Ordres professionnels : quand le corporatisme nuit à la défense du public
Nouvelles fournies par
Institut de recherche et d'informations socio-économiques (IRIS)15 déc, 2015, 05:00 ET
MONTRÉAL, le 15 déc. 2015 /CNW Telbec/ - Les ordres professionnels québécois connaissent une tension entre leur mission de défense du public et la promotion de leur profession. Cette tension devient parfois contradictoire quand la promotion du métier dérape vers le corporatisme. Celle-ci s'illustre alors par une autorégulation défaillante et une tendance à la protection d'un marché au lieu de celle du public. C'est ce que met en lumière une nouvelle note de l'Institut de recherche et d'informations socioéconomiques (IRIS).
« Nous relevons tout d'abord une tendance chez les ordres professionnels à faire pression pour obtenir des actes réservés au détriment d'autres professions. Par exemple, l'ordre professionnel des travailleurs sociaux, grâce à des représentations, a obtenu d'être la seule profession autorisée à effectuer des évaluations psychosociales dans le cas de mandats d'inaptitude, alors qu'auparavant, les infirmières, les techniciens en travail social et les psychologues avaient également le droit de faire ce type de travail. Cette action risque désormais d'engorger le système de santé et de pousser les gens vers le secteur privé à cause des délais trop longs. Il est légitime de questionner si tout ceci a été fait au nom de la protection du public », affirme Jennie-Laure Sully, chercheure-associée à l'IRIS et auteure de la note.
« Les ordres professionnels ont également montré une capacité d'autorégulation trop limitée pour leur permettre de défendre le public adéquatement. Prenons d'une part l'exemple récent des ingénieurs où a été révélée l'existence d'une culture de collusion endémique. L'Ordre des ingénieurs n'a jamais rien vu, ou du moins n'a rien fait, et seule une action venue de l'extérieur a su enclencher un processus de réformes. D'autre part, le cas des médecins et des frais accessoires interdits est également révélateur de cette limitation. Au fil des ans, les médecins ont progressivement gonflé ces montants jusqu'à demander aux clients des sommes injustifiables. Le Collège des médecins, au lieu de faire appliquer la loi et son propre code de déontologie, a préféré négocier à la pièce des dédommagements avec les patients formulant des plaintes. Encore ici, la capacité d'autodiscipline mérite d'être remise en question », observe Guillaume Hébert, chercheur à l'IRIS et également auteur de la note.
En terminant, l'IRIS formule quelques pistes de solution pour améliorer le fonctionnement des ordres et peut-être ainsi redonner au public la confiance qu'ils souhaitent inspirer. « Les ordres devraient tout d'abord revoir l'intégration du public dans leur administration afin que celui-ci puisse y tenir un rôle plus actif. De plus, il serait pertinent de redonner du pouvoir à l'Office des professions et revoir le processus de gestion des plaintes afin que les professionnels cessent d'enquêter sur les professionnels », recommande Guillaume Hébert.
Les ordres professionnels peuvent-ils garantir la protection du public? est disponible gratuitement sur www.iris-recherche.qc.ca.
SOURCE Institut de recherche et d'informations socio-économiques (IRIS)
Gabrielle Brais-Harvey, responsable aux communications, 438 862-6662, [email protected]
Partager cet article