Le DPCP expose les motifs pour lesquels aucune accusation n'a été portée dans le dossier de l'enquête indépendante instituée à la suite de l'événement survenu le 14 octobre 2019 à Sainte-Catherine, lors duquel une femme a été blessée
QUÉBEC, le 20 mai 2021 /CNW Telbec/ - Le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) annonçait dans son communiqué intérimaire du 26 octobre 2020 qu'il concluait que l'analyse de la preuve ne révélait pas la commission d'une infraction criminelle par un policier de la Régie intermunicipale de police Roussillon (RIPR). Cette décision faisait suite à l'examen du rapport produit par le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) en lien avec les blessures subies par une femme le 14 octobre 2019 à Sainte-Catherine.
L'examen du rapport d'enquête préparé par le BEI avait été confié à un procureur aux poursuites criminelles et pénales (procureur). Ce dernier avait procédé à un examen complet de la preuve afin d'évaluer si celle-ci révélait la commission d'infractions criminelles. Le procureur a informé la personne blessée des motifs de la décision.
Les procédures juridiques étant terminées, voici les motifs ayant mené le DPCP à ne pas déposer d'accusation dans ce dossier.
Événement
Le 14 octobre 2019 vers 18 h 15, un policier de la RIPR est seul à bord d'un véhicule de patrouille assigné à la circulation. Il est immobilisé sur le boulevard Saint-Laurent à Sainte-Catherine lorsqu'il constate qu'une voiture omet de s'immobiliser à un arrêt obligatoire. Il intercepte le véhicule qui s'arrête un peu plus loin. Alors qu'il demande à la femme ses papiers, cette dernière, sans daigner répondre, pousse l'accélérateur à fond. Un fort bruit de moteur en résulte puisque la transmission est en mode stationnement. Le policier recule d'un pas en enjoignant la femme de cesser la manœuvre. C'est à ce moment qu'elle embraye le véhicule, causant un crissement des pneus et une accélération rapide. Le policier retourne à son véhicule et tente en vain de suivre le véhicule en fuite.
À l'intersection des boulevards Saint-Laurent et des Écluses, la femme omet de faire son arrêt obligatoire et est percutée par un véhicule venant de sa gauche. La voiture de la dame s'immobilise sous la galerie d'un immeuble à logements, percutant ledit immeuble. À l'arrivée des premiers témoins et intervenants, la femme est blessée à la tête. Les pinces de désincarcération sont utilisées pour l'extirper du véhicule. Elle est transportée à un centre hospitalier et obtient son congé quelques heures après son admission.
Analyse du DPCP
L'infraction de conduite dangereuse, décrite à l'article 320.13 du Code criminel, se définit comme le fait de conduire un véhicule à moteur d'une façon dangereuse pour le public, en tenant compte des circonstances, incluant l'utilisation qui en est faite, la nature et l'état du lieu ainsi que l'intensité de la circulation à ce moment ou raisonnablement prévisible dans ce lieu. Le test applicable en matière de conduite dangereuse a été établi par la Cour suprême et prévoit que la preuve doit démontrer que la façon de conduire était objectivement dangereuse pour le public. À cet égard, c'est le risque de dommage ou de préjudice créé par la conduite qui doit être évalué, indépendamment des conséquences d'un accident survenu à l'occasion de la conduite du véhicule.
La preuve doit également établir que la conduite objectivement dangereuse adoptée par le conducteur constitue un écart marqué par rapport à la norme de diligence que respecterait un conducteur raisonnable dans les mêmes circonstances. Le critère de l'écart marqué souligne le haut degré de négligence nécessaire pour engager la responsabilité criminelle. Ainsi, une imprudence, une simple négligence ou une erreur de jugement sont insuffisantes pour engager la responsabilité criminelle d'un individu.
Par ailleurs, le Code de la sécurité routière contient certaines dispositions relatives à la conduite d'un véhicule d'urgence. L'article 378 précise que le conducteur d'un véhicule d'urgence ne doit actionner les feux clignotants ou pivotants ou les avertisseurs sonores ou un dispositif de changement des signaux lumineux de circulation visés à l'article 255 dont est muni son véhicule, que dans l'exercice de ses fonctions et si les circonstances l'exigent. Il n'est alors pas tenu de respecter certaines dispositions du Code.
Le policier qui est intervenu lors de l'incident a suivi le véhicule suspect à distance, sans avoir à utiliser une conduite qui aurait pu mettre leur vie ou celle des citoyens en danger. Bien que les gyrophares étaient en fonction, la sirène n'a pas été utilisée. Il a gardé une vitesse sécuritaire, suivant la femme à distance.
Conséquemment, à la suite de son analyse, le DPCP est d'avis que la preuve ne révèle pas la commission d'un acte criminel par le policier de la RIPR impliqué dans cet événement.
Le Directeur des poursuites criminelles et pénales
Le DPCP fournit, au nom de l'État, un service de poursuites criminelles et pénales indépendant, contribuant à assurer la protection de la société, dans le respect de l'intérêt public et des intérêts légitimes des victimes.
Chaque dossier soumis au DPCP est analysé avec rigueur et impartialité. La norme qui guide les procureurs concernant l'opportunité d'entreprendre une poursuite est prévue à la directive ACC-3. En droit criminel, le fardeau de la preuve que doit satisfaire la poursuite est très exigeant. En raison du principe de la présomption d'innocence, la poursuite doit en effet faire une démonstration hors de tout doute raisonnable de la culpabilité de l'accusé devant le tribunal.
La décision de poursuivre ou non est une décision discrétionnaire prise par le procureur dans l'exécution de ses obligations professionnelles sans crainte d'ingérence judiciaire ou politique et sans céder à la pression médiatique. Par ailleurs, ce n'est pas la tâche du procureur de se prononcer sur une possible faute civile ou déontologique. Il ne cherche que les éléments lui permettant de conclure qu'un acte criminel a été commis et de déterminer s'il peut raisonnablement en faire la preuve. Il ne lui appartient pas non plus de formuler des commentaires ou des recommandations concernant les méthodes d'intervention policière.
La publication des motifs qui étayent la décision de ne pas porter d'accusation dans certains dossiers revêt un caractère exceptionnel et s'appuie sur des lignes directrices.
SOURCE Directeur des poursuites criminelles et pénales
Me Audrey Roy-Cloutier, Porte-parole, Directeur des poursuites criminelles et pénales, 418 643-4085
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