Sondage Association des économistes québécois-Léger marketing: Appui au contrôle des dépenses mais réserves sur certaines mesures
MONTRÉAL, le 29 nov. 2012 /CNW Telbec/ - Le sondage a été réalisé par Internet, du 6 au 22 novembre 2012, auprès des membres de l'Association des économistes québécois. Dans l'ensemble, 170 des 652 membres de l'Association rejoints par courriel ont répondu au sondage, ce qui confère aux résultats de l'étude une précision de ± 6,5%, et ce, 19 fois sur 20.
Même si la majorité des réponses au sondage a été formulée avant le dépôt du budget Marceau, l'opinion des économistes cautionne en partie l'approche du ministre des Finances mais s'en détache sur certains points importants.
UN APPUI PARTIEL AU BUDGET DU 20 NOVEMBRE
Contrôle des dépenses publiques
Une nette majorité, soit sept répondants sur dix (69%) croient que la stratégie à adopter au Québec est d'éviter une détérioration plus prononcée du déficit budgétaire par l'élaboration de « régimes minceurs » et la sensibilisation du public aux impacts de ceux-ci afin de pouvoir mettre en place certaines de ces mesures et améliorer rapidement les finances publiques. Selon Jean-Michel Cousineau, président du Comité des politiques publiques de l'Association des économistes québécois, «les économistes souhaitent vivement que le gouvernement procède à un contrôle rigoureux et orchestré de ses dépenses». Un peu plus du quart (27%) des économistes consultés estiment toutefois qu'il faut attendre une amélioration du rythme de croissance économique pour mettre en place des mesures d'austérité, alors que 4% pensent qu'il ne faut procéder qu'à des mesures peu contraignantes et éviter de remettre en cause les choix de société, puisque les systèmes s'adaptent d'eux-mêmes.
Perspective de croissance économique
De même, les économistes partagent sensiblement les vues du ministre des Finances quant aux perspectives de croissance de l'économie québécoise au cours des prochains mois. Ainsi, la majorité (68%) des répondants estime que la situation économique du Québec va se maintenir au cours des six prochains mois et moins du quart (23%) croient que la situation économique va se détériorer au cours des mois à venir. Moins d'un économiste sondé sur dix (8%) estime que la situation économique va s'améliorer au cours des six prochains mois.
Par ailleurs, la quasi-totalité des économistes interrogés (98%) prévoient que le taux moyen de croissance du PIB réel des États-Unis sera sous les 3% au cours des trois prochaines années, et la moitié (49%) prévoit que ce taux sera inférieur à 2%. Si ces anticipations sont justes, l'économie québécoise ne pourra pas profiter d'une stimulation importante de la part de son partenaire commercial américain et son taux de croissance sera plutôt faible. La croissance de 1,5% du PIB québécois en 2013 prévue au budget Marceau correspond à ces pronostics.
DES RÉSERVES SUR CERTAINES MESURES
La Banque de développement économique du Québec
Par contre, un des éléments majeurs du budget, soit la création de la Banque de développement économique du Québec, n'aurait qu'un impact nul ou négligeable sur le développement des entreprises québécoises selon près de la moitié des économistes (48%). Un économiste sur cinq (20%) pense toutefois que la création de cette institution aurait un effet important (17%) ou très important (3%) sur le développement des entreprises québécoises, alors que 19% ne se sont pas prononcés.
L'accord commercial Canada-Europe
La majorité des économistes québécois ont également des réserves quant aux impacts d'un éventuel accord commercial entre le Canada et l'Union européenne malgré que le ministre des Finances ait fait de cet accord un des axes de sa stratégie économique. Certes, quatre économistes sur dix (39%) croient que les accords économiques et commerciaux à venir avec l'Union européenne et avec certains pays du Pacifique seront bénéfiques pour le Québec. Cependant, 29% d'entre eux croient que ces accords comportent des risques pour le maintien des protections culturelles, sociales et environnementales et qu'à cet égard des mesures de sauvegarde doivent être prévues. Par ailleurs, 14% estiment que ces risques sont importants et que la population doit en être informée avant que ces accords soient conclus. Finalement, 9% des économistes sondés croient que ces accords n'auront que peu d'impact sur les flux de commerce et d'investissements pour le Québec et 8% ne se sont pas prononcés.
