Rapport Noreau sur l'indépendance des tribunaux administratifs - Sortir la politique des tribunaux administratifs
Le système de nominations partisanes dans certains tribunaux administratifs mine la confiance des citoyens.
MONTRÉAL, le 17 févr. 2014 /CNW Telbec/ - La Conférence des juges administratifs du Québec (CJAQ) salue la publication du rapport Noreau sur l'indépendance des tribunaux administratifs et réclame de façon urgente une réforme pour mettre tous les tribunaux administratifs à l'abri de l'ingérence politique et du favoritisme.
« Comme le souligne le rapport Noreau, le système de nominations partisanes dans 9 tribunaux administratifs sur 15 est inconciliable avec l'indépendance dont devraient disposer les juges administratifs et n'est pas de nature à donner confiance aux citoyens. Il est temps pour le gouvernement de mettre fin à ce système d'une autre époque », a déclaré la présidente de la CJAQ, Louise Rozon.
Réforme urgente
Le rapport Noreau, comme d'autres rapports avant lui, souligne l'absence complète de règles de nomination et de renouvellement des mandats des juges administratifs, aussi appelés « décideurs administratifs indépendants », dans la majorité des tribunaux administratifs au Québec. Les auteurs de l'étude notent que le pouvoir discrétionnaire de nomination et de renouvellement par le politique « est régulièrement utilisé pour procurer une sinécure à certaines personnes, favoriser le déplacement d'administrateurs qui ne sont plus les bienvenus dans leurs anciennes fonctions, ou tout simplement attribuer un emploi à certains individus dans l'éventualité de l'imminence d'un changement de gouvernement. »
Le système actuel de nomination, qui se prête aux influences partisanes, « est susceptible de conduire au remplacement de décideurs unanimement reconnus pour leur compétence par d'autres moins bien préparés ou moins compétents », précise le rapport Noreau.
La CJAQ n'est pas surprise par ce constat; c'est une situation qu'elle déplore et dénonce depuis longtemps. C'est pourquoi elle accueille favorablement la principale recommandation du rapport, soit l'adoption d'une loi-cadre établissant les règles de sélection et de nomination des décideurs administratifs indépendants et de renouvellement de leur mandat. Une telle réforme ferait en sorte que les juges administratifs ne dépendraient plus du Secrétariat aux emplois supérieurs (SES), mais bien d'un nouveau Secrétariat redevable à l'assemblée nationale et dont la responsabilité serait de mettre en place un processus de sélection des candidats appelés à être nommés à la fonction de juge administratif et des règles de renouvellement de leur mandat à l'abri des influences politiques.
Tribunaux administratifs
Les tribunaux administratifs tranchent des litiges opposant la plupart du temps des citoyens, entreprises et autres organisations à l'administration gouvernementale. Ces tribunaux constituent le premier contact, et souvent le seul, qu'aura le citoyen avec le système de justice. La Régie de l'énergie, la Commission de protection du territoire agricole ou encore la Régie des alcools, des courses et des jeux, pour ne nommer que ceux-là, rendent des décisions qui affectent la vie des citoyens ou de leurs entreprises et qui ont un impact sur le gouvernement et sur le développement économique du Québec.
Les tribunaux administratifs sont indissociables du système de justice et à ce titre, le citoyen doit avoir confiance que les juges administratifs sont indépendants de toutes les parties dans un litige.
Or, les dizaines d'entrevues réalisées avec des juges administratifs dans le cadre du rapport Noreau démontrent clairement que les règles actuelles au sein de certains tribunaux administratifs ne garantissent pas que les décideurs puissent rendre des décisions en toute indépendance et sérénité, particulièrement dans la période qui précède un éventuel renouvellement de leur mandat. Un « décideur administratif » indépendant ne doit plus avoir à décider d'un litige ou d'une demande en ayant à l'esprit que le sort de sa carrière personnelle en dépend.
Les juges administratifs du Tribunal administratif du Québec (TAQ), de la Régie du logement (RDL), de la Commission des lésions professionnelles (CLP) et de la Commission des relations du travail (CRT) bénéficient de garanties d'indépendance minimales et sont passés par un processus formel de sélection. La CJAQ souhaite étendre ces règles aux autres tribunaux administratifs.
« Au moment où nos institutions démocratiques souffrent d'un déficit de confiance et que le gouvernement appelle les organisations syndicales et autres institutions à revoir leurs règles de gouvernance, le rapport du prof. Pierre Noreau et de son équipe tombe à point nommé.
En cette période pré-électorale, la CJAQ interpelle tous les partis politiques afin qu'ils se prononcent clairement en faveur d'une véritable réforme de la justice administrative et ce, dans les plus brefs délais », conclut Louise Rozon.
À propos de la CJAQ
La CJAQ regroupe près de 300 juges administratifs exerçant leur fonction au sein des divers tribunaux administratifs ou spécialisés du Québec. La CJAQ a pour mandat de sauvegarder et de promouvoir l'indépendance de la justice administrative, dans le but d'offrir à tous les justiciables une justice de qualité tout en faisant la promotion de l'intérêt collectif de ses membres.
SOURCE : Conférence des juges administratifs du Québec (CJAQ)
Philippe Bélisle (514) 244-6479
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