IMMIGRATION TEMPORAIRE AU QUÉBEC - LES TRAVAILLEURS ÉTRANGERS COMBLENT LES PÉNURIES DE MAIN-D'ŒUVRE… MAIS SEULEMENT EN PARTIE
MONTRÉAL, le 26 févr. 2024 /CNW/ - L'afflux d'immigrants temporaires que connaît le Québec s'est non seulement accéléré en 2023, mais il s'est aussi transformé comme le révèle le rapport L'impact des immigrants temporaires sur le marché de l'emploi au Québec : mieux comprendre pour mieux agir publié aujourd'hui par l'Institut du Québec (IDQ).
« Les immigrants temporaires sont de plus en plus présents sur le marché de l'emploi québécois, indique Emna Braham, directrice générale de l'IDQ. À preuve, le nombre de détenteurs d'un permis de travail émis par le Programme des travailleurs étrangers temporaires et le Programme de mobilité internationale est passé de 43 770 en 2015 à 167 435 en 2023 ». À ces travailleurs s'ajoutent quelque 117 745 étudiants étrangers qui ont, pour la plupart, le droit de travailler au cours de leurs études ainsi que des demandeurs d'asile - dont le nombre s'est considérablement accru au Québec en 2023 - qui ont obtenu un permis de travail pour raisons humanitaires. Ce bond de l'immigration temporaire n'est pas sans impacts sur le marché de l'emploi.
Au-delà des besoins des employeurs, plusieurs politiques publiques adoptées par les gouvernements québécois et canadien ont favorisé cette arrivée plus importante des immigrants temporaires. Dès 2015, la mise en place du Programme de mobilité internationale (PMI) dans sa forme actuelle a autorisé la venue de travailleurs étrangers sans qu'ils n'aient à être au préalable conviés par un employeur. À partir de 2022, des assouplissements réglementaires - initiés tant par le fédéral que le provincial - ont accéléré l'octroi et le renouvellement des permis temporaires. Enfin, notons que les deux paliers de gouvernement ont également consenti des efforts pour attirer, puis retenir, des travailleurs et des étudiants étrangers.
Si depuis 2015, l'immigration constitue le principal moteur de croissance du bassin de travailleurs disponibles au Québec, l'afflux de résidents temporaires qui s'est accéléré en 2023 a complètement changé le portrait de la situation. Alors que la population active du Québec n'augmentait en moyenne que de 39 000 personnes par année entre 2015 et 2022, il s'en est ajouté près de 100 000 en 2023.
En cette période charnière où les baby-boomers sont nombreux à prendre leur retraite, cet afflux de nouveaux travailleurs vient atténuer certaines pressions sur le marché de l'emploi québécois. On les retrouve ainsi en grand nombre dans des secteurs où beaucoup de postes sont à pourvoir comme le manufacturier (16 % des immigrants temporaires à l'emploi), le commerce de détail (12 %) et la restauration (9 %). « Toutefois, ces nouveaux arrivants ne comblent pas pour autant toutes les pénuries de main-d'œuvre, précise Daye Diallo, économiste principal à l'IDQ. Notre analyse révèle que les travailleurs étrangers sont encore sous-représentés en santé et assistance sociale ainsi qu'en construction, deux secteurs où les besoins sont pourtant appelés à augmenter au cours des prochaines années. »
En parallèle, le recours aux travailleurs étrangers pour combler des postes qui ne trouvent pas preneurs au Québec suscite un débat de fond dans un Québec où le niveau de productivité des entreprises peine à s'accroître. Leur recrutement entrave-t-il les transformations - automatisation, intégration de nouvelles technologies, nouveaux modèles d'affaires - pourtant nécessaires à la création de richesse ? À ce chapitre, notons que le Programme des travailleurs étrangers temporaires (PTET), principale filière d'immigration temporaire destinée à la sélection de travailleurs étrangers recrutés pour combler des besoins spécifiques et propres à l'économie québécoise, ne comptait que 59 820 travailleurs temporaires en 2023.
Un nombre beaucoup plus important, soit 107 615 immigrants temporaires, sont plutôt entrés au Québec par le biais du Programme de mobilité internationale (PMI) qui rassemble sous un même chapeau différents mécanismes d'accueil d'immigrants temporaires qui ne reposent généralement pas sur un mécanisme d'adéquation entre la sélection des travailleurs étrangers et des besoins spécifiques du marché du travail. À titre d'exemple, près de la moitié des détenteurs d'un permis du PMI sont des étudiants étrangers diplômés de collèges ou d'universités canadiennes (41 500 en 2023) qui ont choisi de prolonger leur séjour pour occuper un emploi au Québec.
Comme la grande majorité de ces immigrants temporaires sont très qualifiés, ils représentent donc des candidats privilégiés pour l'immigration permanente. D'une part, ils ont été formés aux standards anticipés par les entreprises québécoises. D'autre part, comme ils sont établis au Québec depuis un certain temps, ils disposent déjà d'un réseau et ont acquis l'expérience nécessaire pour bien s'intégrer.
« Les politiques d'immigration actuelles ne s'alignent pas toujours avec les objectifs du Québec - notamment en matière de création d'emplois de qualité - mais semblent plutôt évoluer au fil d'un cumul de mesures, ce qui donne aujourd'hui l'impression d'une certaine perte de contrôle, souligne Emna Braham. D'où l'importance d'apporter un peu plus de cohérence au processus. La bonne nouvelle, c'est que les leviers existent - en partie à Québec, en partie à Ottawa - pour ajuster ces politiques. »
Mieux anticiper et encadrer l'immigration temporaire : L'immigration temporaire, avec ces divers programmes, ne peut être planifiée à l'aide de seuils comme l'immigration permanente, car elle répond à des objectifs pouvant grandement différer. Il est toutefois possible de mieux les anticiper et les encadrer puisqu'ils résultent toujours d'autorisation donnée par un des deux paliers de gouvernement.
Mieux arrimer les politiques d'immigration permanente et temporaire : Il est essentiel, à chaque étape de la réflexion sur les seuils permanents, d'intégrer une analyse des données sur les volumes, la croissance, les caractéristiques et la composition de l'immigration temporaire.
Mieux arrimer les profils des immigrants temporaires aux secteurs stratégiques du Québec : Un meilleur arrimage devrait être fait entre les programmes d'immigration temporaire et les secteurs d'emplois stratégiques pour le Québec, notamment en santé et en construction.
Améliorer les données sur les immigrants temporaires : Les renseignements administratifs collectés dans le cadre du processus d'immigration pourraient être mis à profit afin de permettre des analyses plus complètes et plus actuelles sur la réalité des immigrants temporaires.
Téléchargez L'impact des immigrants temporaires sur le marché de l'emploi au Québec : mieux comprendre pour mieux agir https://institutduquebec.ca/wp-content/uploads/2023/03/20230309-SWTICH-IDQ-Impacts-pour-economie-verte.pdf
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SOURCE Institut du Quebec
Liette D'Amours, Responsable des relations avec les médias, 514 649-2347, [email protected]
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