Les marchés extérieurs et l'exportation
Le budget annonce l'intention du gouvernement d'élaborer une stratégie pour aider les entreprises québécoises à mieux tirer parti du commerce extérieur. À cet égard, trois mesures apparaissent particulièrement importantes pour les économistes québécois. L'intensification des programmes de soutien à l'innovation et à la productivité est perçue par 36% des économistes comme la principale mesure à prendre, suivie de l'exigence de transformer une plus large proportion des ressources extraites au Québec (25%) et de l'aide au développement des exportations en Asie du Pacifique, en Amérique latine et en Europe (23%). Seulement 7% croient qu'il faut davantage amener les entreprises à développer le potentiel du marché canadien et 4% croient qu'il faut miser davantage sur l'exportation de produits culturels et des services.
La meilleure approche pour une éventuelle réforme de la fiscalité québécoise
Bien que les économistes n'aient pas été consultés sur l'opportunité d'une plus grande progressivité du régime fiscal, comme le prévoit le budget Marceau, ils ont exprimé leur opinion sur les paramètres devant être retenus, sous l'hypothèse d'une éventuelle réforme globale de la fiscalité. À cet égard, ils ont exprimé une nette préférence (52%) pour une réforme s'appuyant sur des critères d'efficacité fiscale et de rationalisation des programmes fiscaux (dont les crédits d'impôt) au moyen notamment d'évaluation des résultats et de la performance des mesures fiscales avant de procéder à des changements fiscaux significatifs.
Deux autres approches étaient proposées, dont l'une serait un régime fiscal s'appuyant principalement sur des critères de compétitivité fiscale avec les autres juridictions environnantes de manière notamment à maintenir la compétitivité des salaires et la croissance, tout en assurant les revenus fiscaux nécessaires. Cette approche recueille 31% d'appui parmi les économistes, alors que 17% penchent plutôt pour un régime fiscal s'appuyant principalement sur des critères d'équité sociale afin de s'assurer que chacun paie sa juste part.
Endettement des ménages : ne rien brusquer
Dans le contexte de la hausse du taux d'endettement des ménages canadiens, les deux tiers des économistes interrogés (65%) croient que la Banque du Canada et les gouvernements devraient s'en tenir à des appels à la prudence de la part des consommateurs et des institutions financières et au resserrement des règles relatives aux prêts hypothécaires.
Une faible proportion (12%) estime toutefois que la Banque du Canada devrait hausser son taux directeur, alors que 11% croient au contraire que la situation n'a pas atteint un seuil critique et qu'aucune action n'est requise des autorités publiques. Notons aussi que 5% estiment que la politique monétaire devrait être plus expansionniste afin d'assurer une croissance économique soutenue.
En somme, selon Jean-Michel Cousineau, « tout nous porte à croire que les économistes priorisent le développement de l'innovation, des nouveaux marchés, de la compétitivité et des capacités de production plutôt que la consommation comme mode privilégié d'adaptation et de relance de l'économie ».
L'ASSOCIATION DES ÉCONOMISTES QUÉBÉCOIS
L'Association des économistes québécois est une association professionnelle à but non lucratif fondée en 1975 dans le but de répondre aux besoins et aux intérêts des économistes œuvrant dans divers secteurs d'activités au Québec : entreprise privée, secteur public, milieux syndicaux, associations, monde universitaire, etc. Elle est également ouverte à toute personne intéressée par les questions économiques quelle que soit sa formation.
L'Association a pour finalités le développement et la diffusion du savoir économique, l'éclairage des débats publics et la valorisation du rôle de l'économiste. Elle privilégie la formation et l'éducation économique pour tous les citoyens.
En accord avec son slogan « Pour des choix éclairés», l'Association est reconnue comme un interlocuteur crédible et impartial dans les débats économiques. L'Association accueille chez ses membres l'expression des différences de points de vue et d'opinions.
Résultats détaillés du sondage
L'Association des économistes québécois comprend 689 membres, dont 652 ont été contactés par courrier électronique. Parmi ceux-ci, 170 (26% des membres) ont répondu au sondage.
