Pour de meilleurs traitements contre le cancer - Une découverte d'une équipe de l'INRS permettrait l'utilisation plus efficace de la radiothérapie en oncologie. English
MONTRÉAL, le 14 déc. 2023 /CNW/ - La technologie des lasers ultrarapides n'a pas fini de nous surprendre. Si les recherches réalisées dans ce domaine paraissent plutôt abstraites à première vue, elles se manifestent très souvent par des applications concrètes. On le constate notamment dans le domaine de la santé pour le traitement de certains cancers.
C'est ce qu'a constaté l'équipe de recherche du Laboratoire de sources femtosecondes (aussi connu sous le nom d'Advanced Laser Light Source, ou ALLS), de l'Institut national de recherche scientifique (INRS) à la lumière de récents travaux dirigés par François Légaré, professeur et directeur du Centre Énergie Matériaux Télécommunications (Centre EMT). Ces travaux sont le fruit d'une collaboration avec des physiciens médicaux du Centre universitaire de santé McGill (CUSM). Publiée dans la revue Laser & Photonics Reviews, l'étude présente des résultats étonnants qui remettent en cause certaines connaissances sur les impulsions laser de haute puissance. Des connaissances qui prévalaient jusqu'alors dans la communauté scientifique.
« Pour la première fois, nous avons réussi à montrer que dans certaines conditions, un faisceau laser fortement focalisé dans l'air ambiant permet d'accélérer des électrons à des énergies autour du « MeV » (mégaélectronvolts), soit du même ordre de grandeur que certains irradiateurs utilisés en radiothérapie pour le cancer », dit François Légaré, directeur du Centre EMT de l'INRS.
Il était bien établi qu'en focalisant une impulsion laser d'intensité suffisante dans l'air ambiant, il était possible de générer un plasma au point focal. Ce même plasma sert de source d'électrons pouvant être accélérés à des énergies de quelques « keV » (kiloélectronvolts), tout au plus. Jusqu'à tout récemment, il n'était pas possible d'atteindre des énergies plus hautes dans l'air ambiant, dû à une limitation physique.
L'équipe de recherche a pu démontrer que les électrons accélérés dans l'air ambiant peuvent atteindre des énergies de l'ordre du « MeV » (mégaélectronvolts), soit environ 1000 fois plus que cette limite auparavant infranchissable.
La percée réalisée par l'équipe du Centre EMT de l'INRS ouvre la porte à des avancées majeures en physique médicale. Un exemple probant est la radiothérapie FLASH, une nouvelle approche dans le traitement de tumeurs résistantes à la radiothérapie conventionnelle. Cette technique consiste à délivrer de fortes doses de radiation en un temps très court (quelques microsecondes plutôt que quelques minutes). Elle a pour effet de mieux protéger les tissus sains qui entourent la tumeur. Cet effet FLASH est encore incompris en recherche et semble lié à une désoxygénation rapide des tissus sains, ce qui réduit leur radiosensibilité.
« Aucune étude n'a encore permis d'expliquer la nature de l'effet FLASH. Or, les sources d'électrons utilisées en radiothérapie FLASH ont des caractéristiques similaires à celle que nous avons produite en focalisant fortement dans l'air avec notre laser. Une fois les effets de radiation mieux contrôlés, la poursuite de nos recherches nous permettra d'investiguer ce qui cause ce phénomène et, ultimement, d'offrir de meilleurs traitements de radiothérapie aux patients atteints de cancer », explique Simon Vallières, chercheur postdoctoral et premier auteur de l'étude.
Cette découverte entraîne des implications concrètes. D'abord, la nécessité de redoubler de prudence lors de la manipulation de faisceaux laser focalisés fortement dans l'air ambiant.
« Les énergies d'électrons observées (MeV) leur permettent de voyager sur une distance de plus de trois mètres dans l'air, ou plusieurs millimètres sous la peau. Cela pose un problème particulier pour la sécurité des personnes utilisatrices de la source laser », livre Simon Vallières.
De plus, en effectuant des mesures près de la source, l'équipe a constaté un fort débit de dose d'électrons, soit de trois à quatre fois supérieur à ceux qui servent en radiothérapie conventionnelle.
La mise au jour de ces dangers est l'occasion de mettre en place des pratiques plus sécuritaires dans les laboratoires, indique Simon Vallières. Le jeune chercheur rappelle que la manipulation de faisceaux laser fortement focalisés dans l'air ambiant requiert une attention particulière et qu'il faut éviter de s'exposer à de fortes doses de radiation néfastes pour la santé.
Unique au Canada, le Laboratoire de sources femtosecondes, aussi connu sous le nom d'Advanced Laser Light Source (ALLS), est une infrastructure de recherche de calibre international basée à l'INRS qui se concentre sur le développement de nouveaux types de sources basées sur le laser avec des applications révolutionnaires. Membre du réseau américain LaserNetUS, le ALLS a reçu du financement du ministère de l'Économie, de l'Innovation et de l'Énergie (MEIE), et de la Fondation canadienne pour l'innovation (FCI) dans le cadre du programme d'initiative scientifique majeure.
S. Vallières, J. Powell, T. Connell, M. Evans, M. Lytova, F. Fillion-Gourdeau, S. Fourmaux, S. Payeur, P. Lassonde, S. MacLean, F. Légaré, High Dose-Rate MeV Electron Beam from a Tightly-Focused Femtosecond IR Laser in Ambient Air. Laser Photonics Rev. 2023, 2300078. https://doi.org/10.1002/lpor.202300078.
Ces travaux de recherche ont été financés par le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG), le Fonds de recherche du Québec - Nature et technologie (FRQNT) et l'Alliance de recherche numérique du Canada.
L'Institut national de la recherche scientifique est un établissement universitaire dédié exclusivement à la recherche et à la formation aux cycles supérieurs. Depuis sa création en 1969, il contribue activement au développement économique, social et culturel du Québec. L'INRS est 1er au Québec et au Canada en intensité de recherche. Il est composé de quatre centres de recherche et de formation interdisciplinaires, situés à Québec, à Montréal, à Laval et à Varennes, qui concentrent leurs activités dans des secteurs stratégiques : Eau Terre Environnement, Énergie Matériaux Télécommunications, Urbanisation Culture Société et Armand-Frappier Santé Biotechnologie. Sa communauté compte plus de 1 500 membres étudiants, stagiaires postdoctoraux, membres du corps professoral et membres du personnel.
SOURCE Institut National de la recherche scientifique (INRS)
Source : Julie Robert, Service des communications et affaires publiques, Institut national de la recherche scientifique, [email protected]
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