Gestion des réservoirs d'Hydro-Québec - Une catastrophe planifiée
PESSAMIT, QC, le 7 nov. 2017 /CNW Telbec/ - La Première Nation des Innus de Pessamit accuse Hydro-Québec d'avoir manqué à ses obligations en remplissant à quasi-capacité ses réservoirs au détriment du « principe de précaution » et de diverses lois et règlements en vigueur au pays. Le mode de gestion des réservoirs que pratique la société d'État ne tient en effet aucun compte des répercussions sur l'environnement et la faune des déversements qu'il occasionne. Cette fois-ci, il a causé une véritable catastrophe environnementale sur plus de 70 km de la rivière Betsiamites, mettant du même fait en péril la sécurité des utilisateurs de ce cours d'eau.
Suite aux précipitations des dernières semaines, la société d'état a déversé de grandes quantités d'eau dans les rivières en aval desquelles sont situées ses installations, faisant passer les niveaux et les débits à des stades inégalés aux dires des Innus qui fréquentent ce territoire depuis des milliers d'années. Chez Hydro-Québec, on attribue cette situation à des crues automnales « exceptionnelles » occasionnant un niveau d'eau trop élevé dans ses réservoirs. En plus des évacuateurs des barrages de Bersimis 1 et 2 (sur la rivière Betsiamites), ce sont les vannes de Manic-5, 3, 2 et 1, celles de McCormick, de Toulnustouc et d'Outardes-2, qui furent ouvertes à tour de rôle, avec les impacts que cela comporte sur l'environnement et la faune. Il s'agissait là de déversements sans précédents dans le cas du complexe Manic-Outardes achevé en 1978, et de Bersimis 1 et 2 terminés en 1962.
Une perte totale
Dans la foulée de ces mesures « exceptionnelles », la rivière Betsiamites, principale voie d'accès des Pessamiulnut vers leur territoire traditionnel, est sortie de son lit en empiétant le milieu forestier composé d'arbres centenaires n'ayant jamais été inondés auparavant. De nombreux débris végétaux de toutes tailles, incluant de grande quantité d'arbres entiers, ont été entraînés dans la rivière. Des berges argileuses furent emportées par l'importance du débit et la force du courant, avec des conséquences prévisibles sur la fraye du saumon qui, rappelons-le, est imminente. Par ailleurs, au moins six campements traditionnels implantés dans le milieu forestier ont été endommagés de façon importante ou totalement détruits, incluant la perte totale du site Unikamit, de l'entreprise Mashkuss Aventures de Pessamit.
Pourquoi?
Le chef du Conseil des Innus de Pessamit, M. René Simon, ne se fait pas d'illusions quant aux véritables causes de la situation actuelle : « Hydro-Québec a beau nous répéter que l'apport « exceptionnel » de pluie survenu pendant sept jours au cours du mois d'octobre est le seul facteur à l'origine de tels déversements, c'est faux! Les précipitations réelles comparées aux précipitations normales du 25 au 31 octobre, ne justifient en rien le relâchement d'eau par les évacuateurs de crues. S'il est vrai que les précipitations pendant cette période ont été supérieures à la moyenne, celles pour l'ensemble de l'été et l'automne 2017 ont été de beaucoup inférieures à la moyenne. Il n'a pratiquement pas plu sur la Côte-Nord. Alors pourquoi les réservoirs d'Hydro-Québec étaient-ils pleins au point de déborder après seulement sept jours de pluie? »
À qui profite le crime?
La réponse est simple : dans sa course effrénée vers l'obtention de nouveaux contrats, Hydro-Québec s'est engagée auprès de ses clients potentiels de la Nouvelle-Angleterre, à augmenter ses réserves au-delà des besoins du Québec (rappelons que la décision américaine est attendue en janvier 2018). Solution : maintenir le niveau d'eau des réservoirs le plus élevé possible de façon à accroître la capacité de turbinage en cas de besoin. Le problème c'est qu'une telle procédure ne tient aucun compte des fortes périodes de précipitation qui peuvent survenir à tout moment, comme cela vient de se produire. Résultat : les réservoirs débordent et on ouvre les vannes. Quelles que soient les conséquences.
Dans le collimateur
« C'est ce type de gestion que dénonce Pessamit, dit le chef René Simon. En même temps que l'eau des réservoirs, Hydro-Québec évacue toute forme de précaution. Les dommages subis par les membres de notre Première Nation, ainsi que ceux infligés à notre Nitassinan (territoire traditionnel), aux diverses espèces animales et à la faune aquatique de la rivière Betsiamites, ne constituent qu'une partie du saccage. En constatant l'étendue des dommages sur les territoires qu'ils fréquentent et occupent, nos voisins de la Côte-Nord vont bientôt constater qu'eux aussi sont passés dans le collimateur hydro-québécois. Tout comme les citoyens de la Nouvelle-Angleterre qui, à grand coup de propagande, se font vendre le concept de Clean Energy. »
SOURCE Conseil des Innus de Pessamit
Jack Picard, 418 445-0987, [email protected]
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