La lutte contre la pénurie de pharmaciens hospitaliers ralentie par la pression des besoins
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Association des pharmaciens des établissements de santé du Québec (APES)23 juin, 2015, 07:30 ET
MONTRÉAL, le 23 juin 2015 /CNW Telbec/ - L'Association des pharmaciens des établissements de santé du Québec (A.P.E.S.) a fait le point aujourd'hui sur l'état des effectifs en pharmacie hospitalière. Les résultats de son enquête annuelle montrent que la pénurie de pharmaciens hospitaliers continue de reculer, mais à un rythme plus lent que celui observé l'an dernier. Le taux de pénurie était de 19,1 % au 1er avril 2015 comparativement à 20,3 % au 1er avril 2014, soit une baisse de 1,2 %. De 2013 à 2014, le recul enregistré était de 2,4 %.
Ce ralentissement paraît attribuable à la pression des besoins dans le réseau. En effet, l'un des faits saillants de l'enquête 2015 est que plus de nouveaux postes de pharmaciens ont été créés entre le 1er avril 2014 et le 31 mars 2015 (50) que dans les deux années précédentes combinées (28).
« De toute évidence, la pression pour embaucher des pharmaciens s'est fait davantage sentir dans le réseau en 2014-2015, amenant certains établissements à ouvrir des postes dans l'espoir de pouvoir les combler. Ce faisant, on s'est retrouvé globalement avec davantage de postes à pourvoir pour un nombre limité de candidats », a souligné le président de l'A.P.E.S., le pharmacien François Paradis.
Parmi les facteurs expliquant ce phénomène, l'A.P.E.S. en retient quatre : la recherche d'un usage plus optimal des médicaments, la non-couverture de certains secteurs névralgiques, les normes de pratique de plus en plus élevées et la pénurie chronique de médicaments.
Les gestionnaires sont préoccupés par le coût des médicaments, qui représente plus de 600 millions de dollars pour les établissements du Québec selon le rapport 2014-2015 du Vérificateur général du Québec. Pour optimiser l'usage des médicaments, plusieurs approches fondées sur une contribution plus grande des pharmaciens ont démontré leur efficacité sur les plans clinique et budgétaire. Le besoin d'implanter plus largement ces solutions se fait de plus en plus sentir.
La non-couverture de certains secteurs névralgiques contribue aussi à accroître la pression. Par exemple, l'enquête montre que seulement 42 % des établissements affectent un pharmacien à l'urgence, et ce, malgré la recommandation de s'assurer de la présence d'un pharmacien à l'urgence contenue au Guide de gestion de l'urgence publié en 2006 par le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS). Or, une étude canadienne de 2008 affirme que 12 % des visites à la salle d'urgence sont causées par des problèmes reliés aux médicaments (mauvaise dose, mauvais médicament, non-observance au traitement, effets secondaires significatifs, et autres)1.
Les normes de pratique se resserrent et exercent aussi une pression sur les effectifs. Par exemple, le bilan comparatif des médicaments à l'arrivée, au transfert d'unité de soins et au congé du patient d'un établissement, une pratique requise par Agrément Canada, tarde à s'implanter malgré qu'il constitue un critère d'agrément depuis 2007. Les normes relatives à la préparation de produits médicamenteux stériles et non stériles sont aussi de plus en plus sévères. Enfin, une directive du MSSS émise en 2011, qui vise la mise en place d'un programme de surveillance de l'usage des antibiotiques pour prévenir, notamment, le développement de bactéries résistantes, tarde à être appliquée dans plusieurs milieux.
Par ailleurs, les pénuries de médicaments requièrent plus de travail de la part des équipes en pharmacie hospitalière, notamment quant aux décisions et aux processus d'information auprès du personnel soignant sur les produits ou traitements de substitution.
Recrutement
« La pénurie de pharmaciens d'établissements continue quand même de diminuer grâce à un recrutement plus grand au programme de maîtrise en pharmacie hospitalière depuis trois ans », fait remarquer M. Paradis. Soixante-trois diplômés du programme ont été embauchés dans le réseau en 2014-2015; on ne comptait que 52 diplômés en moyenne durant les années 2003 à 2012 inclusivement.
Les inscriptions à la Maîtrise en pharmacothérapie avancée demeurent aussi en hausse depuis trois ans avec 70 résidents et plus inscrits. Pour l'A.P.E.S., cet intérêt manifeste de la relève témoigne une fois de plus des effets positifs de l'amélioration des conditions de rémunération des pharmaciens d'établissements depuis l'entente de travail conclue en septembre 2012, conditions reconduites ce printemps dans l'entente de travail 2015-2020.
« Il faut demeurer vigilants et éviter de laisser la pénurie regagner du terrain », a rappelé le président de l'A.P.E.S., qui rappelle que le manque d'effectifs actuel a été causé par 15 ans d'écart salarial entre les pharmaciens salariés des pharmacies privées et ceux des établissements de santé.
Depuis 2009, la majorité des pharmaciens d'établissements de santé ont opté pour la semaine de travail de 40 heures au lieu de 36,25 heures pour contribuer à atténuer les effets de la pénurie. Cette mesure équivaut à la force de travail d'une centaine de pharmaciens à temps plein.
Rebond du recours au dépannage
Autre indice de la pression des besoins en 2014-2015, les résultats de l'enquête indiquent un rebond de 10 % du recours aux services de pharmaciens dépanneurs. Le nombre de jours de dépannage est passé de 7351 en 2013-2014 à 8050 en 2014-2015, alors qu'il avait chuté de 27,6 %, au cours de l'année 2013-2014. Le dépannage demeure néanmoins nettement inférieur au sommet de 10 152 jours atteint en 2012-2013.
Au 1er avril 2015, 252 postes de pharmaciens hospitaliers étaient non comblés dans les établissements de santé répondants, comparativement à 260 au 1er avril 2014. Le manque de pharmaciens se constate toujours à Montréal comme en région. Cent deux établissements sur une possibilité de 119 (selon la structure du réseau en vigueur jusqu'au 31 mars dernier) ont participé à l'enquête, soit un taux de réponse de 85,7 %, identique à l'an dernier.
À propos de l'A.P.E.S.
L'A.P.E.S. est un syndicat professionnel incorporé en vertu de la Loi sur les syndicats professionnels (L.R.Q., chapitre S-40). Elle représente environ 1600 pharmaciens œuvrant principalement dans les centres intégrés de santé et services sociaux (CISSS), les centres intégrés universitaires de santé et services sociaux (CIUSSS) et les centres hospitaliers universitaires du Québec.
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1 Zed P, et al. Incidence, severity and preventability of medication-related visits to the emergency department : A prospective study. Canadian Medical Association Journal. June 3, 2008; 178(12) : 1563-1569.
SOURCE Association des pharmaciens des établissements de santé du Québec (APES)
France Bouffard, Sphère Communication, Cell.: 514 718-4811, Bur.: 514 286-2772 poste 10
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