QUÉBEC, le 12 déc. 2024 /CNW/ - Nature Québec, Unifor, la Fédération de l'industrie manufacturière (FIM-CSN), le Syndicat des Métallos, la Centrale des syndicats démocratiques (CSD), le Regroupement national des conseils régionaux de l'environnement du Québec (RNCREQ) et la Société pour la nature et les parcs (SNAP Québec) s'allient pour dénoncer la réforme du régime forestier. Les groupes environnementaux et les syndicats estiment que le ministère des Ressources naturelles et des Forêts (MRNF) fait fausse route avec cette réforme et qu'il doit la réviser en profondeur avant que la ministre ne dépose un projet de loi à l'Assemblée nationale.
Une réforme nécessaire, mais qui ne s'attaque pas aux problèmes
Dans le contexte actuel d'une crise structurelle et conjoncturelle qui frappe toute la filière forestière, les groupes environnementaux et les syndicats, qui représentent les travailleurs de l'ensemble de la chaîne de production de bois du Québec, soutiennent qu'une réforme du régime forestier s'impose, mais que les orientations mises de l'avant ne permettront pas de résoudre la crise forestière. Ils estiment que la réforme proposée contient néanmoins certains éléments intéressants qui peuvent être mis à l'essai, dans la mesure où certaines balises les concernant sont modifiées.
« En forêt, le statu quo est intenable. Il faut une transformation majeure de l'industrie forestière pour régler les problèmes d'appauvrissement des forêts et des travailleurs. Malheureusement, la réforme proposée n'est pas celle dont nous avons besoin. Cette réforme mise avant tout sur l'augmentation de la production de bois, sans résoudre les conflits avec les autres usagers de la forêt, sans s'adapter aux changements climatiques, et sans protéger les emplois et la biodiversité », estime Alice-Anne Simard, directrice générale de Nature Québec.
« La ministre devrait concentrer ses efforts pour apporter des réponses aux craintes légitimes des travailleurs et travailleuses. Après des années marquées par les fermetures et les licenciements, la modernisation du régime forestier nous offre l'occasion de revoir notre approche globale et de planifier une transition à l'avantage de tous. Pour nous, la refonte du régime et l'évolution de notre stratégie industrielle vont de pair. Il est possible de maintenir de bons emplois et de réduire la pression sur les écosystèmes, mais il faut être prêt à appuyer sur les bons leviers et à travailler ensemble », explique Daniel Cloutier, directeur québécois d'Unifor.
Les syndicats et les groupes environnementaux invitent d'autres organisations à se joindre à eux pour dénoncer la réforme du régime forestier et proposer des solutions concrètes pour que l'aménagement forestier au Québec soit réellement durable. « Cette sortie commune vise à sensibiliser la ministre à l'effet que les orientations présentées par le MRNF suscitent des inquiétudes importantes. Le MRNF doit prendre le temps et les moyens d'y répondre adéquatement et proposer des principes qui garantiront une forêt durable et un approvisionnement pérenne en bois, assurant ainsi une stabilité et une sécurité à long terme pour l'ensemble des personnes intéressées par la forêt au Québec, dont les travailleuses et travailleurs. Nous sommes d'avis que d'autres groupes sociaux partagent nos craintes et nos préoccupations », explique Luc Vachon, président de la Centrale des syndicats démocratiques (CSD).
Une bonne écoute pour le lobby et la sourde oreille pour les travailleurs
Les organisations déplorent que les solutions amenées semblent sortir tout droit du mémoire que le Conseil de l'industrie forestière du Québec (CIFQ) a déposé durant la démarche de réflexion sur l'avenir de la forêt. Pendant ce temps, les demandes des travailleurs et des travailleuses restent sans réponse de la part du ministère.
« La ministre semble toujours prête à écouter le lobby forestier, mais elle reste sourde aux préoccupations des travailleurs et des travailleuses. Depuis des mois, nos membres réclament un plan de transition concret pour amorcer une véritable transformation industrielle, en mettant l'accent sur une plus forte transformation de la matière ligneuse ici, au Québec. Cette approche permettrait de moderniser nos pratiques, de protéger les emplois et d'assurer une gestion durable des forêts. Sans un plan clair pour une transition juste et une stratégie ambitieuse visant à développer la deuxième et la troisième transformation, on risque de laisser les travailleurs, les communautés et l'environnement derrière. La réforme actuelle rate l'occasion de poser les bases d'une industrie forestière résiliente et durable pour les générations à venir », estime Dominic Lemieux, directeur québécois des Métallos.
