Le DPCP annonce qu'il ne portera pas d'accusation dans le dossier de l'enquête indépendante instituée à la suite de l'événement survenu le 2 février 2020 à Saint-Georges, lors duquel un homme est décédé
QUÉBEC, le 1er avril 2021 /CNW Telbec/ - Après examen du rapport produit par le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) en lien avec l'événement entourant le décès d'un homme survenu le 2 février 2020 à Saint-Georges, le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) conclut que l'analyse de la preuve ne révèle pas la commission d'une infraction criminelle par les policiers de la Sûreté du Québec (SQ).
L'examen du rapport d'enquête préparé par le BEI a été confié à un comité composé de trois procureurs aux poursuites criminelles et pénales (procureurs). Ces derniers ont procédé à un examen complet de la preuve afin d'évaluer si celle-ci révèle la commission d'infractions criminelles. Deux procureurs qui ont participé à l'analyse du dossier ont rencontré et informé les proches de la personne décédée des motifs de la décision.
Événement
Le 2 février 2020, vers 18 h 30, le 911 reçoit un appel d'une femme à l'effet qu'un proche s'est présenté à sa résidence en psychose. Un deuxième appel est fait par une de leur connaissance.
Trois véhicules sont désignés pour localiser l'homme. Deux demandes d'assistance sont aussi adressées aux MRC voisines durant l'intervention.
L'homme est aperçu par les patrouilleurs près d'un boisé à quelques reprises, mais ses traces sont perdues. Des citoyens appellent également au 911 pour signaler sa présence dans leur cour arrière.
Vers 20 h 10, deux policiers localisent l'homme dans un boisé, qui tient un bâton de bois d'une longueur approximative de 5 pieds et 6 pouces et le suivent à pied. Ils l'interpellent et lui demandent de déposer son bâton. L'homme ne coopère pas et demande aux agents de le tirer.
Deux autres policiers les rejoignent. Avec sa main droite, l'homme sort un couteau ayant une lame de 12 centimètres de sa poche et le pointe en direction des quatre agents présents.
Les policiers tentent de le neutraliser en utilisant l'arme à impulsion électrique à deux reprises, mais sans succès en raison des vêtements épais de l'homme. Une deuxième arme à impulsion électrique est demandée. Son utilisation à deux reprises s'avère encore inefficace.
L'homme se déplace avec son bâton et son couteau dans les mains en direction d'un quartier résidentiel. Sept agents le suivent dans le but de le contenir. L'homme ne collabore pas, tente d'éloigner les agents à quelques reprises en gesticulant et continue de demander aux agents de le tirer.
Trois agents utilisent subséquemment le poivre de Cayenne à son endroit, mais sans résultat en raison du vent. Un policier tente ensuite d'immobiliser l'homme avec son véhicule de patrouille. À basse vitesse, il heurte l'homme qui s'en dégage et frappe le côté passager du véhicule avec son bâton à plusieurs reprises. Le policier tente à nouveau de bloquer son chemin, mais l'homme l'évite et s'engage sur le terrain d'un immeuble à logements à proximité.
Dans le stationnement arrière d'un immeuble à logements, un autre policier heurte l'homme avec son véhicule et celui-ci tombe dans le banc de neige. L'homme se relève et le véhicule d'un second agent s'approche dans le but de le coincer. Il perd pied.
Six agents sont positionnés en demi-lune devant lui et lui demandent de s'immobiliser et de lâcher ses armes. L'homme se relève promptement avec son couteau à la main droite et son bâton à la main gauche et se dirige rapidement vers les policiers. Un agent fait feu. L'homme continue d'avancer et de s'approcher des policiers. Une deuxième séquence de coups de feu a lieu et il tombe au sol.
Une ambulance est appelée et des manœuvres de réanimation sont immédiatement débutées. Le décès, causé par les tirs de l'arme à feu, est constaté à l'hôpital.
Analyse du DPCP
Dans la présente affaire, le DPCP est d'avis que les conditions énumérées à l'article 25 du Code criminel sont remplies.
Cette disposition accorde une protection à l'agent de la paix qui emploie la force dans le cadre de l'application ou de l'exécution de la loi.
