LOI SUR LA RÉDUCTION DE L'INFLATION AUX ÉTATS-UNIS (IRA) - PERTURBATIONS À L'HORIZON POUR L'ÉCONOMIE VERTE DU QUÉBEC?
MONTRÉAL, le 9 mars 2023 /CNW/ - Avec des investissements de près de 40 milliards de dollars par année dans l'économie verte d'ici 2032, l'Inflation Reduction Act (IRA) adoptée par les Américains en août dernier vise non seulement à accélérer la transition énergétique, mais à rapatrier aussi certaines chaînes d'approvisionnement stratégiques aux États-Unis et dans des juridictions avec qui des accords de libre-échange ont déjà été conclus. Toutefois, à l'analyser de plus près, cette réforme peut à la fois comporter des occasions d'affaires mais aussi des risques pour les entreprises québécoises. Voilà pourquoi les gouvernements québécois et canadiens ont tout intérêt à ajuster leurs politiques s'ils veulent tirer leur épingle du jeu.
Pour mieux comprendre les possibles répercussions de l'IRA sur l'économie verte québécoise, l'Institut du Québec et l'Alliance Switch - qui regroupe des représentants de groupes environnementaux, du milieu des affaires et de la finance - ont analysé les impacts que pourrait avoir cette loi, notamment sur le marché des énergies renouvelables, sur le secteur des minéraux critiques et stratégiques et sur la filière batterie.
« Bien que l'IRA favorise les partenariats nord-américains, il n'est pas dit que les entreprises québécoises pourront systématiquement tirer profit de ce nouveau marché, prévient Emna Braham, directrice générale de l'Institut du Québec (IDQ). Par exemple, l'IRA ne prévoit aucune clause pour restreindre à l'Amérique du Nord l'approvisionnement en véhicules électriques spécialisés et commerciaux tels que les camions et les autobus, une niche dans laquelle le Québec tente de se positionner. »
Par ailleurs, les aides massives que les États-Unis comptent déployer pour stimuler le développement de l'énergie solaire et éolienne pourraient contribuer à accroître de 40 % leur offre en énergie renouvelable au cours de la prochaine décennie. Si bien que le prix de leur énergie devrait diminuer au fil du temps alors que selon les prévisions d'Hydro-Québec, le coût d'approvisionnement en électricité devrait plutôt s'accroître au Québec. Dans ce contexte de concurrence plus vive, il faudra donc penser autrement l'enjeu de l'approvisionnement énergétique au Québec, entre autres, en ce qui concerne la demande industrielle.
Autre enjeu à surveiller : soutenu par des aides gouvernementales, l'hydrogène vert américain pourrait, d'ici dix ans, se vendre deux fois moins cher qu'il n'en coûte actuellement au Québec pour produire ce gaz. Il y a donc fort à parier que cette vente à rabais exercera une forte concurrence sur les marchés. « Reste maintenant à savoir jusqu'où le Québec est prêt à engager des fonds publics pour permettre à cette filière d'être concurrentielle à l'international », souligne Luc Belzile, économiste principal à l'IDQ.
L'IRA pourrait également mettre des bâtons dans les roues du gouvernement québécois qui tente présentement d'attirer un producteur de cellules de batterie et ainsi, compléter l'écosystème exposé dans sa Stratégie québécoise de développement de la filière batterie. À ce chapitre, le Québec se trouvera donc en concurrence directe avec certains États américains qui pourront compter sur des incitatifs supplémentaires pour attirer de tels investissements. Dans un tel contexte, il se peut que le Québec ait avantage à se concentrer sur certains volets de sa Stratégie et à en délaisser d'autres.
Les consommateurs américains de véhicules électriques fabriqués à partir de minéraux critiques extraits au Québec seront aussi admissibles à un généreux crédit d'impôt. « Comme la demande pour de tels minéraux est déjà en forte hausse, il s'agit d'une véritable occasion d'affaires pour le Québec, affirme Denis Leclerc, président et chef de la direction d'Écotech Québec et membre de l'Alliance Switch. Toutefois, pour pleinement en tirer profit, le Québec devra mettre en valeur ses minéraux en les transformant en produits à forte valeur ajoutée, tout en s'assurant du respect des normes environnementales et de l'acceptabilité sociale des projets d'extraction et de transformation. »
« Les investisseurs tiendront aussi de plus en plus compte des facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) dans leur choix de sites et de projets d'exploitation minière, ajoute Martin Vaillancourt, directeur général du Regroupement national des conseils régionaux de l'environnement du Québec et membre de l'Alliance. Voilà pourquoi le Québec a tout avantage à ne pas réduire ses exigences en la matière. Au contraire, les entreprises qui se conforment au cadre québécois pourraient même prendre une longueur d'avance puisque les investisseurs recherchent de plus en plus des organisations avec de bonnes performances ESG.
À la lumière de cette analyse, un constat s'impose : le gouvernement du Québec aura tout intérêt à revoir ses programmes et ses politiques afin d'investir le plus judicieusement et stratégiquement possible dans ce contexte de changement. Certaines options pourraient être moins rentables qu'anticipées alors que de nouvelles opportunités se profilent déjà à l'horizon.
Téléchargez La Loi sur la réduction de l'inflation des États-Unis : Des impacts pour l'économie verte du Québec.
L'Institut du Québec est un organisme à but non lucratif qui axe ses recherches et ses études sur les enjeux socioéconomiques auxquels le Québec fait face. Il vise à fournir aux autorités publiques et au secteur privé les outils nécessaires pour prendre des décisions éclairées, et ainsi contribuer à bâtir une société plus dynamique, compétitive et prospère.
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Fondée en 2013, SWITCH, l'Alliance pour une économie verte, mobilise les organisations issues autant du milieu des affaires et de la finance que des groupes environnementaux afin d'accélérer la transition vers une économie plus verte et plus sobre en carbone. Elle vise à identifier des pistes concertées de solutions pragmatiques et réalistes pour une transition plus juste, plus innovante et plus porteuse pour notre économie. Nous souhaitons un développement des politiques et des interventions de l'État plus cohérent et la convergence des initiatives provenant des secteurs public, privé, associatif, coopératif et mutuel et de la société civile en faveur d'une économie verte.
SOURCE Institut du Quebec
Liette D'Amours, Responsable des relations avec les médias, 514 649-2347, [email protected]
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