La hache dans les acquis environnementaux de la Commission Coulombe
Les organisations dénoncent l'intention de mettre la hache dans les modalités de l'aménagement écosystémique, sous prétexte de vouloir adapter les forêts à la crise climatique. Elles estiment que cette décision sans fondement constituerait un recul environnemental majeur et pourrait entraîner une dégradation des forêts du Québec, en plus de sabrer dans les acquis hérités de la Commission Coulombe. Les organisations sont d'avis que miser sur les processus naturels des forêts est essentiel pour les rendre plus résilientes face à la crise climatique et maintenir la biodiversité des écosystèmes forestiers. Si les mesures d'intensification nécessaires au maintien de l'approvisionnement en bois ont leur place, elles doivent être clairement balisées et encadrées.
« Cette réforme tente d'évacuer certains des principes les plus importants de l'actuel régime forestier sous de faux prétextes, sans se baser sur une analyse factuelle et rigoureuse. La MRNF essaie de se débarrasser de l'aménagement écosystémique pour augmenter la récolte et répondre aux demandes du CIFQ. Ce recul serait une menace à la réputation du bois québécois sur les marchés internationaux et pourrait nuire à l'exportation de nos produits », explique Kevin Gagnon, président de la Fédération de l'industrie manufacturière (FIM-CSN).
Les restes de table de l'industrie comme zones de conservation
Les syndicats et les groupes estiment que la proposition d'instaurer un zonage par triade peut être intéressante, mais que la séquence selon laquelle la triade sera mise en place est primordiale. Les organisations s'inquiètent de voir le MRNF ou le Forestier en chef sélectionner d'abord les territoires où l'intensification de la production de bois sera réalisée, puis de laisser les restes de table de l'industrie forestière pour la conservation.
Ils sont d'avis que ni le MRNF, ni le Forestier en chef, ni l'aménagiste régional, et encore moins l'industrie forestière, n'ont les compétences pour déterminer l'emplacement des zones de conservation. Pourtant, dans un avis datant de mai 2024, le Forestier en chef recommande de protéger les territoires dont l'industrie ne veut pas pour atteindre le 30% de conservation d'ici 2030, c'est-à-dire les pentes fortes, les bandes riveraines et les milieux humides.
« La modernisation du régime forestier doit être l'occasion de transformer la culture organisationnelle du ministère. Elle doit passer d'opposition aux efforts de conservation du territoire à celle de partenaire constructif ne travaillant plus en silo. Que ce soit pour la mise en œuvre d'un nouveau régime forestier ou d'un réseau d'aires protégées permettant d'atteindre la cible de 30%, nous devons adopter un langage commun qui repose davantage sur la science que sur l'influence, et être guidés davantage par une approche inclusive, pangouvernementale et régionale que par la vision du lobby des multinationales », indique Alain Branchaud, directeur général de la SNAP Québec.
Une planification forestière sans imputabilité démocratique
Les organisations sont conscientes de l'importance de renforcer la cohérence des opérations sur le terrain et estiment que la création de postes d'aménagistes forestiers régionaux pourrait répondre à une faiblesse du processus de planification forestière actuelle, pourvu que son mandat soit de contribuer à la mise en œuvre d'un aménagement durable des forêts et non seulement d'un plan de production ligneuse. Les groupes et les syndicats reconnaissent la nécessité de revoir la gouvernance de la planification de l'aménagement en forêt publique. Si la recherche d'agilité est importante, cette quête ne peut servir de prétexte à un recul démocratique. L'imputabilité et la transparence doivent être au cœur de la planification forestière.
Un appel à un dialogue clair et ouvert
En terminant, les groupes environnementaux et les syndicats dénoncent le processus qui leur a été imposé pour commenter la réforme, en toute urgence, de façon opaque et en restreignant le droit de parole des organisations rencontrées. « Une réforme d'une telle ampleur nécessite un processus de consultation clair et transparent, où les parties prenantes et la population disposent de toutes les informations nécessaires pour nourrir une réflexion collective. Cela est essentiel pour assurer que la réforme soit bien accueillie et qu'elle réponde aux besoins du milieu », conclut Martin Vaillancourt, directeur général du Regroupement national des conseils régionaux de l'environnement du Québec (RNCREQ).
