L'industrie manipule ses prix pour atténuer l'impact des taxes : des marques de cigarettes dans les dépanneurs québécois à peine plus chères qu'il y a dix ans
MONTRÉAL, le 15 mars 2017 /CNW Telbec/ - À la veille du prochain budget provincial et dans la foulée des appels en faveur d'une hausse de la taxe tabac, la Coalition québécoise pour le contrôle du tabac demande aussi au gouvernement de s'engager à réformer le cadre fiscal en la matière, de manière à empêcher l'industrie de contrecarrer les impacts bénéfiques des taxes sur le taux de tabagisme.
Dans son mémoire envoyé au ministre des Finances à l'occasion des consultations prébudgétaires, la Coalition fait l'analyse détaillée du prix des cigarettes en fonction des affiches de prix dans une vingtaine de dépanneurs surtout aux environs de Montréal, observées au fil des quatorze dernières années. La Coalition en arrive à des constats pour le moins troublants, notamment lorsqu'on tient compte des hausses de taxes survenues pendant la période en question et lorsqu'on ajuste les prix en fonction de l'inflation.
« La segmentation des prix par l'industrie du tabac résulte en la disponibilité de marques à rabais dans les dépanneurs du Québec. Pire, nous constatons que le prix réel des marques les moins chères n'ont subi presque aucune augmentation depuis le milieu des années 2000 et, ce, malgré des hausses de taxes totalisant 1,20$ par paquets de 20 cigarettes, » déplore Flory Doucas, porte-parole de la Coalition. (Il y a eu trois hausses des taxes aux Québec depuis 2004: deux hausses provinciales en 2012 et 2014, et une fédérale en 2014).
Renforcement des inégalités sociales
Les taxes sur le tabac constituent d'abord et avant tout une mesure de santé publique et non un moyen de faire de l'argent sur le dos des fumeurs, eux-mêmes victimes d'une industrie sans scrupules. En effet, selon l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), « c'est l'augmentation substantielle des taxes et des prix sur les produits du tabac qui se révèle la mesure la plus efficace et la plus rentable pour faire diminuer le tabagisme, en particulier parmi les jeunes et les populations pauvres, » contribuant ainsi à « réduire les inégalités sociales en matière de santé ».
Or, en segmentant leur marché par tranches de prix, les fabricants de tabac réussissent à contrecarrer les taxes en maintenant l'offre en cigarettes « bon marché ». Cela prive les populations à faibles revenus, soit celles qui sont les plus sensibles au prix et les plus difficiles à rejoindre via d'autres interventions, des bénéfices de santé associés aux taxes, contribuant ainsi à augmenter les inégalités sociales en matière de santé. En d'autres mots, la manipulation des prix est opérée de sorte que les hausses de taxes affectent peu ou pas les fumeurs de marques à rabais qui seraient autrement plus tentés à cesser face à des cigarettes plus chères.
Dans la mesure où les fumeurs sont taxés pour des fins de santé publique, « le moins que l'on puisse faire, c'est d'assurer que ces taxes remplissent leur plein potentiel de réduction du tabagisme, » statue madame Doucas.
C'est pourquoi, en plus de réclamer une hausse de la taxe tabac dans le prochain budget, la Coalition demande au ministre Leitão d'examiner les options à sa disposition pour arrimer le cadre fiscal lié au tabac aux objectifs gouvernementaux de réduction du tabagisme, notamment en instaurant une politique de prix qui empêcherait la segmentation des prix. Cette demande fait écho à la recommandation de l'OMS qui demande aux gouvernements « d'en arriver à la plus forte réduction possible des incitations pour le consommateur à passer à des marques ou à des produits moins chers face à l'augmentation des taxes ».
Pour voir le communiqué en PDF, avec graphique, références complètes et complément d'information sur la segmentation des prix, cliquer ici : http://www.cqct.qc.ca/Communiques_docs/2017/PRSS_17_03_15_Segmentation_des_prix.pdf
À propos: Quelque 470 organisations québécoises -- associations médicales, ordres professionnels, municipalités, hôpitaux, écoles, commissions scolaires, etc., ont endossé les mesures destinées à réduire le tabagisme et ses conséquences réclamées par la Coalition québécoise pour le contrôle du tabac. Fondée en 1996, les principaux objectifs de la Coalition incluent prévenir l'initiation au tabagisme, favoriser l'abandon, protéger les non-fumeurs contre la fumée secondaire et obtenir un cadre législatif qui reflète la nature néfaste et toxicomanogène du tabac. La CQCT est une initiative de l'Association pour la santé publique du Québec.
SOURCE Coalition québécoise pour le contrôle du tabac
Entrevues : Mme Flory Doucas, codirectrice et porte-parole, CQCT : 514-598-5533; 514-515-6780 (cell.)
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