Enquête indépendante sur l'événement survenu à Montréal le 18 mai 2024 : le DPCP ne portera pas d'accusation
QUÉBEC, le 16 janv. 2025 /CNW/ - Après examen du rapport produit par le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI), le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) conclut que l'analyse de la preuve ne révèle pas la commission d'une infraction criminelle par les policiers du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM).
L'analyse portait sur l'événement survenu à Montréal le 18 mai 2024 entourant le décès d'une femme.
L'examen du rapport d'enquête préparé par le BEI a été confié une procureure aux poursuites criminelles et pénales (procureure). Cette dernière a procédé à un examen complet de la preuve afin d'évaluer si à la lumière de la preuve retenue, celle‑ci révèle la commission d'infractions criminelles. La procureure a rencontré et informé les proches de la personne décédée des motifs de la décision.
Événement
Le 17 mai 2024 vers 17 h 27, une femme est arrêtée par les agents du SPVM pour possession de stupéfiants dans le but d'en faire le trafic. Lors du transport de la femme vers le poste de police, cette dernière est calme et collabore avec les agents. Suivant les formalités administratives entourant son arrestation, la femme est conduite vers 18 h 20 à un centre opérationnel de Montréal afin d'être détenue jusqu'à sa comparution fixée le lendemain.
Lors de sa détention, les agents responsables de la surveillance des cellules effectuent des rondes de surveillance dans le bloc cellulaire à des intervalles d'environ 30 minutes et rien de particulier n'est signalé. Durant la nuit et tôt le matin du 18 mai, la femme est couchée sur le banc de la cellule sous une couverture et se repositionne à quelques reprises. Plus tard dans la journée, elle se retrouve agenouillée sur le plancher avec le haut du corps en appui sur le banc; elle est de nouveau abriée par une couverture.
Vers 14 h 06, les agents se présentent à la cellule de la femme pour l'informer de sa comparution. À leur arrivée, les agents découvrent le corps de la femme inanimé. Des manœuvres sont effectuées par les agents pour lui porter secours. Un appel est fait au 911 afin d'obtenir une ambulance. Les premiers répondants arrivent en premier sur les lieux, suivis des paramédics. Les deux groupes effectuent des manœuvres de réanimation et de premiers soins, sans succès.
Le décès est prononcé à distance à 15 h 10.
Lors de l'autopsie, des substances intoxicantes sont retrouvées dans le cops de la femme. Ces substances ont contribué à son décès dont la cause est attribuable à une polyintoxication aux drogues d'abus.
Analyse du DPCP
La preuve au dossier d'enquête ne permet pas de conclure que les policiers impliqués ont fait preuve de négligence criminelle causant la mort.
En matière de négligence criminelle, il est interdit à une personne d'accomplir un geste ou d'omettre de poser un geste que la loi exige qu'il pose, lorsque cela montre une insouciance déréglée ou téméraire à l'égard de la vie ou de la sécurité d'autrui.
La simple négligence dans l'accomplissement d'un acte, ou le fait de ne pas remplir une obligation imposée par la loi, sont toutefois insuffisants pour conclure à la négligence criminelle. La conduite doit représenter « un écart marqué et important par rapport à la conduite d'une personne raisonnablement prudente », en l'occurrence, un policier placé dans la même situation, distinguant ainsi la faute civile de la faute criminelle.
Par ailleurs, la négligence criminelle ne constitue pas une infraction autonome. La négligence, pour être de nature criminelle, doit conduire à la mort ou à des lésions corporelles. De plus, toute forme de contribution à la mort ou aux lésions corporelles n'est pas criminelle. Pour être punissables, les gestes ou les omissions doivent avoir contribué de façon appréciable, c'est-à-dire plus que mineure aux lésions corporelles ou encore au décès d'une autre personne.
L'analyse de l'ensemble de la preuve au dossier d'enquête révèle que la femme a eu un malaise lorsque se trouvait seule dans sa cellule sous sa couverture. La position dans laquelle elle se trouvait pouvait laisser croire aux divers agents responsables de patrouiller qu'elle dormait. À son arrivée au poste, elle se déplaçait normalement et les témoins indiquent qu'elle était calme. La preuve disponible ne pouvait laisser entrevoir qu'elle éprouverait un problème de santé.
Conséquemment, à la suite de son analyse, le DPCP est d'avis que la preuve ne révèle pas la commission d'une infraction criminelle par les policiers du SPVM impliqués dans cet événement.
Le Directeur des poursuites criminelles et pénales
Le DPCP fournit, au nom de l'État, un service de poursuites criminelles et pénales indépendant de toute considération de nature politique, et ce, de façon à préserver l'intégrité du processus judiciaire tout en assurant la protection de la société, dans la recherche de l'intérêt de la justice et de l'intérêt public, de même que dans le respect de la règle de droit et des intérêts légitimes des personnes victimes et des témoins.
Chaque dossier soumis au DPCP est analysé avec rigueur et impartialité. La norme qui guide les procureurs concernant l'opportunité d'entreprendre une poursuite est prévue à la directive ACC-3. En droit criminel, le fardeau de la preuve que doit satisfaire la poursuite est très exigeant. En raison du principe de la présomption d'innocence, la poursuite doit en effet faire une démonstration hors de tout doute raisonnable de la culpabilité de l'accusé devant le tribunal.
La décision de poursuivre ou non est une décision discrétionnaire prise par le procureur dans l'exécution de ses obligations professionnelles sans crainte d'ingérence judiciaire ou politique et sans céder à la pression médiatique. Par ailleurs, ce n'est pas la tâche du procureur de se prononcer sur une possible faute civile ou déontologique. Il ne cherche que les éléments lui permettant de conclure qu'un acte criminel a été commis et de déterminer s'il peut raisonnablement en faire la preuve. Il ne lui appartient pas non plus de formuler des commentaires ou des recommandations concernant les méthodes d'intervention policière.
La publication des motifs qui étayent la décision de ne pas porter d'accusation dans certains dossiers revêt un caractère exceptionnel et s'appuie sur des lignes directrices.
SOURCE Directeur des poursuites criminelles et pénales
Source : Me Patricia Johnson, Porte-parole adjointe, Directeur des poursuites criminelles et pénales, 418 643-4085, [email protected]
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