Déclaration du chef du Parti Québécois - Avant de tout miser sur une guerre commerciale contre les États-Unis, quelques questions et quelques propositions
QUÉBEC, le 2 févr. 2025 /CNW/ - Alors qu'il y a 10 jours à peine, François Legault prônait de garder la tête froide, le premier ministre du Québec indiquait hier sur les médias sociaux qu'il allait « se battre » contre Donald Trump dans le cadre d'une guerre commerciale que nous n'avons certes pas choisie, mais qui, rappelons-le, nous oppose à une économie 30 fois plus grande que celle du Québec.
Dès le 9 janvier, nous avons offert au gouvernement du Québec de former une Équipe Québec qui inclurait les oppositions, les acteurs économiques et les experts de sorte à parler d'une seule voix et coordonner les préoccupations comme les propositions. La CAQ a balayé du revers de la main cette proposition et a préféré mener les négociations seule, ce qui n'a pas empêché le Parti Québécois de faire des propositions. Constatant que nous ne disposons d'aucune information de la part du gouvernement et que les actions de la CAQ demeurent très opaques, nous souhaitons éviter les erreurs de la pandémie de même que prévenir les décisions précipitées qui pourraient causer plus de tort que d'apaisement de la situation. Voici donc un certain nombre de constats et de questions fondamentales qu'il faut collectivement se poser dans les circonstances, de même que des propositions du Parti Québécois en ce sens.
LES CONSTATS
- La première vague de contre-tarifs annoncés hier par le gouvernement du Canada ne représente que le 1/10 de la valeur de nos importations des États-Unis. Il ne s'agit donc pas d'une mesure aussi forte que ce qu'on a bien voulu nous présenter hier; cette première phase n'entraînera pas nécessairement une onde de choc ni de grandes remises en question immédiates aux États-Unis. Les revenus générés par ces tarifs ne suffiront bien évidemment pas à pallier les pertes générées par cette guerre commerciale.
- Nous ne savons toujours pas ce qu'il est advenu de la demande de François Legault à l'effet que les tarifs soient redistribués pour soutenir les entreprises dans chaque province plutôt que d'être versés dans le budget consolidé du gouvernement du Canada.
- La question est essentielle, car Québec vient de faire le pire déficit de son histoire à 11 milliards, notamment parce que la CAQ a dépensé sans compter au cours des dernières années. Ce déficit est grave au point d'amener le gouvernement à faire des coupures dans toutes les directions depuis quelques mois en santé, en éducation et dans les services sociaux. Le Québec n'a donc pas de marge de manœuvre et risque de voir ses revenus diminuer en cas de récession. Augmenter ce déficit pourrait causer une décote du Québec, ce qui nous entraînerait dans une spirale vers le bas dans le cadre de laquelle notre coût d'emprunt ne cessera d'augmenter.
- Bâtir des barrages et d'autres projets d'Hydro-Québec n'est pas une solution immédiate et directe à une éventuelle crise économique que la situation actuelle pourrait provoquer. L'affirmation de François Legault hier, à l'effet que « l'immense chantier d'Hydro Québec va nous aider à créer des emplois qui vont remplacer ceux qui sont perdus » ne tient pas la route. Il faut compter un minimum de 5 ans avant que se crée un seul emploi dans des projets d'infrastructure de cette nature. Stimuler les projets énergétiques n'est pas pour autant une mauvaise idée, mais ce n'est donc pas un plan de match si des difficultés économiques surviennent à court terme.
- Même constat pour l'affirmation « On va aussi regarder la possibilité d'augmenter nos investissements dans les infrastructures ». D'ailleurs, il faut rappeler que le projet de loi d'accélération des projets d'infrastructures durant la pandémie n'a pas donné les résultats escomptés.
- Une escalade des tarifs entraînera en toute probabilité le retour de l'inflation, avec les conséquences qu'on connaît sur le consommateur québécois.
LES PROPOSITIONS DU PARTI QUÉBÉCOIS
- Agir rapidement pour diversifier nos marchés, notamment en lançant le plus rapidement possible des missions commerciales « Équipe Québec » pour diversifier nos partenaires commerciaux et nos exportations : le PQ martèle depuis trois semaines maintenant qu'il faut urgemment envoyer nos entreprises dans des missions commerciales pour diversifier leur clientèle. On ne peut tout miser sur la régularisation de notre situation avec les Américains, il faut donc rapidement demander la collaboration d'autres nations qui peuvent nous offrir de nouveaux marchés.
- Inciter fiscalement les entreprises à diversifier leurs exportations en rendant leurs nouveaux revenus d'exportations non imposables.
- Réduire le fardeau fiscal des PME afin de créer un environnement plus compétitif pour l'ensemble des entrepreneurs.
- Investir 100% des recettes tarifaires pour aider à la compétitivité des entreprises et des travailleurs concernés. Le fédéral doit nous donner l'assurance non seulement que les contre-tarifs canadiens n'auront pas un impact disproportionné pour le Québec, mais aussi que les recettes de ces contre-tarifs canadiens seront réparties dans les provinces.
- Adopter rapidement un grand plan de réduction de la paperasse, de la surrèglementation et des contrôles administratifs au bénéfice de nos entreprises québécoises, comme le Parti Québécois l'a proposé à plusieurs reprises au cours des dernières années.
- Éviter de reprendre l'approche des subventions tous azimuts de la pandémie. Lorsque François Legault affirme qu'« on va aider nos entreprises touchées », la question qui se pose est : allons-nous retomber dans un modèle de subventions mur à mur, avec des critères opaques, comme durant la pandémie? Où sont allés les 10M$ à Birks, les centaines de millions à des compagnies bidon et fantômes, des sommes qu'on n'a même pas tenté de recouvrer ? Subventionner tous azimuts les entreprises alors que les revenus de l'État seront en baisse n'est pas une avenue, et ne permettra pas aux entreprises de réorienter leurs efforts non plus. Cette approche a donné lieu à beaucoup d'abus durant la pandémie, rappelons-le.
- Encourager le consommateur québécois à choisir le plus de produits québécois possible au détriment des produits américains. Les épiceries et les magasins de détail pourraient entre autres faciliter cette démarche en identifiant mieux les produits américains à l'aide d'un drapeau étiqueté.
- Adopter rapidement une réelle politique nationale d'achat québécois en appliquant le principe de réciprocité (si nos voisins favorisent l'achat local de certains produits, nous avons aussi le droit de le faire).
- Doter le Québec d'une politique qui vise la réindustrialisation de notre économie, en identifiant les catégories de produits importés pour lesquels la fabrication au Québec pourrait se substituer en étant économiquement viable. Pour le bois d'œuvre et les pêches, notamment, développer rapidement une stratégie de commercialisation visant à favoriser la 2e et 3e transformation.
- Favoriser les entreprises québécoises dans les contrats publics.
Les mesures tarifaires initiées par les États-Unis sont sans aucun doute injustes, illégales et disproportionnées. Nul doute que nous devons riposter, mais avant de tout mettre nos œufs dans le panier d'une hypothèse que nous gagnerons une guerre tarifaire contre les États-Unis, agissons rapidement sur ce que nous pouvons faire pour aider nos entreprises à se trouver de nouveaux partenaires et à s'adapter à ce nouveau contexte.
- Paul St-Pierre Plamondon, député de Camille-Laurin et chef du Parti Québécois
SOURCE Aile parlementaire du Parti Québécois
SOURCE : Emmanuel Renaud, Attaché de presse, Aile parlementaire du Parti Québécois, (418) 720-5717, [email protected]
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