Le paragraphe 25(1) accorde une protection à l'agent de la paix employant la force dans le cadre de l'application ou l'exécution de la loi, pourvu qu'il agisse sur la foi de motifs raisonnables et qu'il utilise seulement la force nécessaire dans les circonstances.
Il peut s'agir, notamment, d'une arrestation légale, ou encore de manœuvres visant à désarmer une personne ou à maîtriser une personne en crise, en raison du risque qu'elle représente pour elle-même ou pour autrui.
Le paragraphe 25(3) précise qu'un policier peut, s'il agit sur la foi de motifs raisonnables, utiliser une force susceptible de causer la mort ou des lésions corporelles graves s'il croit que cela est nécessaire afin de se protéger ou encore de protéger les personnes sous sa protection contre de telles conséquences.
Les policiers, étant agents de la paix, sont donc autorisés à employer une force qui, dans les circonstances, est raisonnable et nécessaire pour exercer leurs fonctions et qui n'est pas excessive.
Les tribunaux ont établi que l'appréciation de la force ne devait toutefois pas être fondée sur une norme de perfection.
En effet, les policiers sont souvent placés dans des situations où ils doivent rapidement prendre des décisions difficiles. Dans ce contexte, on ne peut exiger qu'ils mesurent le degré de force appliquée avec précision.
Dans ce dossier, la preuve révèle que les policiers ont d'abord tenté d'obtenir la collaboration de l'homme en ayant recours au poivre de Cayenne, à l'arme à impulsion électrique et aux véhicules de patrouille, mais sans succès. Leur utilisation était nécessaire dans les circonstances et ne constitue pas une force excessive. Au moment où le policier fait feu en direction de l'homme, ce dernier fonce vers les policiers devant lui armé d'un couteau et d'un bâton. Considérant l'attaque imminente auquel les policiers faisaient face, les armes en possession de l'homme et son défaut d'obtempérer à de nombreuses reprises, le policier qui a fait feu avait des motifs raisonnables d'estimer que l'emploi de l'arme à feu à l'endroit de l'homme était nécessaire pour sa protection et celle de ses collègues contre des lésions corporelles graves ou la mort.
Conséquemment, le DPCP est d'avis que l'emploi de la force par les agents de la paix était justifié en vertu de l'article 25 du Code criminel. L'analyse de la preuve ne révèle pas à son avis la commission d'un acte criminel par les policiers de la SQ impliqués dans cet événement.
Le Directeur des poursuites criminelles et pénales
Le DPCP fournit, au nom de l'État, un service de poursuites criminelles et pénales indépendant, contribuant à assurer la protection de la société, dans le respect de l'intérêt public et des intérêts légitimes des victimes.
Chaque dossier soumis au DPCP est analysé avec rigueur et impartialité. La norme qui guide les procureurs concernant l'opportunité d'entreprendre une poursuite est prévue à la directive ACC-3. En droit criminel, le fardeau de la preuve que doit satisfaire la poursuite est très exigeant. En raison du principe de la présomption d'innocence, la poursuite doit en effet faire une démonstration hors de tout doute raisonnable de la culpabilité de l'accusé devant le tribunal.
La décision de poursuivre ou non est une décision discrétionnaire prise par le procureur dans l'exécution de ses obligations professionnelles sans crainte d'ingérence judiciaire ou politique et sans céder à la pression médiatique. Par ailleurs, ce n'est pas la tâche du procureur de se prononcer sur une possible faute civile ou déontologique. Il ne cherche que les éléments lui permettant de conclure qu'un acte criminel a été commis et de déterminer s'il peut raisonnablement en faire la preuve. Il ne lui appartient pas non plus de formuler des commentaires ou des recommandations concernant les méthodes d'intervention policière.
La publication des motifs qui étayent la décision de ne pas porter d'accusation dans certains dossiers revêt un caractère exceptionnel et s'appuie sur des lignes directrices.
SOURCE Directeur des poursuites criminelles et pénales
Source : Me Audrey Roy-Cloutier, Porte-parole, Directeur des poursuites criminelles et pénales, 418 643-4085
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