Alors qu'elle dénonce chaque hausse de taxes sur le tabac, de nouvelles données de Santé Canada montrent que l'industrie du tabac augmente ses propres prix de montants similaires
MONTRÉAL, le 13 mars 2017 /CNW Telbec/ - Selon de nouvelles données de Santé Canada, l'industrie du tabac a substantiellement augmenté ses prix et, ce, après avoir dénoncé les dernières hausses de taxes, notamment l'augmentation de la taxe fédérale de 4 $ la cartouche en février 2014 et celle de la taxe québécoise de 4 $ en juin 2014, sous prétexte que les prix devenaient trop élevés et entraîneraient une hausse du marché de la contrebande!
Les données québécoises sur le prix de gros des cigarettes (prix du fabricant + taxes d'accise fédérale) montrent que les fabricants de tabac ont augmenté de 4,60 $ le prix moyen d'une cartouche depuis 2014. Toujours selon Santé Canada, les augmentations de prix de 2015 et 2016, à elles seules, « se traduiront par une augmentation des revenus de l'industrie de 156 millions de dollars annuellement ».
Au Québec : des augmentations qui dépassent la dernière hausse de taxes
Par ailleurs, une analyse par la Coalition québécoise pour le contrôle du tabac de factures de ventes des cigarettiers aux détaillants québécois révèle qu'au cours de la dernière année et demie (juillet 2015 à décembre 2016), de nombreuses marques de cigarettes vendues dans la région du Grand Montréal ont vu leur prix de gros augmenter par des montants encore plus substantiels, équivalents ou supérieurs à la dernière hausse de la taxe provinciale (4 $ la cartouche en juin 2014).
Marque |
Augmentation du fabricant |
ITL-Du Maurier |
5,00$ |
ITL-Pall Mall |
1,80$ |
JTI-LD |
4,60$ |
JTI-Export A |
4,70$ |
RBH-Accord |
4,00$ |
RBH-Philip Morris |
4,50$ |
On se rappellera qu'au moment de l'annonce de cette taxe, l'industrie du tabac et ses alliés habituels l'avaient vigoureusement dénoncée, comme ils le font en général pour toute hausse au Québec et à travers le pays, Imperial Tobacco allant jusqu'à qualifier le geste du ministre Leitão de « scandaleux » et d'« irresponsable ».
Hypocrisie exposée
« Pendant qu'elle fait la morale aux gouvernements en invoquant la menace de la contrebande chaque fois qu'il est question de hausser la taxe sur le tabac, l'industrie procède discrètement à augmenter elle-même le prix des cigarettes, souvent par des montants équivalents aux hausses de taxes qu'elle décrie! » s'insurge Flory Doucas, porte-parole de la Coalition québécoise pour le contrôle du tabac. « À en croire l'industrie, l'augmentation du prix de marché des cigarettes constitue un risque pour la contrebande seulement lorsqu'il s'agit d'une hausse des taxes, et jamais lorsqu'elle est provoquée par l'augmentation du prix par le fabricant. C'est de l'hypocrisie pure et simple. »
Soulignons que ni les deux dernières hausses de la taxe provinciale (4 $ en nov. 2012 et en juin 2014), ni la dernière du fédéral (4,03 $ en fév. 2014), ni les augmentations de prix par les fabricants (moyenne de 4,60 $ depuis 2014) n'ont entraîné d'augmentation de la contrebande au Québec qui, selon le budget 2016 du ministère des Finances, se maintient autour de 15 % depuis 2011.
« En brandissant son vieux refrain à l'effet que les hausses de taxes feront resurgir la contrebande, l'industrie alimente la crainte des élus, ce qui freine de nouvelles hausses de taxes, et se positionne pour mieux s'emparer de la marge disponible en augmentant ses propres prix. Il incombe dorénavant aux gouvernements d'ignorer les propos alarmistes des fabricants et de leurs porte-étendard, et de procéder de manière à prélever par la taxation l'entièreté de la marge disponible au lieu de la laisser gonfler encore plus les profits des multinationales du tabac. »
Perte de revenus publics
Pendant qu'elle prétend se préoccuper de santé publique en plaidant qu'une nouvelle hausse de taxes « inciterait les consommateurs québécois à opter pour le marché illégal et par conséquent minerait tous les gains réalisés à ce jour », l'industrie s'approprie des sommes qui auraient dû revenir à l'État par la voie fiscale.
« La marge disponible pour augmenter les prix devrait aller aux contribuables puisque c'est à eux qu'est refilée la facture colossale des soins de santé attribuables au tabac, » explique la porte-parole. En effet, les revenus découlant de la taxe québécoise ne suffisent toujours pas à défrayer les 1,6 milliard $ en soins de santé causés par les produits de l'industrie du tabac, même en tenant compte d'une prochaine hausse substantielle. (Notons que les 1,1 milliard $ générés par la taxe spécifique sur le tabac du Québec proviennent de la poche des fumeurs et non de celle de l'industrie!)
Groupes-façade pour entretenir la propagande liée à la contrebande
La Coalition tient à rappeler qu'un document interne d'Imperial Tobacco récemment obtenu par l'entremise d'un sonneur d'alerte anonyme démontre que l'industrie instrumentalise l'enjeu de la contrebande dans le cadre d'une vaste stratégie de relations publiques ayant pour objectif de refroidir toute volonté politique à augmenter les taxes. Le document confirme également que certaines associations « de détaillants » œuvrant au Québec ne sont en réalité que des groupes-façade de l'industrie mis sur pied pour déployer cette stratégie. Il s'agit de l'Association canadienne/québécoise des dépanneurs en alimentation et de la Coalition nationale contre le tabac de contrebande.
Pour voir le communiqué en PDF, avec graphique et références complètes, cliquer ici :
http://www.cqct.qc.ca/Communiques_docs/2017/PRSS_17_03_13_Industrie_a_augmente_ses_prix.pdf
À propos: Quelque 470 organisations québécoises -- associations médicales, ordres professionnels, municipalités, hôpitaux, écoles, commissions scolaires, etc., ont endossé les mesures destinées à réduire le tabagisme et ses conséquences réclamées par la Coalition québécoise pour le contrôle du tabac. Fondée en 1996, les principaux objectifs de la Coalition incluent prévenir l'initiation au tabagisme, favoriser l'abandon, protéger les non-fumeurs contre la fumée secondaire et obtenir un cadre législatif qui reflète la nature néfaste et toxicomanogène du tabac. La CQCT est une initiative de l'Association pour la santé publique du Québec.
SOURCE Coalition québécoise pour le contrôle du tabac
Entrevues: Mme Flory Doucas, codirectrice et porte-parole, CQCT : 514-598-5533; 514-515-6780 (cell.)
Partager cet article