Le DPCP annonce qu'il ne portera pas d'accusation dans le dossier de l'enquête indépendante instituée à la suite de l'événement du 12 septembre 2017, survenu à Mascouche, lors duquel un homme a été blessé et un autre est décédé
QUÉBEC, le 12 févr. 2019 /CNW Telbec/ - Après examen du rapport produit par le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) en lien avec l'événement entourant le décès d'un homme et les blessures subies par un autre homme le 12 septembre 2017 à Mascouche, le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) conclut que l'analyse de la preuve ne révèle pas la commission d'une infraction criminelle par les policiers du Service de police de la Ville de Terrebonne.
L'examen du rapport d'enquête préparé par le BEI a été confié à un procureur aux poursuites criminelles et pénales (procureur). Ce dernier a procédé à un examen complet de la preuve afin d'évaluer si celle‑ci révèle la commission d'infractions criminelles. Le procureur a informé la personne blessée et les proches de la personne décédée des motifs de la décision.
Événement
Le 12 septembre 2017, vers 4 h, un véhicule Honda circule en direction nord sur l'autoroute 25. Deux hommes y prennent place. Par hasard, un véhicule de patrouille du Service de police de la Ville de Terrebonne circule derrière eux. En consultant le Centre de renseignements policiers du Québec, les agents constatent que le véhicule est volé. Ils avisent le répartiteur de la situation. Le superviseur leur indique d'attendre du renfort avant de procéder à l'interception.
Les patrouilleurs remarquent que le Honda est le dernier de trois véhicules qui se suivent. Le convoi prend une première sortie pour aller sur l'autoroute 640, puis une autre pour la quitter à la hauteur de la rue Charles-Aubert, à Mascouche. Le véhicule de patrouille suit toujours. D'autres policiers, dont un superviseur, rejoignent les patrouilleurs à l'intersection de la sortie et de la rue Charles-Aubert.
Les deux véhicules de tête tournent à droite à l'intersection. Le Honda tourne plutôt à gauche. Le véhicule de patrouille tourne aussi à gauche pour l'intercepter. Enfin, le superviseur tourne à droite et intercepte les deux véhicules de tête.
Les agents activent alors leurs gyrophares pour intercepter le Honda. Au lieu de s'immobiliser, ce dernier accélère et prend la fuite. Les patrouilleurs activent leurs sirènes et continuent de le suivre. La poursuite s'étire sur environ quatre kilomètres.
Le véhicule en fuite circule à plus de 100 km/h dans des zones où la limite est de 50 km/h. Il ne s'arrête pas à trois intersections où la signalisation l'y oblige. Le véhicule de patrouille reste à plus de 100 m du véhicule en fuite et ralentit de façon sécuritaire aux intersections.
Au centre-ville de Mascouche, la route suivie jusqu'alors se termine par une intersection en « T ». Le conducteur du Honda tente de tourner à droite, mais sa vitesse est trop grande. Il perd le contrôle du véhicule et percute un arbre situé sur le terrain qui fait face à l'intersection.
Dans les instants qui suivent, les policiers prodiguent les premiers soins aux occupants et demandent l'assistance d'ambulanciers et de pompiers. Le conducteur est conduit à l'hôpital pour y être soigné. Il en va de même du passager, mais celui-ci succombera à ses blessures quelques heures plus tard.
Opinion du DPCP
L'infraction de conduite dangereuse, décrite à l'article 249 du Code criminel, se définit comme le fait de conduire un véhicule à moteur d'une façon dangereuse pour le public, en tenant compte des circonstances, incluant l'utilisation qui en est faite, la nature et l'état du lieu ainsi que l'intensité de la circulation à ce moment ou raisonnablement prévisible dans ce lieu. Le test applicable en matière de conduite dangereuse a été établi par la Cour suprême et prévoit que la preuve doit démontrer que la façon de conduire était objectivement dangereuse pour le public. À cet égard, c'est le risque de dommage ou de préjudice créé par la conduite qui doit être évalué, indépendamment des conséquences d'un accident survenu à l'occasion de la conduite du véhicule.
La preuve doit également établir que la conduite objectivement dangereuse adoptée par le conducteur constitue un écart marqué par rapport à la norme de diligence que respecterait un conducteur raisonnable dans les mêmes circonstances. Le critère de l'écart marqué souligne le haut degré de négligence nécessaire pour engager la responsabilité criminelle. Ainsi, une imprudence, une simple négligence ou une erreur de jugement sont insuffisantes pour engager la responsabilité criminelle d'un individu.
Par ailleurs, le Code de la sécurité routière contient certaines dispositions relatives à la conduite d'un véhicule d'urgence. L'article 378 précise que le conducteur d'un véhicule d'urgence ne doit actionner les feux clignotants ou pivotants ou les avertisseurs sonores ou un dispositif de changement des signaux lumineux de circulation visés à l'article 255 dont est muni son véhicule, que dans l'exercice de ses fonctions et si les circonstances l'exigent. Il n'est alors pas tenu de respecter certaines dispositions du Code.
Conséquemment, à la suite de son analyse, le DPCP est d'avis que la preuve ne révèle pas la commission d'un acte criminel par les policiers du Service de police de la Ville de Terrebonne impliqués dans cet événement.
Le Directeur des poursuites criminelles et pénales
Le DPCP fournit, au nom de l'État, un service de poursuites criminelles et pénales indépendant, contribuant à assurer la protection de la société, dans le respect de l'intérêt public et des intérêts légitimes des victimes.
Chaque dossier soumis au DPCP est analysé avec rigueur et impartialité. La norme qui guide les procureurs concernant l'opportunité d'entreprendre une poursuite est prévue à la directive ACC-3. En droit criminel, le fardeau de la preuve que doit satisfaire la poursuite est très exigeant. En raison du principe de la présomption d'innocence, la poursuite doit en effet faire une démonstration hors de tout doute raisonnable de la culpabilité de l'accusé devant le tribunal.
La décision de poursuivre ou non est une décision discrétionnaire prise par le procureur dans l'exécution de ses obligations professionnelles sans crainte d'ingérence judiciaire ou politique et sans céder à la pression médiatique. Par ailleurs, ce n'est pas la tâche du procureur de se prononcer sur une possible faute civile ou déontologique. Il ne cherche que les éléments lui permettant de conclure qu'un acte criminel a été commis et de déterminer s'il peut raisonnablement en faire la preuve. Il ne lui appartient pas non plus de formuler des commentaires ou des recommandations concernant les méthodes d'intervention policière.
La publication des motifs qui étayent la décision de ne pas porter d'accusation dans certains dossiers revêt un caractère exceptionnel et s'appuie sur des lignes directrices.
SOURCE Directeur des poursuites criminelles et pénales
Me Jean Pascal Boucher, Porte-parole, Directeur des poursuites criminelles et pénales, 418 643-4085
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