Le DPCP expose les motifs pour lesquels aucune accusation n'a été portée dans le dossier de l'enquête indépendante instituée à la suite de l'événement survenu le 5 juillet 2019 à Salluit, lors duquel un homme est décédé
QUÉBEC, le 4 oct. 2021 /CNW Telbec/ - Le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) annonçait dans son communiqué intérimaire du 3 septembre 2020 qu'il concluait que l'analyse de la preuve ne révélait pas la commission d'une infraction criminelle par les policiers du Corps de police régional Kativik (CPRK). Cette décision faisait suite à l'examen du rapport produit par le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) en lien avec l'événement entourant le décès d'un homme survenu le 5 juillet 2019.
L'examen du rapport d'enquête préparé par le BEI avait été confié à un procureur aux poursuites criminelles et pénales (procureur). Ce dernier avait procédé à un examen complet de la preuve afin d'évaluer si celle-ci révélait la commission d'infractions criminelles. Le procureur a rencontré et informé les proches de la personne décédée des motifs de la décision.
Les procédures juridiques étant terminées, voici les motifs ayant mené le DPCP à ne pas déposer d'accusation dans ce dossier.
Événement
Le 5 juillet 2019 en fin de soirée, les policiers du CPRK sont appelés pour répondre à une plainte de voies de fait dans une maison du village. Les deux policiers qui arrivent sur les lieux constatent qu'un homme est traîné par les pieds au sol par un individu. Celui-ci lâche prise laissant l'homme allongé sur le ventre dans la rue.
Les policiers arrêtent le véhicule à environ trois mètres de l'homme qui gît au sol. Ils quittent le véhicule pour procéder à l'arrestation de l'agresseur présumé. Alors qu'ils s'affairent à le maîtriser, un des policiers constate que le véhicule qui était à l'arrêt commence à avancer seul. L'autre policier court en direction du véhicule et réussit à l'immobiliser, non sans que le véhicule ait eu le temps de passer sur le corps de l'homme qui gît au sol. L'homme qui respire difficilement est rapidement transporté par ambulance dans un centre hospitalier. À son arrivée, l'homme est toujours en vie mais son décès sera constaté moins d'une heure plus tard. .
L'enquête démontrera que le véhicule avait un problème mécanique qui faisait en sorte que même une fois la transmission en position « stationnement », elle pouvait être dans les faits au « neutre », ce qui laissait le véhicule libre d'avancer sur une pente légère, comme ce fut le cas.
Analyse du DPCP
La preuve au dossier d'enquête permet d'exclure tout usage de la force par les policiers comme élément contributif du décès.
En outre, elle ne permet pas de conclure que les policiers impliqués ont fait preuve de négligence criminelle.
En matière de négligence criminelle, il est interdit à une personne d'accomplir un geste ou d'omettre de poser un geste que la loi exige qu'il pose, lorsque cela montre une insouciance déréglée ou téméraire à l'égard de la vie ou de la sécurité d'autrui.
La simple négligence dans l'accomplissement d'un acte, ou le fait de ne pas remplir une obligation imposée par la loi, sont toutefois insuffisants pour conclure à la négligence criminelle. La conduite doit représenter « un écart marqué et important par rapport à la conduite d'une personne raisonnablement prudente », distinguant ainsi la faute civile de la faute criminelle.
Par ailleurs, la négligence criminelle ne constitue pas une infraction autonome. Toute forme de contribution à la mort ou aux lésions corporelles n'est pas criminelle. Pour être punissables, les gestes ou les omissions doivent avoir contribué de façon appréciable, c'est-à-dire plus que mineure aux lésions corporelles ou encore au décès d'une autre personne.
L'analyse de l'ensemble de la preuve au dossier d'enquête révèle qu'en arrivant sur place, le policier qui conduisait le véhicule a bien mis le levier de vitesse de la transmission en position « stationnement » avant de quitter le véhicule. D'autre part, ni le conducteur ni son passager n'avaient connaissance de la défectuosité mécanique.
Conséquemment, à la suite de son analyse, le DPCP est d'avis que la preuve ne révèle pas la commission d'un acte criminel par les policiers du CPRK impliqués dans cet événement.
Le Directeur des poursuites criminelles et pénales
Le DPCP fournit, au nom de l'État, un service de poursuites criminelles et pénales indépendant, contribuant à assurer la protection de la société, dans le respect de l'intérêt public et des intérêts légitimes des victimes.
Chaque dossier soumis au DPCP est analysé avec rigueur et impartialité. La norme qui guide les procureurs concernant l'opportunité d'entreprendre une poursuite est prévue à la directive ACC-3. En droit criminel, le fardeau de la preuve que doit satisfaire la poursuite est très exigeant. En raison du principe de la présomption d'innocence, la poursuite doit en effet faire une démonstration hors de tout doute raisonnable de la culpabilité de l'accusé devant le tribunal.
La décision de poursuivre ou non est une décision discrétionnaire prise par le procureur dans l'exécution de ses obligations professionnelles sans crainte d'ingérence judiciaire ou politique et sans céder à la pression médiatique. Par ailleurs, ce n'est pas la tâche du procureur de se prononcer sur une possible faute civile ou déontologique. Il ne cherche que les éléments lui permettant de conclure qu'un acte criminel a été commis et de déterminer s'il peut raisonnablement en faire la preuve. Il ne lui appartient pas non plus de formuler des commentaires ou des recommandations concernant les méthodes d'intervention policière.
La publication des motifs qui étayent la décision de ne pas porter d'accusation dans certains dossiers revêt un caractère exceptionnel et s'appuie sur des lignes directrices.
SOURCE Directeur des poursuites criminelles et pénales
Me Audrey Roy-Cloutier, Porte-parole, Directeur des poursuites criminelles et pénales, 418 643-4085
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