À propos de Nature Québec :
Nature Québec est un organisme national sans but lucratif œuvrant à la conservation des milieux naturels et à l'utilisation durable des ressources depuis 1981. Appuyée par un réseau de scientifiques, son équipe mène des projets et des campagnes autour de 4 axes : la biodiversité, la forêt, l'énergie et le climat, ainsi que l'environnement urbain. L'organisme regroupe plus de 145 000 membres et sympathisant-e-s, 30 groupes affiliés et est membre de l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). En ville comme en région, Nature Québec sensibilise, mobilise et agit en vue d'une société plus juste, à faible empreinte écologique et climatique, solidaire du reste de la planète.
À propos d'Unifor-Québec :
Unifor-Québec représente près de 55 000 membres dans le secteur privé, dont 14 000 dans la filière forestière et est affilié à la plus grande centrale syndicale québécoise, la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ).
À propos de la Fédération de l'industrie manufacturière (FIM-CSN) :
La Fédération de l'industrie manufacturière (FIM-CSN) rassemble plus de 28 000 travailleuses et travailleurs. La FIM-CSN fait partie de la Confédération des syndicats nationaux qui compte plus de 330 000 membres au Québec.
À propos du Syndicat des Métallos :
Le Syndicat des Métallos, affilié à la FTQ, est le plus important syndicat du secteur privé au Québec. Il regroupe plus de 60 000 travailleurs et travailleuses de tous les secteurs économiques.
À propos de la Centrale des syndicats démocratiques (CSD) :
La Centrale des syndicats démocratiques (CSD) représente près de 72 000 personnes salariées au Québec évoluant dans divers secteurs, dont le manufacturier, la foresterie, la construction, le soin des personnes vulnérables, l'agroalimentaire et l'administration municipale.
À propos du Regroupement national des conseils régionaux de l'environnement du Québec (RNCREQ) :
Le Regroupement national des conseils régionaux de l'environnement du Québec (RNCREQ) est un réseau d'environ 220 spécialistes engagé-e-s dans la protection de l'environnement, l'action climatique et la promotion du développement durable sur l'ensemble du territoire québécois. Le RNCREQ est reconnu comme interlocuteur privilégié du gouvernement et les dix-sept conseils régionaux de l'environnement (CRE) interviennent dans la plupart des grands dossiers : aires protégées, biodiversité, changements climatiques, développement durable, santé des lacs, milieux humides, énergie, foresterie, matières résiduelles, mines, transport et aménagement du territoire.
À propos de la SNAP Québec :
La Société pour la nature et les parcs (SNAP Québec) est un organisme à but non lucratif dédié à la protection de la nature. La SNAP Québec travaille à la création d'un réseau d'aires protégées à travers la province, afin d'assurer la protection à long terme de la forêt boréale, du Grand Nord, du Saint-Laurent et des écosystèmes qui abritent nos espèces menacées. Elle veille également à la bonne gestion des aires protégées existantes. Fondée en 2001, la section québécoise de la SNAP peut mettre à profit un réseau canadien actif depuis 1963, composé aujourd'hui d'un bureau national à Ottawa et de 13 sections d'un océan à l'autre. La SNAP Québec a contribué à la création de plus de 120 000 km² d'aires protégées au Québec, comme le parc national Tursujuq.
SOURCE Nature Québec
CONTACT MÉDIAS : Lucie Bédet, chargée des communications, Nature Québec, 581-980-8198 | [email protected]; Véronique Figliuzzi, représentante nationale aux communications, Unifor, 514-212-6003 | [email protected]; Thierrry Larivière, conseiller aux communications, Fédération de l'industrie manufacturière (FIM-CSN), 514-966-4380| [email protected]; Jocelyn Desjardins, relations avec les médias et communications, Syndicat des Métallos,(514) 604-6273 | [email protected]; Marilou Gagnon, conseillère syndicale aux communications, Centrale des syndicats démocratiques (CSD), 514-248-6277 | [email protected]; Nicolas Valente, conseiller aux communications, RNCREQ, (514) 861-7022 #3524 | [email protected]; Charlène Daubenfeld, directrice des communications, SNAP Québec, 514-378-3880 | [email protected]
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