Le DPCP annonce qu'il ne portera pas d'accusation dans le dossier de l'enquête indépendante instituée à la suite de l'événement survenu le 9 juillet 2017 à Pont-Rouge, lors duquel un homme est décédé
QUÉBEC, le 24 mai 2019 /CNW Telbec/ - Après examen du rapport produit par le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) en lien avec l'événement entourant le décès d'un homme survenu le 9 juillet 2017 à Pont-Rouge, le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) conclut que l'analyse de la preuve ne révèle pas la commission d'une infraction criminelle par les policiers de la Sûreté du Québec (SQ).
L'examen du rapport d'enquête préparé par le BEI a été confié à un comité composé de deux procureurs. Ces derniers ont procédé à un examen complet de la preuve afin d'évaluer si celle‑ci révèle la commission d'infractions criminelles. Un procureur qui a participé à l'analyse du dossier a rencontré et informé les proches de la personne décédée des motifs de la décision.
Événement
En après-midi, le 9 juillet 2017, à Pont-Rouge dans la région de la Capitale-Nationale, un homme entre avec son véhicule dans la partie clôturée du stationnement du poste de police de la SQ où sont garés plusieurs véhicules de patrouille.
Vers 15 h 10, des policiers à l'intérieur du poste de police voient l'homme fracasser les fenêtres de trois véhicules de patrouille avec une machette de près de vingt pouces fixée à sa main par du ruban adhésif.
Plusieurs policiers sortent à l'extérieur pour intervenir. L'un d'entre eux tente de prendre un contact initial avec l'homme qui montre des signes d'agressivité et qui a les poings serrés. Ce policier prend son arme de service dans la main droite et sa bonbonne de poivre de Cayenne dans sa main gauche. Deux autres policiers l'entourent avec leur arme de service pointée vers l'homme.
Le policier lui crie de lâcher sa machette, mais l'homme donne encore quelques coups sur un des véhicules de patrouille.
Le policier s'avance ensuite de quelques pas dans le stationnement pour entrer en contact avec l'homme. Celui-ci s'avance directement vers le policier qui lui crie encore de lâcher sa machette.
Se sentant menacé, le policier utilise la bonbonne de poivre de Cayenne afin d'asperger l'homme qui se trouve alors à environ quinze pieds de lui. Malgré le poivre de Cayenne, l'homme continue de s'avancer de façon menaçante vers le policier. Il a la tête penchée pour éviter le jet de la bonbonne, les bras allongés et la machette dans une main. Un autre policier tente également d'utiliser sa bonbonne de poivre de Cayenne.
À ce moment, un autre policier, bâton télescopique à la main, décide de se barricader derrière un véhicule de patrouille. Une policière crie au sujet d'arrêter d'avancer.
Le premier policier recule et l'homme s'avance toujours vers lui. Il est agressif et crie à quelques reprises : « Tire-moi ».
À une distance de moins de dix pieds de l'homme, le policier se retrouve coincé en souricière dans un coin de la bâtisse, sans issue pour fuir. Le policier lui ordonne une nouvelle fois de lâcher sa machette et d'arrêter d'avancer. L'homme n'obtempère pas et continue d'avancer de façon menaçante avec sa machette.
À près de six ou sept pieds de distance, le policier fait feu à quatre reprises en direction de l'homme. L'homme tombe sur le sol. Ce même policier doit se déplacer pour éviter de recevoir un coup de machette pendant sa chute.
Deux policiers débutent alors des manœuvres de réanimation cardiaque. L'homme est transporté à l'hôpital où son décès est constaté à 16 h 10.
Analyse du DPCP
Dans la présente affaire, le DPCP est d'avis que les conditions énumérées à l'article 25 du Code criminel sont remplies.
Cette disposition accorde une protection à l'agent de la paix qui emploie la force dans le cadre de l'application ou de l'exécution de la loi.
Le paragraphe 25(1) accorde une protection à l'agent de la paix employant la force dans le cadre de l'application ou l'exécution de la loi, pourvu qu'il agisse sur la foi de motifs raisonnables et qu'il utilise seulement la force nécessaire dans les circonstances.
Il peut s'agir, notamment, d'une arrestation légale, ou encore de manœuvres visant à désarmer une personne ou à maîtriser une personne en crise, en raison du risque qu'elle représente pour elle-même ou pour autrui.
Le paragraphe 25(3) précise qu'un policier peut, s'il agit sur la foi de motifs raisonnables, utiliser une force susceptible de causer la mort ou des lésions corporelles graves s'il croit que cela est nécessaire afin de se protéger ou encore de protéger les personnes sous sa protection contre de telles conséquences.
Les agents de la paix sont donc autorisés à employer une force qui, dans les circonstances, est raisonnable et nécessaire pour exercer leurs fonctions et qui n'est pas excessive.
Les tribunaux ont établi que l'appréciation de la force ne devait toutefois pas être fondée sur une norme de perfection.
En effet, les policiers sont souvent placés dans des situations où ils doivent rapidement prendre des décisions difficiles. Dans ce contexte, on ne peut exiger qu'ils mesurent le degré de force appliquée avec précision.
Considérant le danger imminent auquel ils faisaient face, l'arme utilisée par l'homme et son défaut d'obtempérer à de nombreuses reprises, les policiers avaient des motifs raisonnables d'estimer que la force appliquée à l'endroit de l'homme était nécessaire pour leur protection contre des lésions corporelles graves ou la mort.
Conséquemment, le DPCP est d'avis que l'emploi de la force par les agents de la paix était justifié en vertu de l'article 25 du Code criminel. L'analyse de la preuve ne révèle pas à son avis la commission d'un acte criminel par les policiers de la SQ impliqués dans cet événement.
Le Directeur des poursuites criminelles et pénales
Le DPCP fournit, au nom de l'État, un service de poursuites criminelles et pénales indépendant, contribuant à assurer la protection de la société, dans le respect de l'intérêt public et des intérêts légitimes des victimes.
Chaque dossier soumis au DPCP est analysé avec rigueur et impartialité. La norme qui guide les procureurs concernant l'opportunité d'entreprendre une poursuite est prévue à la directive ACC-3. En droit criminel, le fardeau de la preuve que doit satisfaire la poursuite est très exigeant. En raison du principe de la présomption d'innocence, la poursuite doit en effet faire une démonstration hors de tout doute raisonnable de la culpabilité de l'accusé devant le tribunal.
La décision de poursuivre ou non est une décision discrétionnaire prise par le procureur dans l'exécution de ses obligations professionnelles sans crainte d'ingérence judiciaire ou politique et sans céder à la pression médiatique. Par ailleurs, ce n'est pas la tâche du procureur de se prononcer sur une possible faute civile ou déontologique. Il ne cherche que les éléments lui permettant de conclure qu'un acte criminel a été commis et de déterminer s'il peut raisonnablement en faire la preuve. Il ne lui appartient pas non plus de formuler des commentaires ou des recommandations concernant les méthodes d'intervention policière.
La publication des motifs qui étayent la décision de ne pas porter d'accusation dans certains dossiers revêt un caractère exceptionnel et s'appuie sur des lignes directrices.
SOURCE Directeur des poursuites criminelles et pénales
Me Jean Pascal Boucher, Porte-parole, Directeur des poursuites criminelles et pénales, 418 643-4085
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