Tableau 1 - Évolution de la situation économique du Québec à court terme
Question : Au cours des six prochains mois, est-ce que la situation économique du Québec devrait, à votre avis:
NOV. 2012 (n=170) |
JUILLET 2012 (n=192) |
MARS 2012 (n=175) |
OCT. 2011 (n=183) |
JUIN 2011 (n=173) |
MARS 2011 (n=164) |
NOV. 2010 (n=198) |
JUIL. 2010 (n=233) |
MARS 2010 (n=205) |
OCT. 2009 (n=213) |
MAI 2009 (n=228) |
FÉV. 2009 (n=156) |
|
Se détériorer | 23% | 23% | 23% | 35% | 8% | 8% | 12% | 7% | 3% | 7% | 27% | 82% |
Se maintenir | 68% | 65% | 63% | 58% | 65% | 62% | 70% | 60% | 51% | 50% | 47% | 17% |
S'améliorer | 8% | 11% | 11% | 7% | 26% | 30% | 17% | 32% | 45% | 42% | 24% | 1% |
Sans opinion | 1% | 2% | 3% | 1% | 1% | 0% | 1% | 1% | 1% | 1% | 2% | 0% |
Tableau 2 - Attentes à l'égard du taux moyen de croissance du PIB réel des États-Unis
Question : Nous savons tous que l'économie américaine joue un rôle très important dans l'évolution de l'économie canadienne. Depuis la crise financière de 2008 et la récession qui a suivi, plusieurs analystes se demandent si cette économie reprendra son rythme de croissance d'avant la crise et retrouvera un très bas taux de chômage qu'elle avait en moyenne dans les décennies précédentes. Ces doutes sont en partie liés à un système politique qui rend très difficile la gestion gouvernementale à Washington et aux importants ajustements qui seront nécessaires pour réduire l'énorme déficit du gouvernement fédéral. Pour les trois prochaines années, vous attendez-vous à ce que le taux moyen de croissance du PIB réel des États-Unis soit ...
Total (n=170) |
|
..faible (sous les 2%) | 49% |
..modéré (de 2%-3%) | 49% |
..fort (plus de 3%) | 2% |
Tableau 3 - L'impact pour le Québec de l'accord économique et commercial entre L'Union européenne et le Canada
Question : Le Canada doit conclure bientôt un accord économique et commercial avec l'Union européenne et il s'est joint aux discussions en cours en vue d'un accord de partenariat économique transpacifique. Il espère ainsi favoriser la croissance économique en suscitant des investissements et en ouvrant de nouveaux débouchés pour les exportateurs. Cependant, des voix ont mis en garde contre certains effets possibles de telles ententes : par exemple, le Québec pourrait devoir assouplir l'accès à ses marchés publics (ministères, sociétés d'État, municipalités), céder une partie du contrôle sur la gestion de l'eau et des ressources, renoncer à la gestion de l'offre dans l'agroalimentaire, harmoniser ses règlementations avec elles d'autres juridictions, etc. Croyez-vous que… :
Total (n=170) |
|
…les accords envisagés seront bénéfiques pour le Québec? | 39% |
…les accords envisagés comportent des risques pour le maintien des protections culturelles, sociales et environnementales et à cet égard des mesures de sauvegarde doivent être prévues? | 29% |
…les accords envisagés comportent des risques importants et ils ne devraient pas être signés sans que la population ait été informée de leurs impacts éventuels; | 14% |
…les accords envisagés n'auront pas beaucoup d'influence sur les flux de commerce et d'investissements pour le Québec? | 9% |
Ne sait pas | 8% |
Tableau 4 - La mesure la plus importante pour redresser le déficit commercial dans les échanges internationaux de biens et services du Québec
Question : Au cours des 10 dernières années, le solde des échanges internationaux de biens et services du Québec est passé d'un surplus de près de 6 milliards $ à un déficit de plus de 23 milliards $. De plus, le nombre d'établissements québécois exportateurs de biens à l'international est en déclin depuis 2006 et hormis les produits du secteur aéronautique, les exportations internationales du Québec consistent largement en produits peu ou pas transformés. Dans le discours inaugural du 31 octobre dernier, la première ministre Pauline Marois a indiqué l'intention de son gouvernement de redresser la situation. Quelle serait la mesure la plus importante à prendre pour atteindre cet objectif selon vous :
Total (n=170) |
|
Intensifier les programmes de soutien à l'innovation et à la productivité, notamment dans le domaine manufacturier | 36% |
Exiger la transformation au Québec d'une plus large proportion des ressources extraites | 25% |
Inciter et aider les entreprises, incluant les PME, à développer leurs ventes en Asie du Pacifique, en Amérique Latine et en Europe, dans l'ordre | 23% |
Amener les entreprises à exploiter davantage le potentiel du marché canadien | 7% |
Miser davantage sur l'exportation de produits culturels et de services | 4% |
Aucune des mesures précédentes | 8% |
Tableau 5 - Le taux d'endettement des ménages canadiens
