Enquête indépendante sur l'événement survenu à Sainte-Françoise le 29 août 2022 : le DPCP ne portera pas d'accusation
QUÉBEC, le 28 sept. 2023 /CNW/ - Après examen du rapport produit par le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI), le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) conclut que l'analyse de la preuve ne révèle pas la commission d'une infraction criminelle par les policiers de la Sûreté du Québec (SQ).
L'analyse portait sur l'événement survenu à Sainte-Françoise le 29 août 2022 entourant le décès d'un homme.
L'examen du rapport d'enquête préparé par le BEI a été confié à une procureure aux poursuites criminelles et pénales (procureure). Cette dernière a procédé à un examen complet de la preuve afin d'évaluer si à la lumière de la preuve retenue, celle‑ci révèle la commission d'infractions criminelles. La procureure a rencontré et informé les proches de la personne décédée des motifs de la décision.
Le 28 août 2022, à 19 h 30, un appel à la SQ est reçu pour une assistance de la part d'une femme concernant un proche, qui refuse de quitter une cabane dans le bois située sur un lot à Sainte-Françoise. L'homme serait atteint de troubles de santé mentale et aurait consommé de l'alcool. La femme l'aurait averti qu'elle appellerait la police et il lui aurait répondu qu'elle le regretterait.
Vers 19 h 50, les policiers rencontrent la femme et son conjoint. Ils apprennent qu'un peu plus tôt dans la soirée, ce dernier aurait reconduit l'homme chez un proche, qui réside sur le lot, et ce, après être arrêtés acheter une caisse de bières. Ce proche les aurait ensuite appelés pour qu'ils viennent chercher l'homme. Celui-ci aurait toutefois refusé de quitter avec eux, souhaitant passer la nuit à la cabane. Les policiers apprennent que l'homme serait parti seul, sans arme, sans cellulaire et qu'il n'aurait pas tenu de propos suicidaires. Il aurait des médicaments à prendre en soirée. La femme s'inquiète pour la santé et la sécurité de l'homme et craint qu'il passe la nuit seul dans le bois.
Entre 20 h et 20 h 15, les agents font une première vérification dans le bois. Celui-ci est très dense et sale, et il y a un étang à proximité. Il fait noir. Les policiers ne trouvent pas l'homme, mais remarquent dans la cabane la présence d'une caisse de 12 bières dont deux sont manquantes.
À 20 h 23, les agents appellent au Centre de vigie et de coordination opérationnelle de la SQ (CVCO) afin d'obtenir du soutien. Ils résument la situation au policier qui leur répond. Ce dernier leur demande de prendre la déclaration de la femme, de refaire une vérification et de compléter un rapport de disparition. Les policiers suivent ces recommandations, mais l'homme demeure introuvable. Ils avisent les proches de l'homme, de même que la famille d'accueil pour personnes souffrant de troubles de santé mentale où celui-ci réside.
Vers 00 h 20, après avoir fait une patrouille dans le village et dans un rang, les agents rappellent au CVCO et parlent au même policier. Puisque l'homme n'a pas tenu de propos suicidaires et qu'on ne craint pas pour sa vie, les recherches sont suspendues jusqu'au lendemain matin.
Les policiers effectuent tout de même des vérifications aux alentours, puis retournent au poste où ils complètent l'avis de disparition et l'avis à transmettre aux autres autorités policières. Ils effectuent une nouvelle patrouille dans le bois, les champs, les rangs et les bâtiments à proximité vers 3 h 15, puis vers 5 h 30, sans résultat.
Le 29 août, à 8 h, les policiers rencontrent deux autres policiers près du bois où se trouve la cabane afin de recommencer les recherches.
À 8 h 15, un des agents trouve l'homme inanimé dans l'étang à côté de la cabane. L'homme est extirpé de l'eau et des manœuvres de réanimation sont entreprises jusqu'à l'arrivée des ambulanciers. Son décès est constaté sur place.
Le rapport d'autopsie a conclu à une mort par noyade probable. Le rapport toxicologique révèle une concentration d'éthanol sanguin de 32 mg/100 ml ainsi qu'une concentration thérapeutique élevée d'un antipsychotique.
L'analyse de l'ensemble de la preuve au dossier d'enquête révèle que les policiers ont effectué de nombreuses démarches pour retrouver l'homme. Ils ont fait des vérifications dans le bois à deux reprises le soir du 28 août, soit vers 20 h et vers 22 h 45, puis vers 5 h 50 le matin du 29 août. Ils n'ont pu poursuivre les recherches en raison de la noirceur et de la végétation très haute et dense, ce qui compliquait les déplacements et réduisait la visibilité. Ils ont tout de même fait des patrouilles dans le secteur, vers 00 h 05, 3 h 15 et 5 h 30. Ils ont transmis un avis à toutes les autres autorités policières. Ils ont téléphoné à la responsable de la famille d'accueil où demeurait l'homme, et ont rencontré un autre de ses proches, afin de savoir si ces personnes pouvaient l'avoir vu.
Lors des deux appels au CVCO, de nombreux éléments ont été pris en compte pour évaluer le risque, soit : le fait que l'homme connaissait le secteur; le fait qu'il ne possédait pas d'arme à feu; l'absence de disparations antérieures ou d'événement marquant récent; l'absence de propos suicidaires ou de menaces; ses antécédents en matière de santé mentale; le fait qu'il n'avait pas pris ses médicaments; sa tenue vestimentaire; sa condition physique; le fait qu'il ne possédait pas de cellulaire; la température extérieure clémente; le fait que les recherches étaient compliquées en raison du bois dense et de la noirceur.
Conséquemment, à la suite de son analyse, le DPCP est d'avis que la preuve ne révèle pas la commission d'une infraction criminelle par les policiers de la SQ impliqués dans cet événement.
Le DPCP fournit, au nom de l'État, un service de poursuites criminelles et pénales indépendant, contribuant à assurer la protection de la société, dans le respect de l'intérêt public et des intérêts légitimes des victimes.
Chaque dossier soumis au DPCP est analysé avec rigueur et impartialité. La norme qui guide les procureurs concernant l'opportunité d'entreprendre une poursuite est prévue à la directive ACC-3. En droit criminel, le fardeau de la preuve que doit satisfaire la poursuite est très exigeant. En raison du principe de la présomption d'innocence, la poursuite doit en effet faire une démonstration hors de tout doute raisonnable de la culpabilité de l'accusé devant le tribunal.
La décision de poursuivre ou non est une décision discrétionnaire prise par le procureur dans l'exécution de ses obligations professionnelles sans crainte d'ingérence judiciaire ou politique et sans céder à la pression médiatique. Par ailleurs, ce n'est pas la tâche du procureur de se prononcer sur une possible faute civile ou déontologique. Il ne cherche que les éléments lui permettant de conclure qu'un acte criminel a été commis et de déterminer s'il peut raisonnablement en faire la preuve. Il ne lui appartient pas non plus de formuler des commentaires ou des recommandations concernant les méthodes d'intervention policière.
La publication des motifs qui étayent la décision de ne pas porter d'accusation dans certains dossiers revêt un caractère exceptionnel et s'appuie sur des lignes directrices.
SOURCE Directeur des poursuites criminelles et pénales
Me Patricia Johnson, Porte-parole adjointe, Directeur des poursuites criminelles et pénales, 418 643-4085, [email protected]
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