Leçons à tirer d'une enquête au CUSM - Le Protecteur du citoyen demande un encadrement équitable et rigoureux de l'accueil de patients étrangers au Québec
QUÉBEC, le 9 juin 2014 /CNW Telbec/ - Dans un rapport d'intervention qu'il rend public aujourd'hui, le Protecteur du citoyen conclut que l'admission pour des soins de santé d'une ressortissante du Koweït par le CUSM, en décembre 2011, s'est faite en dehors des mécanismes habituels d'accès et de tout encadrement gouvernemental. Le Protecteur du citoyen craint que la normalisation d'une telle pratique crée des iniquités sur les listes d'attente d'un réseau déjà sollicité de toutes parts. « Alors que s'exerce une pression considérable sur les établissements de santé au Québec pour tenter de répondre aux besoins de la population, il est impératif d'assurer d'abord et avant tout aux usagers du réseau le meilleur accès possible aux soins et aux services, dans les délais requis » rappelle Raymonde Saint-Germain, protectrice du citoyen.
Les faits à l'origine de l'intervention du Protecteur du citoyen
En décembre 2011, une ressortissante du Koweït a été admise à l'hôpital Royal Victoria du Centre universitaire de santé McGill (CUSM) pour y recevoir des soins et des services de santé. Le Protecteur du citoyen a décidé de réaliser une enquête afin d'examiner différents aspects de cette situation et plus particulièrement les enjeux d'intérêt public qu'elle soulève. L'intervention du Protecteur du citoyen n'avait pas pour objet de remettre en cause les motifs à l'origine de la venue de la ressortissante au CUSM. Les circonstances entourant son séjour au Québec et les soins et services qu'elle y a reçus ont plutôt servi à éclairer l'examen de différents volets médicaux, matériels, financiers, administratifs et réglementaires de son admission. Cet examen a révélé plusieurs failles :
- dans la liberté d'agir que s'est donnée le CUSM pour admettre la ressortissante étrangère;
- dans le respect des procédures pour l'obtention du Certificat d'acceptation du Québec nécessaire à l'émission d'un visa d'entrée au Canada;
- dans le respect des règles applicables durant l'hospitalisation de cette personne à l'hôpital Royal Victoria;
- dans les modalités liées à la facturation des frais liés à cette hospitalisation et dans l'utilisation, par le CUSM, des sommes versées.
L'admission de cette ressortissante étrangère s'est effectuée dans le cadre de la mise en œuvre d'un contrat de partage d'expertise conclu entre le CUSM et le ministère de la santé de l'État du Koweït. Le CUSM a transféré à une compagnie privée les droits et responsabilités lui incombant en vertu de ce contrat. Cette compagnie, le MMI Montreal Medical International Inc. a pour seul actionnaire un organisme de bienfaisance voué au soutien de la recherche et d'établissements publics de soins de santé, Optimal Health Care Foundation. Ces deux entités ne sont pas assujetties à la Loi sur les services de santé et les services sociaux et aux obligations de transparence et de reddition de compte qu'elle impose. Un tel modèle d'affaires, utilisant des infrastructures et des ressources publiques, n'est pas acceptable de l'avis du Protecteur du citoyen. Il soulève des questions d'éthique, d'équité et de bonne administration. C'est pourquoi le Protecteur du citoyen recommande au ministère de la Santé et des Services sociaux de s'assurer qu'il soit dorénavant interdit qu'un établissement public se déleste de ses droits et responsabilités au profit d'une compagnie privée, comme le CUSM l'a fait au profit du MMI. Il lui recommande également d'examiner à fond les liens du CUSM avec cette compagnie et d'exiger du CUSM une reddition de comptes complète des sommes reçues du Koweït en lien avec le partage d'expertise.
Le Protecteur du citoyen recommande que le ministre de la Santé et des Services sociaux soit dorénavant le seul à pouvoir autoriser l'accueil planifié de ressortissants étrangers recevant des soins de santé en dehors d'une situation d'urgence et qu'il élabore des orientations encadrant le processus d'accueil, de concert avec le ministre les Relations internationales et de la Francophonie. Il demande par ailleurs au ministère de la Santé et des Services sociaux de prévoir un encadrement des échanges internationaux de partage d'expertise pour l'ensemble des établissements du réseau. Il lui recommande aussi de convenir de modalités avec le ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion afin que le certificat d'acceptation du Québec ne soit délivré qu'après que le ministre de la Santé et des Services sociaux aura accepté l'admission d'un ressortissant étranger, désigné l'établissement qui l'accueillera et fixé les conditions de l'hospitalisation.
De plus, l'enquête du Protecteur du citoyen a démontré que plusieurs affirmations transmises aux médias par un porte-parole du CUSM en février 2013 étaient incomplètes ou inexactes. Ce dernier avait notamment affirmé que le ministre de la Santé et des Services sociaux avait autorisé l'accueil de la dame du Koweït avant l'arrivée de celle-ci au pays. Or, l'enquête a révélé que la directrice du cabinet adjointe du ministre de la Santé et des Services sociaux a plutôt été informée après l'admission de la dame à l'hôpital Royal Victoria.
Le rapport d'intervention L'admission d'une ressortissante étrangère à l'Hôpital Royal Victoria du Centre universitaire de santé McGill relate les faits et soulève les questions d'intérêt public. Ses recommandations visent à éviter la répétition des mêmes manquements et à assurer une prise de décision équitable pour l'ensemble des usagers des services publics de santé au Québec.
SOURCE : Protecteur du citoyen
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