Victimes de violence conjugale et Projet de loi modernisant le régime de santé et sécurité au travail : une équipe de recherche partenariale de l'UQAM mobilisée pour la protection en milieu de travail
MONTRÉAL, le 27 oct. 2020 /CNW Telbec/ - Le comité d'encadrement du projet « Vers une politique de travail en violence conjugale », mené dans le cadre du Service aux collectivités de l'UQAM, salue l'intention exprimée par le ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale, M. Jean Boulet, de reconnaître une obligation de protéger la travailleuse victime de violence conjugale sur les lieux du travail au sein du projet de loi pour moderniser le régime de la santé et sécurité au travail (LSST), projet qui a été déposé aujourd'hui. C'est là un premier pas important dans l'édification d'une stratégie de lutte contre la violence conjugale impliquant une mobilisation des milieux de travail afin de combattre ce fléau.
Une problématique bien présente
Depuis plus d'une dizaine d'années, le Centre d'aide aux victimes d'actes criminels (CAVAC) Côte-Nord, le Centre femmes aux 4 vents et la Maison des femmes de Baie-Comeau documentent la problématique de la violence conjugale sur le territoire de la Côte-Nord. En plus de soutenir les victimes, ces organismes produisent également des outils et formations destinés notamment aux employeurs et milieux de travail. Le 3 décembre 2020 sera lancée une trousse destinée à accompagner les milieux de travail (employeurs, syndicats et membres du personnel) produite par ces groupes. Elle contient différents outils utiles pour mieux comprendre la violence conjugale et ses effets, ainsi que des suggestions de pratiques à mettre en place dans les milieux de travail.
En 2019, ces quatre groupes se sont associés avec Me Rachel Cox, professeure au Département de sciences juridiques de l'UQAM, dans le cadre d'une recherche* menée au Service aux collectivités de l'Université avec le soutien financier du Fonds d'aide aux victimes d'actes criminels et du Réseau québécois en études féministes. Un comité d'encadrement visant à explorer différents modèles législatifs au Canada et sur la scène internationale a été constitué pour permettre de mobiliser efficacement le milieu de travail pour mettre fin à la violence conjugale. Constat : la majorité des provinces ont déjà des dispositions reconnaissant une obligation de prévention pour l'employeur en matière de violence conjugale. Ces dispositions ont parfois été adoptées après qu'une enquête du coroner ait conclu à la mort prévisible et évitable d'une femme assassinée par son ex-conjoint sur les lieux de travail.
Ainsi, en Ontario (2009) et en Alberta (2017), le meurtre de deux femmes sur les lieux de travail par leurs ex-conjoints a été le catalyseur de l'adoption de dispositions reconnaissant explicitement une obligation de prévention de l'employeur en matière de violence conjugale. Récemment, le Nouveau-Brunswick (2018) et Terre-Neuve-et-Labrador (2019) ont adopté une réglementation reconnaissant que la violence conjugale est visée par la définition de la « violence » au sein de leur régime de santé et de sécurité au travail. Et depuis plusieurs années déjà, au Manitoba (2011) et en Colombie-Britannique (2012), l'obligation générale de l'employeur en matière de santé et de sécurité du travail sert de fondement à des initiatives gouvernementales en ce sens.
Le confinement dû à la COVID-19 a ajouté, pour les travailleuses victimes de violence, des contraintes supplémentaires dans une situation de violence quotidienne déjà difficile et périlleuse. L'équipe partenariale a d'ailleurs produit une série de capsules sur la question en mai 2020, disponibles pour visionnement en cliquant ici.
Ce que les expertes disent
Pour la professeure Rachel Cox, de l'UQAM, alors qu' « une travailleuse canadienne sur trois a déjà subi de la violence conjugale, et pour la moitié d'entre elles, la violence s'est poursuivie au travail, il est donc grand temps que le Québec se mette au diapason des autres provinces canadiennes. » « Lorsque le conjoint ou l'ex-conjoint violent poursuit sa victime jusqu'à son travail, poursuit-elle, il s'agit d'un signe de danger imminent. Il faut que tout le monde sache comment réagir. L'obligation proposée par le ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale est une mesure qui peut contribuer à sauver des vies. »
Ève-Marie Lampron, agente de développement au Service aux collectivités de l'UQAM (service dont la mission est de conjuguer savoirs universitaires et savoirs citoyens) souligne que : « Les groupes ont produit du matériel, des outils, et disposent d'une connaissance unique des situations vécues sur le terrain : l'intégration de leur revendication dans la LSST fait valoir tant le travail réalisé par les chercheures de l'UQAM - auxquelles le ministre a d'ailleurs fait référence pendant sa conférence de presse - que les outils produits par les groupes, expertises qui devront également être reconnues lorsque viendra le temps de mettre en œuvre la législation. »
Sur la Côte-Nord, à Sept-Îles, Nadia Morissette, agente en condition féminine du Centre femmes aux 4 vents, constate pour sa part que : « Depuis la parution du rapport de recherche en septembre 2019, les appuis affluent de la part des groupes de femmes, des groupes d'aide aux victimes, des milieux syndicaux et d'entreprises. Nous croyons que l'inclusion d'une telle disposition dans la LSST constitue un moyen éprouvé de prévenir la violence conjugale et de soutenir les travailleuses victimes. On envoie un message fort que la violence conjugale est l'affaire de tous et toutes ! Tout le monde qui peut intervenir pour y mettre fin doit le faire. »
Hélène Millier, coordonnatrice de la ressource d'hébergement La Maison des femmes de Baie-Comeau, souligne aussi que : « Le ministre a non seulement étendu la protection aux travailleuses et travailleurs victimes de violence familiale, mais a aussi choisi de nommer spécifiquement la violence conjugale, ce que je ne peux que saluer. Ce choix est d'ailleurs cohérent avec les analyses féministes de la violence conjugale, comme phénomène spécifique s'inscrivant dans un historique de rapports inégaux entre les hommes et les femmes. »
Enfin, pour Isabelle Fortin, directrice générale du Centre d'aide aux victimes d'actes criminels (CAVAC) Côte-Nord : « Une fois le projet de loi adopté, la mise en œuvre de cette mesure sera la prochaine étape. Nous assurons le Ministère de notre soutien et tenons à lui spécifier notre reconnaissance de ce pas important vers des milieux de travail plus sensibles et sécuritaires pour les victimes de violence conjugale. Nous espérons que la trousse que nous avons produite sera utile afin d'accompagner les milieux de travail vers cette importante transition. »
SOURCE Université du Québec à Montréal
Joanie Doucet, Conseillère en relations de presse, UQAM, 514 297-2771, 514 987-3000, poste 3268, [email protected] ; Ève-Marie Lampron, Agente de développement au Service aux collectivités, Protocole UQAM/Relais-femmes, [email protected]
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