Nouvelles fournies par
Fédération québécoise des professeures et professeurs d'université26 janv, 2024, 13:31 ET
MONTRÉAL, le 26 janv. 2024 /CNW/ - Après plus d'un mois de demandes de clarifications qui sont restées sans réponse, le ministère de l'Enseignement supérieur vient de confirmer les craintes exprimées par les professeur•es et les étudiant•es de l'Institut national de la recherche scientifique (INRS), de même que par l'ensemble de la communauté universitaire : la ministre Pascale Déry s'est bel et bien immiscée dans le processus de nomination de la professeure Denise Helly au conseil d'administration de son université. Basant sa décision sur des événements s'étant déroulés en 2015 et en 2016, la ministre affirme ainsi qu'à ses yeux, les relations avec le milieu, pourtant cruciales au travail de l'anthropologue et relevant de la liberté académique, peuvent, selon les objets d'études et l'orientation des travaux, avoir de graves conséquences sur la carrière d'un•e professeur•e. Cela représente une douche froide pour toute personne travaillant sur des questions controversées ou qui dérangent les politiques en place, et pourrait mener à une autocensure néfaste tant pour la création de nouveaux savoirs que pour le bien commun.
Les justifications de la ministre Pascale Déry corroborent l'impression qu'elle n'a pas respecté la Loi sur la liberté académique dans le milieu universitaire, pourtant adoptée par son propre gouvernement en 2022, laquelle reconnaît l'autonomie des universités et garantit le droit des professeur•es de participer aux activités universitaires « sans contrainte doctrinale, idéologique ou morale, telle la censure institutionnelle ». En effet, par la voix de son attaché de presse, elle a indiqué que cette autonomie des universités est toute relative, et que des conjectures douteuses et une incompréhension de ce que représente l'exigeant et rigoureux travail de la recherche peuvent suffire à la renverser. « La ministre dit se surprendre d'une telle levée de boucliers », répond Madeleine Pastinelli, présidente de la Fédération québécoise des professeures et professeurs d'université (FQPPU). « Or, cette réaction est absolument nécessaire : la liberté académique est un droit, elle n'est pas un privilège qu'un ministère - et ce, peu importe son allégeance politique - peut retirer à une professeure selon son bon vouloir. Est-il encore nécessaire de rappeler que la liberté académique est aussi fondamentale lorsqu'elle permet de remettre en question nos certitudes que lorsqu'elle conforte nos opinions ou qu'elle joue le jeu de nos ambitions politiques ? »
En guise de rappel, la professeure Denise Helly a été informée du refus de sa candidature le 20 décembre 2023, malgré le strict respect de la procédure de désignation par l'administration, avec consultation du corps professoral. Suite à une demande de clarifications par l'INRS, le cabinet de la ministre a fait savoir à la professeure qu'il n'avait pas à lui donner d'explications à ce sujet. La FQPPU, soucieuse du respect de la Loi, a fait parvenir le 10 janvier dernier une lettre au cabinet pour réitérer l'importance de justifier le refus de la nomination. Cette missive est restée sans réponse. Après la parution d'un article dans Le Journal de Québec le 19 janvier dernier, qui met en lumière les liens de la chercheuse avec le milieu qui fait l'objet de ses études, le cabinet a jugé bon d'affirmer à une journaliste que ces liens ne lui plaisaient pas. Mentionnons que Denise Helly mène depuis plus de vingt ans des recherches sur les minorités immigrées et nationales, sur l'insertion économique et socio-culturelle des personnes issues de l'immigration, sur le discours haineux et l'islamophobie, de même que sur les politiques fédérale et québécoise de pluralisme culturel.
Depuis 1991, la FQPPU est l'instance de concertation et de représentation du corps professoral universitaire québécois.
SOURCE Fédération québécoise des professeures et professeurs d'université
Madeleine Pastinelli, présidente de la FQPPU, [email protected]
Partager cet article