LETTRE OUVERTE DE VÉRONIQUE PROULX - VISITE DE JOE BIDEN AU CANADA : LES ATTENTES SONT ÉLEVÉES ENVERS JUSTIN TRUDEAU
MONTRÉAL, le 16 mars 2023 /CNW/ - Joe Biden sera enfin de passage au Canada d'ici la fin du mois de mars. Ayant déjà visité une dizaine de pays depuis son élection à la présidence, plusieurs ont donc passé avant nous, que ce soit dans le cadre de sommets internationaux ou de visites officielles.
Bien sûr, Justin Trudeau a été le premier chef de gouvernement à rencontrer virtuellement Joe Biden après son élection et quelques occasions de discuter avec son homologue américain se sont présentées depuis.
Il y a lieu toutefois de se questionner quant à la place qu'occupe le Canada sur la liste des visites prioritaires de Joe Biden, alors qu'à quelques exceptions près, celle-ci a habituellement lieu dès le début des mandats présidentiels, et ce, depuis les années 1940.
Bien que la venue d'un président américain à Ottawa soit toujours l'un des moments les plus forts en politique canadienne, celle de Joe Biden s'inscrit toutefois dans un contexte économique particulièrement difficile, accentué par les politiques protectionnistes de son administration.
Le premier ministre Trudeau doit profiter de l'occasion pour faire réaliser à monsieur Biden à quel point les États-Unis tirent également avantage d'un commerce fort entre nos deux pays. Il est impératif qu'à son départ, il perçoive le Canada comme une extraordinaire opportunité et non plus comme une menace pour l'économie américaine.
Rappelons cette phrase célèbre prononcée en mars 1969 à Washington, par le père de Justin Trudeau, alors premier ministre du Canada. « Être votre voisin, c'est comme dormir avec un éléphant. Quelque douce et placide que soit la bête, on subit chacun de ses mouvements et de ses grognements. »
En d'autres mots, notre santé économique dépend considérablement de nos échanges commerciaux avec les États-Unis. Ce phénomène s'illustre notamment par les conséquences que nous subissons en raison des actions protectionnistes du gouvernement américain, qui rendent son marché plus difficilement atteignable.
Le président Biden semble néanmoins déterminé à livrer ses engagements électoraux. Sa plateforme contenait plusieurs éléments alarmants pour les entreprises d'ici qui font des affaires aux États-Unis: "Make Buy American Real", "Make it in America", "Innovate in America", "Stand up for America", "Supply America so we aren't depending on China" et "Expand Buy American to other form of government assistance".
Depuis qu'elle est en poste, l'administration Biden accumule les mesures pour favoriser les entreprises locales et limiter l'accès aux contrats gouvernementaux pour les entreprises étrangères, incluant les entreprises canadiennes.
Cette approche est également problématique pour nous puisque 79 % des exportations de biens canadiens vers les États-Unis sont intégrées aux chaînes d'approvisionnement américaines. Sans compter que la multiplication des orientations préférentielles de Washington envers ses entreprises locales pourrait être en contradiction avec l'entente de libre-échange entre le Canada, les États-Unis et le Mexique.
L'incertitude générée par Washington chez les manufacturiers et exportateurs québécois et canadiens est telle que certains se sentent obligés d'investir dans des usines ou d'ouvrir des locaux aux États-Unis afin de pouvoir participer aux grands appels d'offres publics.
Comme si ce n'était pas assez, l'administration Biden est très agressive dans la prise de décisions visant à réduire l'inflation par des mesures fiscales et des investissements massifs, notamment dans le secteur manufacturier.
Le gouvernement du Canada devra donc réagir rapidement à ces actions américaines qui nuisent significativement à la compétition équitable entre nos pays. Le dépôt du prochain budget Freeland serait le bon moment pour agir.
Évidemment, le premier ministre Trudeau doit également profiter de la venue du président Biden pour le convaincre de l'importance de conserver nos marchés réciproquement ouverts et compétitifs. C'est en travaillant ensemble que nous solidifierons nos leviers et deviendrons moins dépendants d'autres marchés plus complexes. Une chose est certaine, nous ne gagnons rien à se refermer graduellement l'un sur l'autre, puisque l'intégration de nos économies est grande et mutuellement bénéfique.
À vous de jouer monsieur Trudeau, les attentes sont élevées.
Véronique Proulx
Présidente-directrice générale
Manufacturiers et Exportateurs du Québec
SOURCE Manufacturiers et Exportateurs du Québec
Marie-Ève Labranche, 514 570-5469, [email protected]
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