Le DPCP annonce qu'il ne portera pas d'accusation dans le dossier de l'enquête indépendante instituée à la suite de l'événement survenu le 25 juillet 2018 à Lac-Brome, lors duquel un homme est décédé
QUÉBEC, le 28 oct. 2019 /CNW Telbec/ - Après examen du rapport produit par le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) en lien avec l'événement entourant le décès d'un homme survenu le 25 juillet 2018 à Lac-Brome, le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) conclut que l'analyse de la preuve ne révèle pas la commission d'une infraction criminelle par les policiers de la Sûreté du Québec (SQ).
L'examen du rapport d'enquête préparé par le BEI a été confié à un comité composé de deux procureurs aux poursuites criminelles et pénales (procureurs). Ces derniers ont procédé à un examen complet de la preuve afin d'évaluer si celle‑ci révèle la commission d'infractions criminelles. Un procureur qui a participé à l'analyse du dossier a rencontré et informé les proches de la personne décédée des motifs de la décision.
Événement
Le 25 juillet 2018, à 1 h 21, un appel est fait au 911 concernant un homme armé, ne mesurant pas plus de six pieds, vêtu de noir et portant un sac à dos. L'appelant indique que l'homme est à pied, qu'il est seul, qu'il crie et se dirige vers Cowansville, sur le chemin Knowlton, à Lac-Brome.
Six policiers répartis dans trois autopatrouilles répondent à cet appel. L'homme est repéré à 1 h 43 alors qu'il se trouve à la croisée du chemin Knowlton et de la rue Victoria dans le stationnement d'un restaurant désaffecté. Les policiers constatent qu'il est effectivement armé d'un pistolet. Un policier amorce une négociation en anglais avec l'homme à l'aide du haut-parleur de l'autopatrouille pendant environ une minute. Il lui demande de lâcher son arme et lui dit que tout ira bien s'il lâche son arme.
Affirmant qu'il planifie ses actes depuis cinq ans, l'homme n'obtempère pas aux ordres donnés. Il semble en crise, brandissant son arme dans tous les sens, puis en direction des policiers. Il gesticule en se déplaçant de gauche à droite devant les policiers. Vers 1 h 44, barricadé derrière son autopatrouille, l'un des policiers fait feu une fois, atteignant ainsi l'homme à la tête. Des manœuvres de réanimation débutent en attendant l'arrivée des ambulanciers. Le décès de l'homme est constaté à 2 h 32.
Plus tôt dans la soirée, juste avant son appel au 911, l'homme avait informé des proches qu'il ne souhaitait plus vivre et qu'il allait mettre fin à ses jours.
Analyse du DPCP
Dans la présente affaire, le DPCP est d'avis que les conditions énumérées à l'article 25 du Code criminel sont remplies.
Cette disposition accorde une protection à l'agent de la paix qui emploie la force dans le cadre de l'application ou de l'exécution de la loi.
Le paragraphe 25(1) accorde une protection à l'agent de la paix employant la force dans le cadre de l'application ou l'exécution de la loi, pourvu qu'il agisse sur la foi de motifs raisonnables et qu'il utilise seulement la force nécessaire dans les circonstances.
Il peut s'agir, notamment, d'une arrestation légale, ou encore de manœuvres visant à désarmer une personne ou à maîtriser une personne en crise, en raison du risque qu'elle représente pour elle-même ou pour autrui.
Le paragraphe 25(3) précise qu'un policier peut, s'il agit sur la foi de motifs raisonnables, utiliser une force susceptible de causer la mort ou des lésions corporelles graves s'il croit que cela est nécessaire afin de se protéger ou encore de protéger les personnes sous sa protection contre de telles conséquences.
Les agents de la paix sont donc autorisés à employer une force qui, dans les circonstances, est raisonnable et nécessaire pour exercer leurs fonctions et qui n'est pas excessive.
Les tribunaux ont établi que l'appréciation de la force ne devait toutefois pas être fondée sur une norme de perfection.
En effet, les policiers sont souvent placés dans des situations où ils doivent rapidement prendre des décisions difficiles. Dans ce contexte, on ne peut exiger qu'ils mesurent le degré de force appliquée avec précision.
Dans ce dossier, l'intervention auprès de l'individu était légale. Les policiers devaient procéder à l'arrestation d'un homme armé d'un pistolet marchant dans la rue. La preuve révèle que c'est l'homme lui-même qui a fait l'appel au 911 et l'on doit en conclure qu'il souhaitait la présence des policiers.
Tenant compte des gestes de l'homme et de sa non-collaboration, ce dernier pouvait faire feu à tout moment. Le danger à l'égard des policiers présents se trouvant à proximité de l'homme était donc réel. Celui-ci refusant de déposer son arme ou de se rendre, l'imminence d'une attaque était tout aussi présente. Le DPCP conclut que le policier qui a fait feu avait des motifs raisonnables de croire que l'usage de son pistolet était nécessaire afin de se protéger ou de protéger ses collègues de la mort ou de lésions corporelles graves.
Conséquemment, le DPCP est d'avis que l'emploi de la force par les agents de la paix était justifié en vertu de l'article 25 du Code criminel. L'analyse de la preuve ne révèle pas, à son avis, la commission d'un acte criminel par les policiers de la SQ impliqués dans cet événement.
Le Directeur des poursuites criminelles et pénales
Le DPCP fournit, au nom de l'État, un service de poursuites criminelles et pénales indépendant, contribuant à assurer la protection de la société, dans le respect de l'intérêt public et des intérêts légitimes des victimes.
Chaque dossier soumis au DPCP est analysé avec rigueur et impartialité. La norme qui guide les procureurs concernant l'opportunité d'entreprendre une poursuite est prévue à la directive ACC-3. En droit criminel, le fardeau de la preuve que doit satisfaire la poursuite est très exigeant. En raison du principe de la présomption d'innocence, la poursuite doit en effet faire une démonstration hors de tout doute raisonnable de la culpabilité de l'accusé devant le tribunal.
La décision de poursuivre ou non est une décision discrétionnaire prise par le procureur dans l'exécution de ses obligations professionnelles sans crainte d'ingérence judiciaire ou politique et sans céder à la pression médiatique. Par ailleurs, ce n'est pas la tâche du procureur de se prononcer sur une possible faute civile ou déontologique. Il ne cherche que les éléments lui permettant de conclure qu'un acte criminel a été commis et de déterminer s'il peut raisonnablement en faire la preuve. Il ne lui appartient pas non plus de formuler des commentaires ou des recommandations concernant les méthodes d'intervention policière.
La publication des motifs qui étayent la décision de ne pas porter d'accusation dans certains dossiers revêt un caractère exceptionnel et s'appuie sur des lignes directrices.
SOURCE Directeur des poursuites criminelles et pénales
Me Jean Pascal Boucher, Porte-parole, Directeur des poursuites criminelles et pénales, 418 643-4085
Partager cet article