Le DPCP expose les motifs pour lesquels aucune accusation n'a été portée dans le dossier de l'enquête indépendante instituée à la suite de l'événement survenu le 23 octobre 2015 à Lévis, lors duquel un homme a été blessé
QUÉBEC, le 12 mai 2021 /CNW Telbec/ - Le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) annonçait dans son communiqué intérimaire du 2 novembre 2017 qu'il concluait que l'analyse de la preuve ne révélait pas la commission d'une infraction criminelle par les policiers du Service de police de la Ville de Lévis (SPVL). Cette décision faisait suite à l'examen du rapport produit par la Sûreté du Québec (SQ) en lien avec les blessures subies par un homme le 23 octobre 2015 à Lévis.
L'examen du rapport d'enquête préparé par la SQ avait été confié à un comité composé de deux procureurs aux poursuites criminelles et pénales (procureurs). Ces derniers avaient procédé à un examen complet de la preuve afin d'évaluer si celle-ci révélait la commission d'infractions criminelles. Un procureur qui avait participé à l'analyse du dossier a informé la personne blessée des motifs de la décision.
Un verdict ayant été rendu par le tribunal, voici les motifs ayant mené le DPCP à ne pas déposer d'accusation dans ce dossier.
Événement
Le 22 octobre 2015, à la suite de son arrestation avec mandat pour des infractions criminelles, un homme est détenu au poste de police du SPVL en attente de sa comparution devant le tribunal. Pendant la soirée, il s'inflige lui-même une blessure à la main dans sa cellule. L'homme se plaignant de douleur et réclamant des médicaments pour dormir, les policiers le transportent à l'hôpital afin qu'il reçoive les soins appropriés. Il est gardé pour la nuit afin de subir une évaluation psychiatrique le lendemain matin, compte tenu de ses propos suicidaires.
Au cours de la matinée du 23 octobre, l'homme apprend qu'il sera libéré de l'hôpital et s'agite violemment. Dans sa chambre, il arrache une barre de métal qui sert à sécuriser du matériel médical, sort de la pièce et donne un coup sur une vitrine avec la barre de métal. Les deux policiers qui assurent sa garde sortent alors leur bâton télescopique et lui ordonnent de lâcher la barre de métal tout en tentant de le calmer. L'homme crie qu'il veut mourir et agresse un policier en le frappant à plusieurs reprises avec la barre de métal au niveau de la tête. Pendant l'agression, le policier riposte avec son bâton télescopique sans succès. L'agent est blessé et échappe son bâton télescopique alors que l'homme fonce sur lui. L'homme projette le policier sur un mur du poste de garde du personnel et celui-ci tombe au sol. L'autre policier s'approche de l'homme qui tente de le frapper. L'homme entre dans le poste de garde, un endroit exigu et sans issue, dans lequel se trouvent trois personnes. Il est suivi des deux policiers. Il s'en prend à des biens matériels en frappant avec la barre de métal. Il arrache notamment un écran d'ordinateur et le projette vers une employée qui saute sur un comptoir afin d'éviter l'objet.
Alors qu'il prend une chaise et fait un geste pour la lancer, le policier qui n'est pas blessé fait feu sur lui. Selon un témoin, l'homme tient à ce moment la barre de métal dans sa main. L'homme est atteint au thorax et des soins lui sont prodigués. Ces blessures se sont avérées mineures.
Analyse du DPCP
Dans la présente affaire, le DPCP est d'avis que les conditions énumérées à l'article 25 du Code criminel sont remplies.
Cette disposition accorde une protection à l'agent de la paix qui emploie la force dans le cadre de l'application ou de l'exécution de la loi.
Le paragraphe 25(1) accorde une protection à l'agent de la paix employant la force dans le cadre de l'application ou l'exécution de la loi, pourvu qu'il agisse sur la foi de motifs raisonnables et qu'il utilise seulement la force nécessaire dans les circonstances.
Il peut s'agir, notamment, d'une arrestation légale, ou encore de manœuvres visant à désarmer une personne ou à maîtriser une personne en crise, en raison du risque qu'elle représente pour elle-même ou pour autrui.
Le paragraphe 25(3) précise qu'un policier peut, s'il agit sur la foi de motifs raisonnables, utiliser une force susceptible de causer la mort ou des lésions corporelles graves s'il croit que cela est nécessaire afin de se protéger ou encore de protéger les personnes sous sa protection contre de telles conséquences.
Les policiers, étant agents de la paix, sont donc autorisés à employer une force qui, dans les circonstances, est raisonnable et nécessaire pour exercer leurs fonctions et qui n'est pas excessive.
Les tribunaux ont établi que l'appréciation de la force ne devait toutefois pas être fondée sur une norme de perfection.
En effet, les policiers sont souvent placés dans des situations où ils doivent rapidement prendre des décisions difficiles. Dans ce contexte, on ne peut exiger qu'ils mesurent le degré de force appliquée avec précision.
Dans ce dossier, les policiers détenaient légalement l'homme. Les témoins ont décrit l'homme comme étant excessivement agressif et très agité. La situation était très dangereuse, considérant son état et le lieu, ils ont craint d'être attaqués. Le policier qui a fait feu avait des motifs raisonnables d'estimer que la force appliquée contre l'homme était nécessaire pour protéger les personnes sous sa protection contre des lésions corporelles graves ou la mort.
Conséquemment, le DPCP est d'avis que les policiers du SPVL impliqués dans cet événement n'ont commis aucune infraction criminelle.
Le Directeur des poursuites criminelles et pénales
Le DPCP fournit, au nom de l'État, un service de poursuites criminelles et pénales indépendant, contribuant à assurer la protection de la société, dans le respect de l'intérêt public et des intérêts légitimes des victimes.
Chaque dossier soumis au DPCP est analysé avec rigueur et impartialité. La norme qui guide les procureurs concernant l'opportunité d'entreprendre une poursuite est prévue à la directive ACC-3. En droit criminel, le fardeau de la preuve que doit satisfaire la poursuite est très exigeant. En raison du principe de la présomption d'innocence, la poursuite doit en effet faire une démonstration hors de tout doute raisonnable de la culpabilité de l'accusé devant le tribunal.
La décision de poursuivre ou non est une décision discrétionnaire prise par le procureur dans l'exécution de ses obligations professionnelles sans crainte d'ingérence judiciaire ou politique et sans céder à la pression médiatique. Par ailleurs, ce n'est pas la tâche du procureur de se prononcer sur une possible faute civile ou déontologique. Il ne cherche que les éléments lui permettant de conclure qu'un acte criminel a été commis et de déterminer s'il peut raisonnablement en faire la preuve. Il ne lui appartient pas non plus de formuler des commentaires ou des recommandations concernant les méthodes d'intervention policière.
La publication des motifs qui étayent la décision de ne pas porter d'accusation dans certains dossiers revêt un caractère exceptionnel et s'appuie sur des lignes directrices.
SOURCE Directeur des poursuites criminelles et pénales
Source : Me Audrey Roy-Cloutier, Porte-parole, Directeur des poursuites criminelles et pénales, 418 643-4085
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