Le rôle fondamental de la culture dans l'économie - Par Michel Côté, directeur général des Musées de la civilisation à Québec
QUÉBEC, le 26 mai 2014 /CNW Telbec/ - Lettre d'opinion de Michel Côté, directeur général des Musées de la civilisation sur le rôle fondamental de la culture dans l'économie.
On peut aborder la question de la culture sous différents angles en insistant sur des aspects de créativité et d'innovation, d'intégration et de cohésion sociale, d'échanges et de développement… Je me permets d'être ici plus réducteur, d'insister sur les liens étroits entre économie et culture et de dévoiler une face trop souvent cachée de la réalité culturelle.
Dans une étude récente, le gouvernement français rappelait le rôle fondamental de la culture dans l'économie en soulignant que les valeurs ajoutées de ce secteur représentent 3,2 % du PIB et 670 000 emplois, soit 7 fois plus que le secteur automobile. Le Conference Board du Canada, quant à lui, estimait que l'impact économique du secteur culturel canadien s'élevait, en 2007, à 84 milliards soit 7,4 % du PIB.
Parler de culture, c'est donc parler aussi d'économie. Le Musée de la civilisation a produit dernièrement un rapport démontrant des retombées de fréquentation touristique de 12 millions liées à la présentation d'une exposition majeure, et ce, pour une seule année. On peut ajouter à ces retombées un retour en ristournes fiscales auprès des divers paliers de gouvernements de 15 millions, ce qui représente plus de 60 % des subventions accordées. Tout ceci permet de créer et de soutenir plus de 600 emplois sans compter l'appui direct aux créateurs, concepteurs, interprètes participant à la vie culturelle du Musée. Nous sommes donc en présence d'une logique d'investissement rentable compte tenu de l'impact des musées en matière d'éducation, de développement des connaissances, de protection du patrimoine ou de cohésion sociale.
Les Musées sont des acteurs clés dans la stratégie touristique. On peut facilement comprendre que Paris ne serait pas la ville la plus visitée du monde sans son patrimoine artistique et ses institutions muséales (Louvre, Orsay, Beaubourg). Depuis la réunification de l'Allemagne, il y a moins de trente ans, la Ville de Berlin repose sa stratégie de développement autant sur le développement économique au sens commun que sur sa force d'attraction culturelle. L'île aux musées, la Museumlnsel, a été identifiée comme plaque tournante de l'expression des arts et des cultures du monde. Aux musées existants dont la rénovation est toujours en cours, s'ajoutera le Humboldt Forum, carrefour culturel majeur. Cet ensemble sera complété en 2019 après des investissements atteignant plus de 900 millions d'euros.
Peut-on imaginer Québec sans son patrimoine reconnu par l'UNESCO et sans la richesse et le rayonnement de ses musées? Les institutions muséales nationales n'existeraient pas, il faudrait les créer. Il s'agit maintenant de les soutenir.
Les Musées sont aussi des incontournables en termes d'aménagement de territoires et d'aménagement urbain. De nombreuses villes à travers le monde ont choisi une politique culturelle innovante et ont créé des institutions muséales pour intervenir de façon positive sur l'aménagement du territoire. Le Louvre s'est ainsi installé à Lens alors que Beaubourg a choisi Metz; Marseille a accueilli le Musée de la Méditerranée alors que le Musée des Confluences a participé à la création d'un nouveau quartier permettant à Lyon de doubler son centre-ville. Penser un développement local et régional, c'est se doter aussi d'une politique muséale.
Depuis 25 ans, les subventions gouvernementales ont peu évolué alors que les coûts liés à l'énergie, au transport et aux taxes municipales n'ont cessé de croître. Les Musées ont fait des efforts en développant le mécénat ou en multipliant les partenariats nationaux et internationaux. Ils obtiennent du succès puisqu'ils ont eu 14 millions de visiteurs sur l'ensemble du territoire. Le gouvernement du Québec a d'ailleurs créé un groupe de travail et son rapport (le rapport Corbo) a confirmé le sous-financement du réseau et notamment des institutions muséales nationales.
Assurer le développement du Québec, c'est s'assurer que la société se dote de lieux de référence, de connaissances et de réflexion. La muséologie québécoise a fait sa marque au niveau international, permettons-lui de continuer à donner aux citoyens des lieux de qualité répondant aux besoins de partage des savoirs. Investir dans la culture, c'est contribuer au développement économique.
Le directeur général,
(signé)
Michel Côté
Le 26 mai 2014
SOURCE : Musée de la Civilisation
Contact de presse : Serge Poulin, 418 528-2072; cell. 418 906-1176
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