Nouvelles décisions du comité des plaintes du CPQ - Interprétation de sondages, respect des sources et liberté en matière de choix rédactionnels
MONTRÉAL, le 4 févr. 2013 /CNW Telbec/ - Le tribunal d'honneur du Conseil de presse du Québec a rendu et publié treize (13) nouvelles décisions reliées à des plaintes qu'on lui avait soumises. Huit d'entre elles ont été retenues, les cinq autres ayant été rejetées. Sept d'entre elles sont ici résumées.
L'interprétation des sondages, un art à manier prudemment
Pas moins de quatre plaintes visaient, à différents titres, la publication de sondages d'opinion sur le conflit étudiant dans les pages des quotidiens du groupe Gesca (La Presse, Le Soleil et Le Droit), ainsi que sur leurs sites web. Plusieurs griefs ont ainsi été formulés par les différents plaignants : interprétation erronée des résultats, titres trompeurs et absence d'indications quant à la méthodologie utilisée ou remise en question de sa valeur scientifique.
La première (D2012-05-124) concernait essentiellement les titres coiffant des articles parus dans Le Droit, La Presse et LaPresse.ca et relatant un sondage d'opinion sur l'appui populaire vis-à-vis de l'idée d'adopter une loi spéciale qui aurait mis fin au conflit étudiant. Or, et c'est ici que le bât blesse, la loi n'ayant pas encore été déposée au moment de mener le sondage, mais l'ayant été au moment d'en publier les résultats, les plaignants ont estimé que les titres étaient trompeurs. De fait, le Conseil a jugé que Le Droit et LaPresse.ca avaient induit leurs lecteurs en erreur en titrant que « Les Québécois appuient la loi spéciale », puisque les répondants ne pouvaient en connaître les modalités au moment de se prononcer. Pour les mêmes raisons, le Conseil a jugé qu'il était trompeur d'insinuer dans un titre que les Québécois étaient en faveur « de la ligne dure ».
La seconde plainte (D2012-05-123) reprochait quant à elle au journal La Presse d'avoir accordé une importance démesurée à un sondage, au détriment d'un autre, dont les résultats différaient sensiblement : le premier tendant à démontrer un fort appui populaire envers la position gouvernementale, tandis que le second laissait croire l'inverse. Le Conseil a estimé que la décision de couvrir cet événement relevait de la liberté rédactionnelle reconnue aux médias, et qu'il appartenait en conséquence à La Presse d'établir l'importance accordée à la publication de chacun de ces sondages. La plainte a donc été rejetée.
Finalement, la dernière décision, qui portait sur deux plaintes étudiées conjointement et qui visaient autant Le Soleil, que La Presse et le portail web LaPresse.ca, les plaignants reprochaient à ces médias d'avoir omis de publier les indications habituelles relatives à la méthodologie. Le Conseil leur a donné raison sur ce point.
Il est intéressant de noter que deux des trois plaintes dénonçaient l'utilisation d'une méthodologie de sondage non probabiliste, un grief sur lequel le comité des plaintes a cependant estimé qu'il ne pouvait se prononcer, n'ayant pas la compétence nécessaire pour en déterminer sa valeur scientifique. La question a toutefois été déférée au conseil d'administration (CA) du CPQ, qui a récemment décidé de mettre sur pied un comité, composé à la fois de membres du CA et d'experts en matière de sondages, dont le mandat sera d'émettre une série de recommandations concernant l'utilisation par les médias des sondages d'opinion.
La fine ligne entre presser un élu de questions et lui manquer de respect
Le lendemain de son arrestation, survenue lors d'une manifestation organisée durant le conflit étudiant, le député de Québec solidaire, Amir Khadir, avait tenu un point de presse. Diffusé en direct, les téléspectateurs de différentes chaînes télévisées avaient ainsi assisté à un interrogatoire pour le moins incisif. Du lot, les propos et questions tenus par le journaliste de TVA et LCN, Robert Plouffe, ressortaient clairement du lot, étant les plus agressifs.
Suite à la plainte de deux citoyens, le Conseil a jugé que le journaliste avait effectivement manqué à son devoir de rigueur professionnelle en y allant de commentaires cinglants et méprisants envers le député de Mercier, en plus de témoigner de sa partialité, ce qui constituait aux yeux des membres du comité une double faute, s'agissant d'un journaliste factuel.
Le Groupe TVA-LCN a du reste été blâmé pour avoir refusé de participer au traitement de la plainte.
Régime de retraite dans la fonction publique : la question méritait que le Journal de Montréal s'y attarde autant
Novembre 2011, le Journal de Montréal, le Journal de Québec et l'Agence QMI publient, en quelques jours, une vingtaine d'articles sur les régimes de retraite des employés de la fonction publique québécoise.
Dénonçant ce traitement jugé disproportionné, le Syndicat canadien de la fonction publique a déposé plainte, estimant que cette série manquait d'équilibre dans les points de vue présentés, que certains titres étaient sensationnalistes, que certaines photos étaient tendancieuses et, finalement, qu'on lui avait indûment refusé un droit de réplique.
Si les trois premiers griefs ont été rejetés, le Conseil jugeant que les médias en question avaient traité d'un sujet qui était éminemment d'intérêt public, tout en accordant une place aux différentes parties, le quatrième a pour sa part été retenu : compte tenu de l'importance de la couverture, les médias auraient dû permettre à cet important syndicat d'apporter certaines précisions afin de mieux éclairer le public sur cet enjeu de taille.
Roche c. Radio-Canada : longue série de récriminations, toutes rejetées
Suite à la diffusion d'un reportage de l'émission Enquête, portant sur les accusations criminelles pesant sur deux employés de la firme d'ingénierie Roche, celle-ci a porté plainte au CPQ, reprochant aux journalistes de la chaîne publique toute une série de fautes professionnelles.
Les griefs étaient nombreux : atteinte au droit à un procès juste et équitable, atteinte à la dignité, absence d'intérêt public, manque d'impartialité, harcèlement et, finalement, cueillette illégitime d'information. Ils ont tous été rejetés.
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Le texte intégral des décisions ainsi qu'un résumé des arguments des parties en cause peuvent être consultés à l'adresse conseildepresse.qc.ca, à la section « Décisions ».
Ces décisions sont toutes susceptibles d'être portées en appel dans les 30 jours de leur réception par les parties.
Le Conseil rappelle que « Lorsqu'une plainte est retenue, l'entreprise de presse visée par la décision a l'obligation morale de la publier ou de la diffuser. » (Règlement No 3, article 8.2)
SOURCE : CONSEIL DE PRESSE DU QUEBEC
Julien Acosta
Directeur des communications
Conseil de presse du Québec
Tél. : (514) 529-2818 (poste 2)
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