Selon le Conseil du patronat, les faits vont à l'encontre d'élargir la notion
de travailleurs de remplacement pour y inclure les travailleurs à distance
MONTRÉAL, le 22 sept. /CNW Telbec/ - Le Conseil du patronat s'inscrit en faux avec la proposition qui a fait l'objet du dépôt d'une pétition, hier, à l'Assemblée nationale, demandant de réformer le Code du travail pour élargir la notion de travailleurs de remplacement afin d'y inclure les travailleurs à distance. Il estime, au contraire, qu'il faudrait revoir la pertinence d'interdire le recours à des travailleurs de remplacement.
La disposition visant à interdire le recours à des travailleurs de remplacement lors d'une grève ou d'un lock-out, introduite dans les années 70 pour prévenir la violence sur les piquets de grève, n'a eu aucun effet bénéfique sur l'économie du Québec, notamment sur le nombre ou la durée des arrêts de travail. C'est ce que démontre abondamment une étude de Ressources humaines et Développement social Canada publiée en 20061.
Selon cette étude, la durée moyenne des arrêts de travail au Québec, qui était de 37 jours de 1975 à 1977, avant l'introduction de la disposition, est passée à 47 jours durant la période de 2003 à 2005, comparativement à 38 en Ontario. Il en va de même pour le nombre de jours non travaillés, alors que le Québec a perdu, sur une base comparable et pour cette même période, une fois et demi plus de jours de travail (132 par 1 000 travailleurs) que l'Ontario (81). Par ailleurs, le Québec a connu durant l'année 2005 plus d'arrêts de travail (0,25 par 10 000 travailleurs) que l'Ontario (0,12) et que les entreprises sous autorité fédérale (0,05). On note finalement que les conventions collectives négociées au Québec sont pratiquement identiques à celles que l'on retrouve dans d'autres provinces qui n'ont aucune disposition relative aux travailleurs de remplacement.
Plusieurs études universitaires confirment en outre que les dispositions empêchant le recours à des travailleurs de remplacement ont pour effet d'augmenter la durée et la probabilité des arrêts de travail2 ou, encore, qu'elles ont des effets économiques néfastes et résultent en une réduction de l'emploi et de l'investissement3.
« Comment se fait-il que lorsque l'on parle de lois et de réglementations, on demande toujours, au Québec, de renforcer des restrictions imposées aux employeurs - comme le font les syndicats avec la demande d'élargir la notion de travailleurs de remplacement - alors que ces contraintes sont absentes chez nos voisins, y compris dans les institutions fédérales? Il est évident que les principes d'équité et de justice dont on se réclame fonctionnent à sens unique et ne profitent qu'à une seule des parties », a déclaré le président du Conseil du patronat, M. Yves-Thomas Dorval.
Alors que les dispositions actuelles relatives à la notion de travailleurs de remplacement créent déjà un déséquilibre très favorable à la partie syndicale dans les relations du travail au Québec, la menace qu'elles visaient à contrer au départ n'est plus pertinente dans le climat social actuel, et touche encore moins le cas des travailleurs à distance.
« Quant à revoir le Code du travail, on devrait plutôt reconsidérer certaines dispositions qui nuisent manifestement à l'économie du Québec. C'est le cas, par exemple, de l'absence d'obligation de tenir un vote secret pour l'obtention d'une accréditation syndicale alors que cette obligation existe dans toutes les provinces canadiennes comparables ou, encore, de l'obligation d'être membre du syndicat pour participer à un vote de grève au sein d'une entreprise. Cette dernière disposition peut conduire à des aberrations, comme le fait qu'une minorité décide pour la majorité des travailleurs touchés », de conclure M. Dorval.
Regroupant plusieurs des plus grandes entreprises du Québec, le Conseil du patronat du Québec réunit également la vaste majorité des associations patronales sectorielles, en faisant ainsi la seule confédération patronale du Québec.
1 Ressources humaines et développement social Canada, Direction de l'information sur les milieux de travail, Statistique Canada. Enquête sur la population active, CANSIM.
2 Landeo, Nikitin (2005) : La disponibilité de travailleurs de remplacement réduit la probabilité d'une grève (étude dans le secteur de l'éducation).
Singh, Sinni, Jain (2005) : L'effet que peuvent avoir les travailleurs de remplacement dépend entre autres du type d'industrie dans lequel l'employeur mène ses opérations, et peut causer des relations patronales-syndicales antagonistes.
Cramton, Gunderson, Tracy (1999) : La durée moyenne d'une grève est plus longue de 32 jours dans les provinces qui ont des dispositions anti-briseurs de grève et la probabilité de grève est de 12 % plus élevée.
Budd (1996) : La durée moyenne d'une grève est plus longue de 27 jours et la probabilité de grève est de 5 % plus élevée.
Gunderson, Melino (1990) : La durée moyenne d'une grève est plus longue de 7 jours.
Gunderson, Kevin, Reid (1989) : Les dispositions anti-briseurs de grève au Québec ont mené à une hausse du nombre de grèves.
3 Budd, Wang (2004) : Le taux d'investissement dans une province qui a des dispositions anti-briseurs de grève est de 25 % inférieur par rapport aux autres provinces où de telles dispositions n'existent pas.
Budd (2000) : Les restrictions à l'utilisation des travailleurs de remplacement sont associées à un taux d'emploi plus faible de 0,5 %.
Renseignements:
et entrevues :
Louis-Paul Lazure
Vice-président - Communications
Tél. : 514 288 5161, poste 226
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