Jugement de la Cour suprême sur les prières municipales : une victoire sur toute la ligne pour la laïcité
MONTRÉAL, le 15 avril 2015 /CNW Telbec/ - Avec une rare unanimité, les neuf juges de la Cour suprême du Canada ont statué que la récitation de la prière lors des assemblées municipales de la ville de Saguenay violent la liberté de conscience des citoyens et est ainsi contraire à la Charte québécoise des droits et libertés.
Ce jugement a été accueilli avec une profonde satisfaction par ceux qui avaient porté plainte contre cette pratique, soit le résidant de Saguenay Alain Simoneau, soutenu par le Mouvement laïque québécois et son procureur Me Luc Alarie.
« Le premier motif de cette plainte visait à défendre la laïcité de l'État et des institutions publiques, a fait valoir M. Simoneau. Je suis très satisfait de voir que le plus haut tribunal du pays a conclu que la récitation de cette prière était discriminatoire et je suis tout aussi fier d'avoir mené cette lutte jusqu'au bout. »
M. Simoneau rappelle également qu'il avait proposé au maire de Saguenay, M. Jean Tremblay, de remplacer la prière par une minute de silence. Cet accommodement aurait évité toute cette saga judiciaire mais le maire l'a refusé. Le maire Tremblay avait également promis de ne pas engager de fonds publics pour défendre sa cause, une promesse qu'il n'a pas tenue.
Pour la Cour, « le fait d'empêcher le conseil municipal de réciter la prière n'équivaut pas à faire triompher l'athéisme et l'agnosticisme. Il existe une distinction entre l'incroyance et la neutralité réelle. » Permettre aux citoyens de quitter la salle lors de la prière ne fait qu'« exacerber la discrimination », ajoute la cour.
La présidente du MLQ, Lucie Jobin, se réjouit pour sa part de voir que le préambule de la constitution canadienne reconnaissant la suprématie de Dieu ne peut en aucun cas être utilisé à l'encontre de l'obligation de neutralité de l'État ni servir à limiter l'exercice du droit à la liberté de conscience. « Nous demandons au ministre des Affaires municipales, M. Pierre Moreau, de faire respecter ce jugement dans toutes les municipalités où la prière est encore récitée », a-t-elle déclaré.
Selon Me Luc Alarie, ce jugement pourrait comporter des obligations pour le gouvernement du Québec lui-même. « La Cour affirme qu'un État qui adhère à une forme d'expression religieuse ne respecte pas son obligation de neutralité. Lorsque le président de l'Assemblée nationale siège sous un crucifix, on peut se demander s'il ne s'agit pas là d'une adhésion à une forme d'expression religieuse », soumet-il.
L'avocat souligne également que le concept de « neutralité bienveillante » retenu par la Cour d'appel du Québec n'est pas conciliable avec l'obligation de neutralité religieuse.
La Cour suprême reconnaît par ailleurs que le témoignage de l'expert Daniel Baril appelé, à titre d'anthropologue, pour éclairer le Tribunal des droits de la personne sur l'effet d'exclusion de la prière était tout-à-fait recevable et qu'il a permis au Tribunal de prendre une décision « étayée par des motifs étoffés et intelligibles ».
Finalement, la Cour suprême maintient le paiement de dommages punitifs de l'ordre de 30 000 $ que la ville de Saguenay devra verser à M. Alain Simoneau pour l'avoir ostracisé dans cette démarche toute légitime.
SOURCE Mouvement laïque québécois
Lucie Jobin : 514-985-5840; Me Luc Alarie : 514-527-0371, poste 234; Daniel Baril : 514-256-7487; Alain Simoneau : [email protected]
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