour et actionne les gyrophares afin de procéder à l'interception du conducteur fautif. À ce moment, ce denier accélère et l'agent constate que le conducteur effectue des dépassements illégaux. L'agent suit le véhicule fautif, mais ne peut le rattraper à cause des autres véhicules sur la route et de la topographie. L'agent avise son superviseur de la poursuite et des motifs de celle-ci.
Au moment où l'homme ralentit afin d'emprunter un chemin secondaire, l'agent le rattrape et voit le numéro de plaque du véhicule. Le superviseur demande à l'agent de mettre fin à la poursuite. L'agent obtempère en ralentissant et en éteignant ses gyrophares. Il continue toutefois sur le chemin emprunté afin de relocaliser le véhicule. Dans la minute suivante, à l'entrée d'une courbe, il aperçoit d'abord des traces de pneus puis le véhicule suspect accidenté dans un boisé en bordure de la route.
Le policier s'approche du véhicule et aperçoit le conducteur coincé dans le véhicule. Ce dernier est fortement endommagé et de la fumée émane du capot. Le policier extirpe l'homme blessé du véhicule et éteint le feu. Le conducteur blessé est transporté par ambulance à l'hôpital le plus près puis transféré rapidement vers un second centre hospitalier où il sera soigné pour ses blessures. Il obtiendra son congé de l'hôpital deux semaines plus tard.
L'infraction de conduite dangereuse, décrite à l'article 320.13 du Code criminel, se définit comme le fait de conduire un véhicule à moteur d'une façon dangereuse pour le public, en tenant compte des circonstances, incluant l'utilisation qui en est faite, la nature et l'état du lieu ainsi que l'intensité de la circulation à ce moment ou raisonnablement prévisible dans ce lieu. Le test applicable en matière de conduite dangereuse a été établi par la Cour suprême et prévoit que la preuve doit démontrer que la façon de conduire était objectivement dangereuse pour le public. À cet égard, c'est le risque de dommage ou de préjudice créé par la conduite qui doit être évalué, indépendamment des conséquences d'un accident survenu à l'occasion de la conduite du véhicule.
La preuve doit également établir que la conduite objectivement dangereuse adoptée par le conducteur constitue un écart marqué par rapport à la norme de diligence que respecterait un conducteur raisonnable dans les mêmes circonstances, en l'occurrence, un policier. Le critère de l'écart marqué souligne le haut degré de négligence nécessaire pour engager la responsabilité criminelle. Ainsi, une imprudence, une simple négligence ou une erreur de jugement sont insuffisantes pour engager la responsabilité criminelle d'un individu.
Par ailleurs, le Code de la sécurité routière (Code) contient certaines dispositions relatives à la conduite d'un véhicule d'urgence. L'article 378 précise que le conducteur d'un véhicule d'urgence ne doit actionner les feux clignotants, pivotants, les avertisseurs sonores ou un dispositif de changement des signaux lumineux de circulation visés à l'article 255 dont est muni son véhicule, que dans l'exercice de ses fonctions et si les circonstances l'exigent. Il n'est alors pas tenu de respecter certaines dispositions du Code.
L'agent qui est intervenu lors de l'incident a suivi le véhicule suspect sans avoir à utiliser une conduite qui aurait pu mettre sa vie ou celle des citoyens en danger. L'agent a utilisé les gyrophares pendant une courte période et a cessé de les utiliser lorsqu'il lui a été demandé de cesser la poursuite. Il a ensuite suivi le véhicule suspect à distance, perdant même le contact visuel avec ce véhicule par moment à cause de la topographie et de la vitesse excessive du véhicule suspect.
Conséquemment, à la suite de son analyse, le DPCP est d'avis que la preuve ne révèle pas la commission d'une infraction criminelle par le policier de la MRC des Collines impliqué dans cet événement.
Le DPCP fournit, au nom de l'État, un service de poursuites criminelles et pénales indépendant, contribuant à assurer la protection de la société, dans le respect de l'intérêt public et des intérêts légitimes des victimes.
Chaque dossier soumis au DPCP est analysé avec rigueur et impartialité. La norme qui guide les procureurs concernant l'opportunité d'entreprendre une poursuite est prévue à la directive ACC-3. En droit criminel, le fardeau de la preuve que doit satisfaire la poursuite est très exigeant. En raison du principe de la présomption d'innocence, la poursuite doit en effet faire une démonstration hors de tout doute raisonnable de la culpabilité de l'accusé devant le tribunal.
La décision de poursuivre ou non est une décision discrétionnaire prise par le procureur dans l'exécution de ses obligations professionnelles sans crainte d'ingérence judiciaire ou politique et sans céder à la pression médiatique. Par ailleurs, ce n'est pas la tâche du procureur de se prononcer sur une possible faute civile ou déontologique. Il ne cherche que les éléments lui permettant de conclure qu'un acte criminel a été commis et de déterminer s'il peut raisonnablement en faire la preuve. Il ne lui appartient pas non plus de formuler des commentaires ou des recommandations concernant les méthodes d'intervention policière.
La publication des motifs qui étayent la décision de ne pas porter d'accusation dans certains dossiers revêt un caractère exceptionnel et s'appuie sur des lignes directrices.
SOURCE Directeur des poursuites criminelles et pénales
Me Patricia Johnson, Porte-parole adjointe, Directeur des poursuites criminelles et pénales, 418 643-4085, [email protected]
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