Le lockout chez ABI coûte 604 464 $ par jour aux Québécois
Le manque à gagner pour Hydro-Québec est de 41,7 millions depuis le 11 janvier
MONTRÉAL, le 20 mars 2018 /CNW Telbec/ - Chaque jour de lockout à l'aluminerie de Bécancour représente un manque à gagner en hiver 604 464 $ pour Hydro-Québec et de 600 352 $ pour les jours d'été, selon les calculs réalisés par un analyste indépendant à partir des plus récentes données disponibles sur les prix de l'aluminium et les taux de change. Ainsi, le lockout déclenché unilatéralement par Alcoa et Rio Tinto le 11 janvier dernier représente à ce jour la rondelette somme de 41,7 millions $ en moins dans les coffres d'Hydro-Québec. Sur une année, la perte de revenus s'établirait à 220 millions $.
C'est ce qui ressort des calculs d'un analyste indépendant qui s'est penché sur les termes du contrat liant Hydro-Québec, le gouvernement et les propriétaires de l'aluminerie. ABI a réduit depuis le 11 janvier dernier la production des deux tiers avec le lockout, réduisant d'autant sa consommation d'électricité. En temps normal, le contrat dont les termes sont décrits dans le décret 1070-2014 publié dans La Gazette officielle de 2014 prévoit que l'aluminerie de Bécancour doit payer pour tout le bloc d'énergie qui lui est réservé par Hydro-Québec, peu importe qu'elle l'utilise ou non.
Mais voilà, comme un lockout unilatéralement décrété par l'employeur est considéré au sens du contrat comme un cas de « force majeure », la compagnie voit ses obligations contractuelles suspendues. Elle n'est donc plus tenue de payer pour l'électricité qu'elle n'utilise pas. Elle échappe aussi à une pénalité annuelle de 41,9 millions qu'elle devrait normalement payer en raison de la diminution de production, puisque sa production passe sous la barre des 380 000 tonnes d'aluminium par année, toujours selon les termes du contrat.
« Un lockout, ce n'est pas un tremblement de terre ! C'est une décision d'affaires prise en connaissance de cause. Ça n'a aucun sens que ça puisse être considéré comme un cas de force majeure et qu'une partie des coûts retombe sur les épaules de tous les Québécois. On ne peut simplement dire qu'il s'agit d'un conflit privé quand cela risque d'avoir une telle incidence ultimement dans la poche des Québécois», fait valoir l'adjoint au directeur québécois des Métallos, Dominic Lemieux.
Alcoa et Rio Tinto ont mis en lockout les 1030 travailleurs de l'aluminerie de Bécancour le 11 janvier dernier, faisant la sourde oreille à la volonté syndicale de poursuivre les négociations sur les points en suspens. « Si la compagnie bénéficie de tarifs d'électricité avantageux de la part de l'État québécois, c'est parce qu'elle crée de bons emplois ici. Aujourd'hui, elle rompt ce pacte unilatéralement, alors qu'une solution négociée était à portée de main. Cela affecte lourdement 1030 familles, l'économie de toute une région et maintenant on comprend que l'ensemble des Québécois en paie aussi le prix », dénonce le président de la section locale 9700, Clément Masse.
Cette situation rappelle celle vécue lors du lockout chez Rio Tinto Alcan à Alma en 2012, alors que Hydro-Québéc avait été tenue d'acheter les surplus d'énergie générés par la multinationale au Lac-Saint-Jean en raison de sa diminution de production d'aluminium. C'est alors 148 millions qu'avait dû débourser la société d'État sur une période de six mois pour acheter de l'énergie dont elle n'avait même pas besoin. « Le scénario est un peu différent, dans ce cas-ci c'est une perte de revenus pour Hydro-Québec plutôt que des sommes que la société d'État doit débourser. Mais la logique est la même : c'est l'ensemble des Québécois qui se retrouvent à payer les pots cassés pour les actions cavalières des multinationales de l'aluminium. On a une impression de déjà-vu », explique Dominic Lemieux.
Au total, c'est 4TWh qui vient s'ajouter sur une base annuelle aux surplus d'Hydro-Québec, qui peine déjà à écouler tous ses surplus d'électricité.
Il est possible de consulter un résumé du dossier ainsi que les calculs de l'analyste indépendant, réalisés à la demande du Syndicat des Métallos, à l'adresse suivante : https://www.metallos.org.
ABI appartient à 74,9 % à Alcoa et 25,1 % à Rio Tinto, on y produit habituellement 439 999 tonnes métriques d'aluminium par année (2017). Les négociations ont achoppé sur le régime de retraite et le respect de l'ancienneté dans les mouvements de main-d'œuvre. Le comité de négociation avait accepté à la fin de l'automne de considérer une concession majeure, soit de créer un nouveau régime de retraite (pour tous les travailleurs) où le risque est assumé par les travailleurs plutôt que par l'employeur. Sitôt après cette ouverture syndicale, l'employeur a rompu les négociations et forcé le vote sur une offre globale et finale. ABI a préféré décréter un lockout plutôt que de négocier les points en suspens (les modalités du régime et le respect de l'ancienneté dans les mouvements de main-d'œuvre).
Le Syndicat des Métallos, affilié à la FTQ, est le syndicat le plus important du secteur privé au Québec. Il regroupe plus de 60 000 travailleurs et travailleuses de tous les secteurs économiques.
Il est possible de faire parvenir par courriel un résumé du dossier ainsi que l'analyse effectuée par l'expert indépendant.
SOURCE Syndicat des Métallos (FTQ)
Clairandrée Cauchy, 514 774-4001 [email protected]
Partager cet article