La CSN devant la Commission des institutions - Le projet de loi sur les
accommodements raisonnables ne règle rien
QUÉBEC, le 19 mai /CNW Telbec/ - La CSN demande au gouvernement un véritable débat sur la laïcité de nos institutions publiques et les exigences qui en découlent. "Nous pensons que la population du Québec est prête pour ce débat sur une charte de la laïcité. Seul le gouvernement semble vouloir l'éviter", a estimé la présidente de la CSN, Claudette Carbonneau, à l'occasion du dépôt du mémoire de la centrale syndicale devant la Commission des institutions.
La secrétaire générale de la CSN, Lise Poulin, qui accompagnait la présidente, a dénoncé ce projet de loi n'apporte rien de nouveau par rapport à la situation actuelle sauf en ce qui concerne le port du niqab. "Il ne fait que reprendre la définition connue de l'accommodement raisonnable et les critères déjà établis par la jurisprudence pour en traiter." Or, ce n'est pas la définition qui pose problème, mais son interprétation. Loin de baliser les demandes d'accommodements raisonnables, le projet de loi no 94 introduit plusieurs ambiguïtés.
Une charte avec des balises claires
En plus de rendre officielle la laïcité du Québec, une charte de la laïcité telle que le prône la CSN, devrait définir comment la neutralité devra s'exprimer dans l'appareil de l'État, ses institutions, ses représentants et ses services aux citoyennes et aux citoyens. La charte énoncerait donc les balises garantissant cette neutralité.
Les représentants du pouvoir
Pour la CSN, les fonctions de magistrat, procureur de la Couronne, policier, gardien de prison, et celles de président et vice-président de l'Assemblée nationale sont des fonctions de représentation du pouvoir de l'État et de l'autorité. Ainsi, la CSN partage la recommandation du rapport Bouchard-Taylor voulant que les personnes qui occupent ces fonctions ne portent aucun signe religieux distinctif.
Fonction d'autorité et de modèle
Les enseignantes et les enseignants ainsi que les autres personnels du réseau d'éducation public primaire et secondaire sont non seulement des représentants de l'État en situation d'autorité, mais ils servent aussi de modèles aux élèves. Pour la CSN, la neutralité doit s'appliquer aux personnes qui y travaillent par l'interdiction de manifester leurs convictions religieuses. Le même raisonnement vaut pour le réseau des services de garde subventionnés.
Les autres institutions
En ce qui concerne les autres institutions, organismes ou services publics, le processus d'élaboration de la charte de la laïcité devrait débattre, pour chacun d'entre eux, de la pertinence d'appliquer cette même règle de neutralité, puisque tous les agents de l'État ne sont pas en contact avec la population, ou ne sont pas en situation d'autorité ou de modèle. Il faudra également statuer sur les manifestations de convictions religieuses qui devraient être interdites pour le respect de la neutralité de l'État là où elles pourraient l'être, comme dans le système d'éducation.
L'égalité entre les femmes et les hommes
Selon la CSN, la charte devrait officialiser le caractère inacceptable d'une demande d'usager de services publics qui refuse, pour des motifs religieux, d'être servi par une personne de l'autre sexe. Elle devrait également confirmer que toute demande basée sur des motifs religieux conduisant à l'établissement de services publics séparés pour les femmes et les hommes ou pour des groupes religieux particuliers n'est pas acceptable.
À visage découvert
La CSN estime qu'il y a des circonstances et des lieux où le visage découvert est essentiel. La charte devrait donc obliger l'identification du citoyen lorsque c'est requis pour l'ensemble (ex. : le vote, les permis avec photos, etc.). Elle devrait également interdire le port du voile intégral dans les institutions d'enseignement. "Malgré le fait que nous croyons que les élèves, étudiants et usagers des services publics ont le droit d'exprimer leurs croyances religieuses, nous considérons que ce vêtement empêche et brime la communication et qu'il n'a donc pas sa place dans les institutions d'enseignement", de préciser Lise Poulin.
Prière et crucifix
Pour la CSN, le déplacement du crucifix de l'Assemblée nationale devrait être un geste concret qui accompagnerait l'adoption d'un texte formel affirmant la laïcité de l'État du Québec. La même logique suggère de remplacer la prière par un moment de recueillement lors de l'ouverture des séances des municipalités.
Un vrai débat
"Le projet de loi no 94 n'est pas l'outil qu'il faut pour éliminer les confusions et fournir des balises cohérentes aux demandes d'accommodements pour motifs religieux", de trancher la présidente de la CSN. Une charte de la laïcité est plus que jamais nécessaire. Elle aurait l'avantage de dissiper deux grandes confusions. La première, et la plus malheureuse, est celle d'attribuer aux seuls immigrants, les malaises engendrés par les demandes d'accommodement pour motifs religieux. La seconde, c'est de croire que nos obligations d'intégration se limitent à l'accommodement raisonnable, alors que nos programmes d'accueil et d'intégration méritent d'être largement bonifiés. "Le dialogue, le respect, la sensibilisation, l'information, la lutte aux préjugés doivent de plus en plus être à l'ordre du jour pour tout le monde, quelles que soient les origines, les particularités culturelles ou les croyances religieuses", a conclu Claudette Carbonneau.
La CSN compte près de 300 000 travailleuses et travailleurs de tous les types de milieux de travail, tant dans le secteur privé que dans le secteur public.
Renseignements: Michelle Filteau, directrice du Service des communications de la CSN, cellulaire: (514) 894-1326
Partager cet article