Aide au secteur manufacturier : une réforme en profondeur s'impose
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HEC Montréal - Centre sur la productivité et la prospérité20 mai, 2014, 06:00 ET
MONTRÉAL, le 20 mai 2014 /CNW Telbec/ - Au Québec, non seulement le système d'aide aux entreprises du secteur manufacturier est trop complexe, mais il rate très souvent ses cibles. Voilà les principales conclusions d'une récente étude dévoilée aujourd'hui par le Centre sur la productivité et la prospérité (CPP) de HEC Montréal. « Depuis près de 15 ans, le secteur manufacturier traverse une crise majeure au Québec. Près d'un emploi sur cinq a disparu et la production manufacturière a fortement décliné, déplore Robert Gagné, directeur du CPP. Malgré l'aide considérable que le gouvernement du Québec a consentie pour stopper cette hémorragie, aucune reprise tangible de l'activité manufacturière ne s'est produite. Face à de tels constats, il nous apparaissait essentiel d'entreprendre une étude visant à mieux comprendre les failles du secteur manufacturier québécois et à s'interroger sur l'efficacité de l'aide publique accordée aux entreprises qui y évoluent. »
Le déclin de l'activité manufacturière
Cette analyse nous apprend qu'au Québec, plus de 134 000 emplois ont été abolis dans le secteur manufacturier entre 2002 et 2011. En outre, la part du produit intérieur brut (PIB) généré par ce secteur a diminué considérablement, passant de 31 % du PIB en 2000 à moins de 20 % en 2011.
Bien que le Québec ne soit pas la seule économie où le secteur manufacturier a subi un fort déclin, cette province fait néanmoins figure d'exception. La présente analyse révèle que le repli de l'activité manufacturière s'y est manifesté beaucoup plus tôt qu'en Ontario et que dans les six plus importants pays manufacturiers (Allemagne, États-Unis, France, Italie, Japon, Royaume-Uni).
Et pourquoi le secteur manufacturier est-il plus affecté au Québec qu'ailleurs ? « La grande majorité des problèmes éprouvés par ce secteur s'explique par la prédominance des industries dites à faible technologie que sont le textile, le vêtement, le papier, les meubles et les produits dérivés du bois, souligne Robert Gagné. Ainsi, près de 50 % des emplois du secteur manufacturier québécois sont générés par des entreprises qui n'ont pas toujours besoin d'un grand savoir technique pour opérer. Plus fragiles parce que davantage exposées à la concurrence des pays émergents et aux fluctuations du taux de change, ces industries ont précipité le déclin de l'activité manufacturière au Québec. Tant que le dollar canadien a été faible, les producteurs québécois ont pu miser sur sa dépréciation pour demeurer concurrentiels. Ils ont toutefois été vite rattrapés sur le plan de la compétitivité lorsque le huard a commencé à remonter. »
Une aide qui rate souvent ses cibles
En parallèle, cette étude montre aussi que l'aide proposée aux entreprises manufacturières pourrait être beaucoup plus efficace. Mal ciblés et manquant de précision dans leur application, plusieurs crédits ratent actuellement les objectifs visés et ne fournissent pas les incitatifs requis pour la relance. C'est notamment le cas des deux principaux outils fiscaux que propose le gouvernement du Québec et qui, en dépit de leur importance, n'arrivent pas à relancer l'investissement ni à stimuler la recherche et développement (R-D). Le fait que l'aide soit attribuée sans réelle distinction quant à la composition industrielle du secteur manufacturier nuit indéniablement à l'efficacité du soutien gouvernemental.
Par ailleurs, les mesures visant à favoriser l'emploi dans les régions éloignées devraient être abandonnées au profit d'une aide directe ciblant la productivité. En somme, il apparaît utopique de supposer que ce type de mesures pérennisera l'emploi en région puisque, à long terme, l'accroissement de la productivité est le seul véritable mécanisme de relance qui permettra aux régions de créer et de maintenir des emplois de qualité.
Quelques recommandations
À la lumière de cette analyse, une réforme en profondeur de l'aide gouvernementale destinée aux entreprises du secteur manufacturier s'impose. Pour ce faire, le CPP présente quatre recommandations visant à accroître l'efficacité de l'aide consentie et à éviter le gaspillage des finances publiques : 1. Préférer l'aide directe à l'aide fiscale pour assurer un meilleur contrôle des résultats et atteindre certaines cibles précises; 2. Repenser les crédits d'impôt à la R-D et à l'investissement, considérant que 40 % de l'activité manufacturière au Québec est générée par des industries qui s'engagent peu dans ces voies; 3. Revoir l'aide aux régions afin de prioriser la productivité des entreprises et non l'emploi; 4. Éviter de saupoudrer l'aide à l'ensemble du secteur manufacturier en précisant les interventions gouvernementales et en misant sur les initiatives les plus prometteuses.
« En allégeant la structure du soutien aux entreprises, ces changements permettraient d'offrir un système d'aide plus simple et moins coûteux à gérer. À terme, les gains d'efficacité seraient doubles : non seulement l'aide assurerait de meilleures retombées, mais il en découlerait un système moins complexe et plus accessible aux PME québécoises », conclut Robert Gagné.
Pour en savoir plus :
- Consultez le rapport Mieux outiller le secteur manufacturier : entre politique et adéquation des besoins.
- Téléchargez le communiqué de presse en anglais.
À propos du Centre sur la productivité et la prospérité
Créé en 2009, le Centre sur la productivité et la prospérité de HEC Montréal mène une double mission. Il se consacre d'abord à la recherche sur la productivité et la prospérité en ayant comme principaux sujets d'étude le Québec et le Canada. Ensuite, il veille à faire connaître les résultats obtenus en organisant des activités de transfert, de vulgarisation et, ultimement, d'éducation. Pour en apprendre davantage sur le Centre, visitez le www.hec.ca/cpp.
SOURCE : HEC Montréal - Centre sur la productivité et la prospérité
Liette D'Amours, Responsable des relations médias, Tél. : 514 649-2347, [email protected]
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