Question : Le taux d'endettement des ménages canadiens par rapport au revenu disponible est en hausse depuis plusieurs trimestres et atteint maintenant 163%. Aux États-Unis ce ratio a atteint le même niveau en 2009 et il se situe maintenant à 140%. Cependant, à la différence des Canadiens, les Américains doivent affecter une part beaucoup plus importante de leur revenu disponible aux soins de santé et à l'éducation de sorte que leur taux d'endettement a un impact réel plus grand. Par ailleurs, l'actif des ménages canadiens a également cru de sorte que leurs dettes se maintiennent autour de 20% de leurs actifs totaux depuis le début de 2011. Enfin, tout ralentissement marqué des achats des ménages pourrait freiner davantage une croissance économique qui est déjà décevante. Dans ce contexte, croyez-vous :
Total(n=170) | |
...que la Banque du Canada et les gouvernements devraient s'en tenir à des appels à la prudence de la part des consommateurs et des institutions financières et au resserrement des règles relatives aux prêts hypothécaires; | 65% |
...que la Banque du Canada devrait hausser son taux directeur; | 12% |
...que la situation n'a pas atteint un seuil critique et qu'aucune action particulière n'est requise de la part des autorités publiques; | 11% |
...que la politique monétaire devrait être encore plus expansionniste afin d'assurer une croissance économique soutenue; | 5% |
...qu'il vous est impossible de vous prononcer sur cette question. | 7% |
Tableaux 6 - Le déficit budgétaire du Québec
Question : Depuis plusieurs années, le Québec est confronté à de sérieux problèmes de déséquilibre budgétaire. Étant donné ce contexte, quelle stratégie devrait être adoptée afin d'éviter une détérioration plus prononcée de la situation.
Total(n=170) | |
Commencer à élaborer des "régimes minceur" et sensibiliser les citoyens aux impacts de ceux-ci afin de pouvoir mettre en place certaines de ces mesures et améliorer rapidement les finances publiques. | 69% |
Attendre une amélioration du rythme de croissance économique pour mettre en place des mesures d'austérité. | 27% |
Ne procéder qu'à des mesures peu contraignantes et éviter de remettre en cause les choix de société puisque, de toute manière, selon certains les systèmes s'adaptent d'eux-mêmes. | 4% |
Tableau 7 - L'effet de la création de la Banque de développement économique du Québec
Question : Au cours des années, la filière d'aide financière aux entreprises a connu plusieurs changements organisationnels. Le gouvernement procédera au dépôt d'un projet de loi créant la Banque de développement économique du Québec. Il s'agit notamment de regrouper Investissement-Québec avec les centres locaux de développement afin de simplifier l'octroi de l'aide financière aux entreprises dans chacune des régions, y compris à celles œuvrant dans le domaine de l'économie sociale. À votre avis, quel pourrait être l'effet de cette nouvelle structure sur le développement des entreprises québécoises?
Total (n=170) |
|
Nul | 13% |
Négligeable | 48% |
Important | 17% |
Très important | 3% |
Ne sait pas | 19% |
Tableau 8 - L'approche fiscale pour guider une éventuelle réforme de la fiscalité québécoise
Question : Les mesures et les modalités fiscales s'élargissent constamment, et ce, à tous les paliers : municipal, provincial et fédéral. De même, la mondialisation, l'évolution démographique et sociologique et bien d'autres facteurs influencent leur configuration. Bien que cela ne semble pas être le cas à court ou moyen terme, hypothétiquement, s'il y avait un exercice de réforme de la fiscalité québécoise, quelle approche fiscale devrait guider ces réflexions?
Total (n=170) | |
Un régime fiscal s'appuyant principalement sur des critères d'efficacité fiscale et de rationalisation des dispositions (dont les crédits d'impôt) au moyen notamment d'évaluation des résultats et de la performance des mesures fiscales avant de procéder à des changements fiscaux significatifs. | 52% |
Un régime fiscal s'appuyant principalement sur des critères de compétitivité fiscale avec les autres juridictions environnantes de manière notamment à maintenir la compétitivité des salaires et la croissance, tout en assurant les revenus fiscaux nécessaires. | 31% |
Un régime fiscal s'appuyant principalement sur des critères d'équité sociale afin de s'assurer que chacun pait sa juste part. | 17% |
SOURCE : ASSOCIATION DES ECONOMISTES QUEBECOIS (ASDEQ)
Association des économistes québécois
Jean-Michel Cousineau, président du Comité des politiques publiques de l'Association des économistes québécois
(514) 731-0356
[email protected]
Léger Marketing
Aubert L.-Descôteaux, Chargé de recherche en affaires publiques
(514) 982-2464
[email protected]
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