Bombardier Inc. condamnée - UN PILOTE DE LIGNE CANADIEN D'ORIGINE
PAKISTANAISE REMPORTE UNE IMPORTANTE CAUSE DE DISCRIMINATION
Nouvelles fournies par
Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse08 déc, 2010, 11:04 ET
MONTRÉAL, le 8 déc. 2010 /CNW Telbec/ - La Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse vient de remporter une importante victoire au nom d'un Canadien d'origine pakistanaise à qui Bombardier Inc. avait refusé une formation en 2004, sous une licence de pilote canadienne, parce qu'il avait été identifié comme un « risque pour l'aviation et la sécurité nationale » par les autorités américaines.
Dans un jugement qui vient d'être rendu, le Tribunal des droits de la personne a condamné Bombardier Inc. à payer à monsieur Javed Latif des dommages matériels, moraux et punitifs s'élevant à plus de 319 000 $. Le Tribunal a conclu qu'il a été victime de discrimination fondée sur son origine ethnique et nationale et que son droit à la sauvegarde de sa dignité a été compromis.
De plus, le Tribunal a ordonné à Bombardier Inc. de cesser d'appliquer ou de considérer les normes et décisions des autorités américaines en matière de traitement des demandes de formation de pilote sous une licence de pilote canadienne.
« La décision du Tribunal des droits de la personne est sans précédent », a précisé aujourd'hui le président de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, monsieur Gaétan Cousineau. Il a souligné qu'il s'agit du premier jugement qui porte sur les conséquences directes en territoire canadien des mesures américaines adoptées au lendemain du 11 septembre 2001.
Par ailleurs, il s'agit du plus important montant en dommages punitifs (50 000 $) jamais accordé par le Tribunal. Dans sa décision, la juge Mich��le Rivet souligne que Bombardier Inc. n'a jamais cherché à savoir si monsieur Latif constituait un risque objectif pour la sécurité « des Canadiens » ou de « l'aviation » et « n'a jamais considéré utile de chercher conseil ni auprès de Transport Canada, ni auprès du Service canadien du renseignement de sécurité. La juge a conclu au caractère intentionnel de l'atteinte illicite aux droits du plaignant.
La preuve entendue par le Tribunal a démontré que le centre de formation de Bombardier Inc. à Montréal a refusé une formation sous une licence de pilote canadienne pour un appareil Challenger 604 au seul motif que les autorités responsables de la sécurité dans les transports aériens aux États-Unis avaient refusé à monsieur Latif une formation sous licence de pilote américaine en avril 2004 « afin de protéger la sécurité nationale des États-Unis ».
La décision américaine de refuser l'autorisation était, selon la preuve, liée à l'entrée en vigueur en décembre 2003, de nouvelles dispositions législatives en matière sécurité aérienne aux États-Unis. Pourtant, monsieur Latif avait obtenu l'autorisation de suivre une formation pour piloter un appareil Boeing à Miami à l'automne 2003. Par ailleurs, au cours de sa carrière de pilote de 25 ans, il avait suivi de nombreuses formations sous sa licence américaine et avait volé régulièrement dans l'espace aérien américain. La preuve révèle aussi que les autorités américaines ne le considèrent plus, depuis 2008, comme une « menace pour la sécurité nationale ».
Lors de son témoignage, monsieur Latif a déclaré avoir été étonné de se voir refuser cette formation et a d'abord pensé qu'il s'agissait d'une erreur d'identité. Non seulement s'est-il senti humilié, mais il a compris qu'il était devenu persona non grata dans le milieu de l'aviation après avoir essuyé le refus du centre de formation Bombardier Inc. De plus, il s'est retrouvé en situation financière précaire comme il n'avait plus accès à la formation récurrente obligatoire pour continuer à exercer son métier de pilote.
Par ailleurs, le directeur des normes de qualité au centre de formation Bombardier Inc. a indiqué au Tribunal qu'il avait reçu un avis des autorités américaines l'informant de ne pas offrir la formation à monsieur Latif. Il a affirmé ne pas avoir demandé aux autorités américaines les motifs qui ont mené à leur refus d'autorisation en matière de sécurité en 2004. Il considérait que les autorités américaines étaient crédibles quant au fait que monsieur Latif constituait une « menace à l'aviation ou à la sécurité aérienne » et ce, même si le centre de formation de Bombardier Inc. à Montréal avait, dans le passé, accordé de nombreuses formations au plaignant.
Selon le directeur, monsieur Latif était dorénavant considéré comme un « terroriste potentiel » et c'est pourquoi il lui a refusé la formation. Il a aussi indiqué que s'il avait accepté de former le pilote, il y aurait eu des « conséquences sérieuses pour Bombardier Inc. » qui a pour politique de respecter toutes les lois, règlements et autres directives des agences gouvernementales américaines concernées. Le Tribunal n'a pas retenu les prétentions de Bombardier Inc. à cet effet.
Témoignant à titre d'experte, la professeure Reem Anne Bahdi de l'Université de Windsor a démontré que plusieurs programmes ciblant les Arabes et les musulmans ont été adoptés aux États-Unis au lendemain des attentats terroristes de 2001. Ces programmes s'appuient sur des stéréotypes et sur le profilage racial, en les identifiant comme « groupes à risque pour la sécurité nationale ».
Elle a aussi précisé qu'en l'absence de mécanismes d'examen et de reddition, il est difficile de corriger les erreurs ou de contester des décisions prises dans le secret, lorsque les autorités américaines étiquettent une personne comme étant une « menace à la sécurité nationale ». Elle souligne que plus de 700 000 personnes étaient identifiées comme des « terroristes potentiels » aux États-Unis en 2007.
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Patricia Poirier (514) 873-5146 ou 1 800 361-6477, poste 358 [email protected] |
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