L'économie mondiale est sur la voie de la reprise, mais d'une région du monde à l'autre, on constate des disparités importantes
- Les politiques monétaires et budgétaires mises en œuvre à l'échelle mondiale réussissent à endiguer la crise économique et financière.
- La forte reprise des économies en émergence semble indiquer que le maintien des mesures de stimulation budgétaire et monétaire pourrait être nuisible dans ces pays, pouvant mener à des risques d'inflation ou de montée excessive des prix des actifs.
- La reprise dans les pays industrialisés sera plus lente qu'au cours des reprises antérieures et les défis sont considérables. Il faudra notamment résorber les énormes déficits budgétaires et bien synchroniser le rééquilibrage de la politique monétaire.
- Au Canada et aux É.-U., la croissance devrait se situer près de 3 % en 2010 et en 2011.
TORONTO, le 18 mars /CNW/ - Selon un nouveau rapport publié par les Services économiques TD, les mesures exceptionnelles prises pour ranimer l'économie mondiale ont atteint leur principal objectif, mais elles ont engendré d'autres difficultés qui limiteront la croissance.
"Au départ, les banques centrales et les autorités publiques ont réagi à la crise financière comme une équipe de traumatologie dont l'objectif est de ranimer le patient et de le stabiliser, affirme Craig Alexander, économiste en chef adjoint du Groupe Financier Banque TD. Énergiques et coordonnées, les mesures de stimulation budgétaire et monétaire ont eu l'effet escompté. À défaut d'empêcher la contraction de l'économie, l'intervention a permis d'éviter une récession plus profonde et a jeté les bases de la reprise."
Risque d'inflation pour les marchés en émergence
Le scénario a depuis évolué différemment dans les pays développés et dans les pays en développement. Les marchés émergents d'Asie hors Japon et d'Amérique latine ont été touchés moins directement par la crise financière et la récession, la plus grande partie du ralentissement économique étant dans leur cas imputable à leur exposition aux autres économies avec qui ils entretiennent des échanges commerciaux et financiers. Après que la situation financière a été stabilisée et que le plongeon de la demande mondiale a été ralenti, la production a repris dans ces régions. De plus, la valeur des exportations des économies émergentes axées sur les produits de base s'est considérablement accrue à la faveur d'une remontée des prix de ces produits. Il s'ensuit que les marchés émergents seront probablement le principal moteur de la croissance économique mondiale en 2010 et en 2011. Cependant, Craig Alexander lance un avertissement : "De nombreuses économies en émergence n'ont plus besoin des mesures de stimulation budgétaire et monétaire exceptionnelles mises en œuvre un peu partout dans le monde. Les deux années qui viennent seront marquées par la nécessité pour ces pays, notamment pour la Chine, d'alléger les mesures de stimulation budgétaire en fonction de l'expansion économique pour éviter toute poussée inflationniste ou montée excessive du prix des actifs."
L'ampleur des déficits budgétaires dans les pays développés exige une délicate opération de rééquilibrage
Le scénario est très différent dans les économies avancées où la reprise est beaucoup plus lente qu'à l'habitude. Il est troublant de constater que les politiques mises en œuvre pour lutter contre la crise ont créé une nouvelle série de problèmes, les énormes déficits budgétaires en Europe, aux États-Unis et au Japon représentant la principale difficulté. L'effet des mesures de stimulation budgétaire s'estompera peu à peu, ce qui commencera à entraver la croissance économique dans de nombreux pays dès 2011. Ce ralentissement se produira même en l'absence de toute mesure formelle de retour à une plus grande rigueur budgétaire. La demande privée devrait augmenter peu à peu à mesure que la reprise économique prendra de l'élan, mais dans le scénario le plus probable, la croissance économique devrait rester modérée, car les administrations en place commenceront à s'attaquer à leur déficit budgétaire dès 2011. "Le rééquilibrage de la politique monétaire exigera aussi beaucoup de doigté, selon M. Alexander. Une hausse trop brutale des taux d'intérêt freinera l'élan de la reprise. Par ailleurs, une majoration trop tardive créera un risque d'inflation. Dans un cas comme dans l'autre, la volatilité des marchés s'accentuera."
Retombées au Canada et aux États-Unis
Les économies canadienne et américaine devraient afficher un taux de croissance de près de 3 % en 2010 et en 2011. Ce taux très ordinaire annonce une reprise plus lente que celles consécutives à de nombreuses récessions du passé.
Aux É.-U., le marché immobilier restera faible et la croissance des dépenses de consommation sera limitée. Le processus de désendettement dans lequel sont engagés les particuliers et le système financier sera long. Au Canada, parmi les facteurs qui contribueront à la lenteur inhabituelle de la reprise, mentionnons la croissance limitée de la demande américaine pour les exportations canadiennes, la vigueur du dollar canadien, le refroidissement du marché immobilier intérieur et la croissance limitée des dépenses des consommateurs amenée par leur fort niveau d'endettement.
L'inévitable retour à l'équilibre budgétaire s'ajoutera à ces facteurs restrictifs limitant la croissance. L'ampleur de la stimulation de la politique monétaire devra aussi un jour être réduite. On s'attend à ce que la Banque du Canada commence à majorer ses taux progressivement en juillet, tandis qu'aux États-Unis, la Réserve fédérale devrait attendre jusqu'au début de 2011. "L'essentiel est qu'on a réussi à ranimer les économies américaine et canadienne, mais qu'elles demeureront en convalescence pendant encore un certain temps, constate Alexander. De plus, il serait imprudent de notre part de négliger toute l'incertitude qui entoure la réforme du système financier. Tout le monde s'entend pour dire qu'une réforme du système financier mondial s'impose et que pour être efficace, cette réforme devra être concertée à l'échelle mondiale, ajoute-t-il. Toutefois, il existe un risque réel qu'elle soit au contraire mise en œuvre à la pièce, qu'elle soit excessive ou qu'elle varie fortement d'un pays à l'autre."
Le message clé du rapport est que la reprise mondiale sera soutenue, mais que de nombreux risques persistent. Les projections des Services économiques TD annoncent une forte croissance en Asie hors Japon et en Amérique latine et une croissance économique modérée au Japon, en Europe et en Amérique du Nord en 2010 et en 2011. Toutefois, ces prévisions ne doivent pas faire abstraction de la volatilité qui viendra probablement perturber les statistiques économiques et financières mensuelles et trimestrielles. Elles masquent aussi les défis incroyables auxquels sont confrontés les décideurs en matière de politique monétaire, budgétaire et réglementaire.
On peut consulter les Prévisions économiques trimestrielles des Services économiques TD à l'adresse www.td.com/francais/services_economiques/index.jsp.
Renseignements: Craig Alexander, Économiste en chef adjoint et premier vice-président, (416) 982-8064; Pascal Gauthier, Économiste, (416) 944-5730
Partager cet article