Le DPCP annonce qu'il ne portera pas d'accusation dans le dossier de l'enquête indépendante instituée à la suite de l'événement du 19 octobre 2017, survenu à Puvirnituq, lors duquel une femme a été blessée
QUÉBEC, le 21 mars 2019 /CNW Telbec/ - Après examen du rapport produit par le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) en lien avec les blessures subies par une femme le 19 octobre 2017 à Puvirnituq, le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) conclut que l'analyse de la preuve ne révèle pas la commission d'une infraction criminelle par les policiers du Corps de police régional Kativik (CPRK).
L'examen du rapport d'enquête préparé par le BEI a été confié à un procureur aux poursuites criminelles et pénales (procureur). Ce dernier a procédé à un examen complet de la preuve afin d'évaluer si celle‑ci révèle la commission d'infractions criminelles. Le procureur a informé la personne blessée des motifs de la décision.
Événement
Le 19 octobre 2017, à 3 h 27, un appel est fait au service d'urgence 911 au sujet d'un coup de feu. La personne ayant fait l'appel relate avoir aperçu un individu transporter un fusil près de chez elle.
Arrivés sur place, deux agents aperçoivent une femme qui pointe son arme à feu vers eux. Les agents reculent leur véhicule afin de s'éloigner, en sortent, et se placent chacun d'un côté d'une maison avoisinante. Ils crient à plusieurs reprises à la femme de lâcher son arme, essayant de la convaincre de coopérer.
La femme refuse et continue de pointer son arme vers les policiers. Elle leur répond qu'elle souhaite que les policiers fassent feu dans sa direction pour mettre fin à ses jours. Elle ajoute que si elle réussit à localiser les agents, elle fera feu en leur direction.
Les échanges entre la femme et les policiers s'échelonnent sur une période de cinq à dix minutes.
Du renfort est demandé sur les ondes radio. Un troisième agent arrive sur les lieux et se place dos à la femme, qui regarde toujours en direction des deux agents. Il lui demande à son tour, à plusieurs reprises, de laisser tomber son arme.
Entendant une nouvelle voix, la femme tente de localiser le troisième agent et se dirige vers lui. Lorsqu'elle le localise, elle se tourne vers lui, met son arme sur son épaule et la pointe en sa direction. À ce moment, le troisième agent fait feu sur la femme. Il se trouve alors à une distance d'environ 20 à 25 mètres d'elle.
Opinion du DPCP
Dans la présente affaire, le DPCP est d'avis que les conditions énumérées à l'article 25 du Code criminel sont remplies.
Cette disposition accorde une protection à l'agent de la paix qui emploie la force dans le cadre de l'application ou de l'exécution de la loi.
Le paragraphe 25(1) accorde une protection à l'agent de la paix employant la force dans le cadre de l'application ou l'exécution de la loi, pourvu qu'il agisse sur la foi de motifs raisonnables et probables et qu'il utilise seulement la force nécessaire dans les circonstances.
Il peut s'agir, notamment, d'une arrestation légale, ou encore de manœuvres visant à désarmer une personne ou à maîtriser une personne en crise, en raison du risque qu'elle représente pour elle-même ou pour les autres.
Le paragraphe 25(3) précise qu'un policier peut, s'il agit sur la foi de motifs raisonnables, utiliser une force susceptible de causer la mort ou des blessures graves s'il croit que cela est nécessaire afin de se protéger de la mort ou de lésions corporelles, ou encore de protéger les personnes sous sa protection contre de telles conséquences.
Les agents de la paix sont donc autorisés à employer une force qui dans les circonstances est raisonnable, convenable et nécessaire pour exercer leurs fonctions, à la condition que ce soit sans force excessive.
Les tribunaux ont établi que l'appréciation de la force ne devait toutefois pas être fondée sur une norme de perfection.
En effet, les policiers sont souvent placés dans des situations où ils doivent rapidement prendre des décisions difficiles. Dans ce contexte, on ne peut exiger qu'ils mesurent le degré de force appliquée avec précision.
Dans ce dossier, l'intervention était légale. Le policier devait intervenir pour désarmer la femme. Considérant le danger imminent auquel il faisait face, l'arme utilisée par la femme et son défaut d'obtempérer à de nombreuses reprises, le policier ayant tiré les coups de feu avait des motifs raisonnables de craindre pour sa vie et celle de ses collègues. La force appliquée contre la femme était nécessaire pour sa protection contre des lésions corporelles graves ou contre la mort.
Conséquemment, le DPCP est d'avis que l'emploi de la force par le policier était justifié en vertu de l'article 25 du Code criminel. L'analyse de la preuve ne révèle pas à son avis la commission d'un acte criminel par le policier du CPRK impliqué dans cet événement.
Le Directeur des poursuites criminelles et pénales
Le DPCP fournit, au nom de l'État, un service de poursuites criminelles et pénales indépendant, contribuant à assurer la protection de la société, dans le respect de l'intérêt public et des intérêts légitimes des victimes.
Chaque dossier soumis au DPCP est analysé avec rigueur et impartialité. La norme qui guide les procureurs concernant l'opportunité d'entreprendre une poursuite est prévue à la directive ACC-3. En droit criminel, le fardeau de la preuve que doit satisfaire la poursuite est très exigeant. En raison du principe de la présomption d'innocence, la poursuite doit en effet faire une démonstration hors de tout doute raisonnable de la culpabilité de l'accusé devant le tribunal.
La décision de poursuivre ou non est une décision discrétionnaire prise par le procureur dans l'exécution de ses obligations professionnelles sans crainte d'ingérence judiciaire ou politique et sans céder à la pression médiatique. Par ailleurs, ce n'est pas la tâche du procureur de se prononcer sur une possible faute civile ou déontologique. Il ne cherche que les éléments lui permettant de conclure qu'un acte criminel a été commis et de déterminer s'il peut raisonnablement en faire la preuve. Il ne lui appartient pas non plus de formuler des commentaires ou des recommandations concernant les méthodes d'intervention policière.
La publication des motifs qui étayent la décision de ne pas porter d'accusation dans certains dossiers revêt un caractère exceptionnel et s'appuie sur des lignes directrices.
SOURCE Directeur des poursuites criminelles et pénales
Me Jean Pascal Boucher, Porte-parole, Directeur des poursuites criminelles et pénales, 418 643-4085
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