L'Association des procureurs aux poursuites criminelles et pénales dénonce le manque criant de ressources - Justice de « brousse » dans le Nord-du-Québec au détriment des victimes
Nouvelles fournies par
ASSOCIATION DES PROCUREURS AUX POURSUITES CRIMINELLES ET PENALES25 févr, 2022, 05:00 ET
QUÉBEC, le 25 févr. 2022 /CNW Telbec/ - L'Association des procureurs aux poursuites criminelles et pénales (APPCP) dénonce le manque de ressources qui crée une véritable justice de « brousse » au Nord-du-Québec. Dans ces bureaux du Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP), la majorité des victimes souffrent d'un accompagnement insuffisant, voire inexistant. La préparation aux procès est compromise parce que les procureurs sont débordés et dépassés par la complexité et la lourdeur des tâches qui leur sont confiées. Ces constats troublants se dégagent d'une enquête réalisée par l'APPCP auprès de ses membres travaillant au Nord-du-Québec.
La consultation menée auprès de 27 procureurs sur 28, soit la quasi-totalité des procureurs des bureaux du DPCP d'Amos, de Rouyn-Noranda et de Val-d'Or qui desservent aussi une vingtaine d'autres communautés via la cour itinérante met en lumière des conditions extrêmement difficiles.
Un système sur le point de céder
Les procureurs œuvrant au Nord-du-Québec ont à autoriser et à gérer plusieurs centaines de poursuites par an, notamment durant les termes de la cour itinérante. La réalité de cette cour nécessite de nombreux déplacements et compromet malheureusement la préparation des procès. À l'image d'un flying circus (c'est ainsi que les communautés ont surnommé le phénomène), les procureurs y font des aller-retour les jours d'audience pour enchaîner les auditions, sans avoir le temps de préparer adéquatement les victimes et les témoins en amont.
Les procureurs sont également débordés et dépassés par la complexité et la lourdeur des dossiers; seulement un répondant sur trois affirme avoir les connaissances et le niveau d'autonomie nécessaires pour accomplir ses tâches.
Dans les bureaux du Nord-du-Québec, le taux de roulement est très important. Il existe une grande difficulté à retenir la main-d'œuvre ce qui fait en sorte que la majorité des procureurs ont moins de cinq ans d'expérience. De plus, il est à noter qu'au bureau d'Amos, la majorité cumule moins de deux ans d'expérience alors que ce sont eux qui desservent la cour itinérante pour les communautés du Grand Nord, là où les besoins sont particulièrement importants et où les dossiers complexes en matière de violence familiale et d'agression sexuelle demandent un haut niveau d'implication et de préparation.
Les pressions sur la santé mentale des procureurs sont lourdes. Les épisodes de détresse liés au travail sont très fréquents : près du tiers des répondants se sont même absentés pour cause d'épuisement au cours des deux dernières années.
De plus, la moitié des répondants sont incapables de prendre des vacances quand ils en ont besoin et près du tiers se sont vu refuser des vacances pour raison de « besoin de service ». Ainsi, la moitié d'entre eux a déjà entamé des démarches concrètes pour changer de point de service ou pour démissionner.
Citations
« Il y a urgence d'agir pour doter le Nord-du-Québec d'un système de justice digne de ce nom. Les victimes de cette région ne doivent pas continuer de subir cette justice de brousse. Il est nécessaire d'ajouter un nombre adéquat de procureurs et de personnel de soutien, d'améliorer la fréquence de la cour itinérante et d'y bonifier l'accompagnement aux victimes. Les besoins sont énormes. Les procureurs lancent un cri d'alarme. »
- Guillaume Michaud, président de l'Association des procureurs aux poursuites criminelles et pénales.
Quelques extraits de l'enquête sur la situation des procureurs dans le Nord-du-Québec
« Ça en est déchirant au point où je ne me souviens pas d'une semaine dans les derniers mois où je n'ai pas vu un ou même plusieurs procureurs pleurer ou avoir les yeux remplis de larmes… »
« Beaucoup de dossiers nous sont remis, sans que nous bénéficiions de l'expérience requise, ou, à la limite, d'un accompagnement adéquat. Je parle principalement de dossiers en matière d'agression sexuelle ou bien de violence sur les enfants. »
« Je perds beaucoup espoir envers le travail qu'on fait. Je sens qu'on n'aide personne, surtout en ce moment. Le service offert est médiocre. »
À propos de l'APPCP
L'APPCP représente les quelque 700 procureurs du Québec œuvrant au sein du DPCP. Elle constitue un acteur incontournable du système de justice criminelle et pénale, au Québec comme au Canada.
SOURCE ASSOCIATION DES PROCUREURS AUX POURSUITES CRIMINELLES ET PENALES
Sabrina Martin, TACT, 418 515-3632, [email protected]
Partager cet article