Réforme de la Charte de la langue française : L'espoir de renforcer le français tout en tenant compte de la réalité des Premières Nations au Québec
WENDAKE, QC, le 14 mai 2021 /CNW Telbec/ - Le Conseil en Éducation des Premières Nations (CEPN) et son chef porteur du dossier de l'éducation, M. John Martin, accueillent avec réserves le Projet de loi n° 96 : Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français (« PL 96 ») modifiant notamment la Charte de la langue française (« Charte ») déposé ce jour par le ministre responsable de la Langue française, M. Simon Jolin-Barrette.
Les Premières Nations aspirent à la protection, la valorisation et la promotion de leurs riches langues ancestrales et reconnaissent la volonté du gouvernement du Québec de faire de même avec la langue française. Cependant, le CEPN et le Chef Martin ne peuvent passer sous silence les impacts négatifs qui se perpétuent avec la nouvelle mouture de la Charte proposée par le gouvernement du Québec sur les Premières Nations qui, elles aussi, repoussent depuis des décennies les mesures assimilatrices sur leurs langues ancestrales et leurs cultures respectives.
Le ministre responsable de la Langue française aurait pu faire le choix de l'audace en tenant compte de la réalité des Premières nations et inclure dans le PL 96 des dispositions qui favoriseraient leur langue et leur culture et qui n'ont pas pour effet de faire reculer la langue française au Québec :
- D'abord, le CEPN prie le gouvernement de moderniser le préambule de la Charte en actualisant le vocabulaire législatif employé pour désigner les Premières nations et les Inuits au Québec et de respecter leur droit d'enseigner et de valoriser leurs langues et leurs cultures ancestrales;
- Ensuite, le CEPN s'attend à ce que la nouvelle mouture de la Charte élargisse la dérogation aux individus lorsque ceux-ci bénéficient d'une éducation hors réserve indienne, soit le chapitre VIII de la Charte;
- Enfin, le CEPN invite le gouvernement à nous consulter pour les allégements et les exemptions pour favoriser le droit des Premières Nations d'enseigner et de valoriser leurs langue et culture ancestrales.
Dans sa version actuelle, la Charte pose des barrières linguistiques systémiques qui briment la réussite scolaire des élèves des Premières Nations. Par exemple, elle rend extrêmement difficile l'accès à des professionnels, notamment des orthophonistes et des orthopédagogues dans la langue des élèves des Premières Nations dont la première langue est leur langue ancestrale (la deuxième langue étant le français ou l'anglais).
D'ailleurs, le Plan d'action sur le racisme et la discrimination de l'APNQL propose l'« intervention 58 » visant à « éliminer les obstacles systémiques à la réussite éducative dont l'épreuve unique en français qui émane de la Charte de langue française », et ce, dans le but de réduire les écarts entre les Autochtones et les Allochtones en matière de réussite scolaire.
Le CEPN rappelle que les tribunaux canadiens ont réitéré à maintes reprises que la langue n'est pas un simple moyen de communication, mais plutôt une partie intégrante de l'identité et de la culture. Ainsi, la langue d'enseignement est indissociable et intrinsèquement liée à la culture qu'elle véhicule. Cette réforme constituait une occasion pour le Québec de poser les gestes nécessaires en respect des réalités des Premières Nations et en soutien à la réussite scolaire des élèves des Premières Nations.
Le CEPN a espoir que le Premier ministre, le ministre responsable de la Langue française, le ministre de l'Éducation, la ministre de l'Enseignement supérieur et le ministre responsable des Affaires autochtones, écoutent, entendent et deviennent des partenaires clés à la réussite éducative des élèves des Premières Nations. Le CEPN souligne la volonté du gouvernement du Québec énoncée par le ministre en conférence de presse de « protéger les droits des nations autochtones ».
Le CEPN participera aux consultations particulières du PL 96 à l'Assemblée nationale afin de s'assurer que la nouvelle Charte tienne compte de la réalité des Premières nations et effectuera des représentations en ce sens auprès du gouvernement du Québec.
Citations
« Les Premières Nations s'expriment dans leur langue ancestrale et vivent selon une culture bien à elles. Nos langues sont notre patrimoine millénaire non cédé et constituent une richesse pour la mosaïque culturelle du Québec. Près de la moitié de nos communautés utilisent l'anglais comme langue d'usage; leur langue première étant une langue ancestrale. L'accès aux ressources professionnelles dans cette langue d'usage est déjà problématique et a un impact direct sur nos jeunes, leur apprentissage et leur réussite. Nous devons poursuivre le dialogue et nous donner les moyens nécessaires pour que chaque enfant puisse atteindre son plein potentiel dans le respect de son identité, de sa langue, de sa culture et de ses traditions. »
M. John Martin, Chef porteur du dossier de l'éducation de l'Assemblée des Premières Nations Québec-Labrador
« Les amendements proposés répondent à l'objectif de renforcer le français, mais ne répondent en aucun point aux propositions et demandes des Premières Nations d'éliminer les barrières à la réussite éducative. L'ouverture de la loi est une occasion à saisir pour mettre fin aux préjudices que la Charte nous cause. Nous solliciterons à nouveau le ministre pour discuter des propositions que nous avons déposées et mettre de l'avant des solutions qui permettent d'atteindre les objectifs poursuivis par nos Nations respectives. C'est notre devoir et notre responsabilité envers nos jeunes et les générations à venir. »
M. Denis Gros-Louis, directeur général du Conseil en Éducation des Premières Nations
SOURCE Conseil en éducation des Premières Nations
Personne-ressource : Thanissa Lainé, Agente de communications, [email protected]
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