Des groupes condamnent la « trahison de la santé publique » alors que les créanciers approuvent l'entente tabac
OTTAWA, ON, MONTRÉAL et EDMONTON, AB, le 12 déc. 2024 /CNW/ - Trois groupes antitabac, la Coalition québécoise pour le contrôle du tabac, les Médecins pour un Canada sans fumée, et Action on Smoking & Health (ASH Canada) ont condamné la capitulation face à l'industrie du tabac avec le vote des créanciers qui a approuvé aujourd'hui le plan de règlement après cinq années de négociations secrètes.
« Les gouvernements provinciaux et territoriaux qui ont voté en faveur de ce plan ont sacrifié l'intérêt public. Ils ont donné à l'industrie du tabac tout ce qu'elle pouvait espérer. Avec ce règlement extrêmement défectueux, ils ont gaspillé une occasion unique de changer le modèle commercial des cigarettiers qui profitent de la dépendance et des maladies », déclare Flory Doucas, codirectrice et porte-parole de la Coalition québécoise pour le contrôle du tabac.
« Aujourd'hui est un jour très triste pour la lutte antitabac. Un dangereux précédent a été créé pour ce qui est de la responsabilisation des compagnies. La procédure de la LACC a toujours été le mauvais outil pour traiter avec des industries sournoises comme les géants du tabac dont les produits ont tué plus d'un million de fumeurs au Canada.
« L'argent à gagner en vertu de ces négociations a aveuglé les gouvernements provinciaux quant aux dommages que ces entreprises vont continuer à causer. Il y avait suffisamment d'argent sur la table pour indemniser adéquatement les victimes, sans pour autant compter sur des ventes futures pour financer les paiements aux gouvernements. Normalement, les compagnies en situation d'insolvabilité se voient forcées à se restructurer, mais pas l'industrie du tabac. Celle-ci peut continuer à recruter et à rendre dépendantes de nouvelles générations de toxicomanes dont les vies seront ruinées et dont les maladies entraîneront encore plus des coûts des soins de santé.
« Le règlement ne contient aucune mesure visant à accélérer le déclin du tabagisme ou à empêcher le recrutement de nouveaux fumeurs et vapoteurs. Au contraire, le règlement vise à perpétuer le tabagisme commercial et le vapotage chez les jeunes. Le plan est en fait conçu pour être financé par les achats continus de produits du tabac. Les paiements futurs aux provinces dépendent de la poursuite des dommages financiers et sociaux causés par le tabagisme », ajoute-t-elle.
Selon le plan désormais approuvé, les provinces et les territoires recevront un pourcentage des recettes nettes provenant des ventes de tabac (à l'exclusion des accises et des taxes sur les ventes) jusqu'à ce que 20 milliards de dollars aient été perçus et présagent que les recettes des entreprises seront maintenues à plus d'un milliard de dollars par an. »
Les provinces et les territoires doivent contrebalancer cet appât du gain par des mesures concrètes.
« Étant donné la perte nette colossale pour la santé publique que représente ce règlement, les provinces devraient compenser leur incapacité à inclure des mesures de santé dans ce règlement par de nouvelles mesures provinciales audacieuses et concrètes afin d'accélérer le déclin du tabagisme et de renverser le problème du vapotage chez les jeunes. Des mesures révolutionnaires comme l'élimination progressive des cigarettes combustibles ou l'abolition de la rentabilité de la dépendance à des produits nocifs sont des options réalisables à envisager », déclare Les Hagen, directeur d'ASH-Canada. « Si les gouvernements canadiens peuvent progressivement éliminer les véhicules à combustion interne, les plastiques à usage unique et les émissions de CO2, ils peuvent certainement progressivement éliminer une industrie dont les produits tuent près de 50 000 Canadiens chaque année.
Aucune admission de comportements préjudiciables
« Le règlement ne fait rien pour reconnaître, traiter ou corriger les actions préjudiciables et injustes de l'industrie du tabac », ajoute Cynthia Callard, directrice générale de Médecins pour un Canada sans fumée.
Les tribunaux du Québec ont jugé que les trois plus grands fabricants de cigarettes au Canada avaient agi à l'encontre de diverses lois tout au long des décennies qui ont fait l'objet de l'un des plus longs procès en responsabilité civile au pays. Les compagnies ont été reconnues coupables de ne pas avoir veillé à ce que les consommateurs soient informés des risques associés à leurs produits, d'avoir induit les consommateurs en erreur en attaquant les informations de santé fournies par d'autres, d'avoir induit les consommateurs en erreur par leur publicité et d'avoir enfreint au droit à la vie des Québécois et à la sécurité personnelle. Ces comportements répréhensibles n'ont pas cessé en 1998 et il y a des parallèles à faire entre leur comportement passé et ceux déployés lors de leur commercialisation actuelle des nouveaux produits à base de nicotine.
Traitement de faveur accordé aux nouveaux produits nicotiniques de l'industrie
« Au lieu d'assurer la fin prévisible de la vente des produits nocifs et addictifs de même que le marketing trompeur de l'industrie, l'entente permet ces pratiques à perpétuité », ajoute Mme Callard. En effet, l'entente contient un ensemble de clauses et d'engagements de la part des fabricants, y compris un engagement selon lequel les « pratiques opérationnelles » qu'elles ont établies pour la vente du tabac seront maintenues. L'objectif apparent de cet accord est d'assurer que les revenus du tabac et les paiements qui en découlent resteront élevés.
« Dans le cadre du processus d'insolvabilité, les gouvernements auraient pu négocier des solutions pour contrer les problèmes auxquels ils sont confrontés, tels que des groupes de façade qui répètent les demi-vérités de l'industrie, les menaces juridiques de même que la mise en marché constante de nouveaux produits et de bidules visant à déjouer les règles qui protègent les jeunes. Or, les provinces et les territoires ont plutôt convenu de donner la priorité à la viabilité du nouveau modèle d'affaires de l'industrie du tabac axé sur la dépendance à la nicotine à travers des produits comme le vapotage, le tabac chauffé et d'autres produits novateurs », explique Mme Callard.
« Il faut se demander : pourquoi accorder à l'industrie du tabac le privilège singulier de s'approprier les bénéfices générés par ces nouvelles catégories de produits ? N'importe quelle autre entreprise aurait puisé dans tous ses bénéfices pour payer les amendes qui leur sont imposées. Après tout, ce sont les propriétaires et les actionnaires qui partagent la responsabilité des dommages causés par leurs produits, et non les produits eux-mêmes, » ajoute Mme Callard.
Le milliard de dollars censé créer une fondation pour financer la recherche est uniquement axé sur 'l'amélioration des résultats dans les maladies liées au tabac' afin de 'fournir des bénéfices indirects' aux fumeurs qui ont été ou seront blessés par les produits du tabac. Cela ne constitue pas non plus une menace pour les profits de l'industrie, car celle-ci aura déjà encaissé les revenus provenant des cigarettes achetées par ces victimes. Rien dans l'entente ne vise à prévenir la dépendance et les préjudices causés aux nouveaux consommateurs, ni à aider les fumeurs à arrêter de fumer, ni à soutenir les piliers traditionnels de la lutte antitabac.
SOURCE Coalition québécoise pour le contrôle du tabac
Information: Flory Doucas, (514) 515-6780; Cynthia Callard, (613) 600-5794; Les Hagen, (780) 919-5546
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