Vapotage chez les jeunes : Coalition, experts, pédiatres et parents optimistes face à l'ouverture du ministre mais attendent avec impatience que le gouvernement passe à l'action
MONTRÉAL, le 9 déc. 2020 /CNW Telbec/ - Ce matin par l'entremise d'un communiqué de presse, le ministre de la Santé Christian Dubé a manifesté son ouverture quant à l'interdiction des saveurs (hormis celle au tabac) dans les produits de vapotage ainsi que l'imposition d'une limite de 20 mg/ml pour la concentration en nicotine dans le but de combattre le vapotage chez les jeunes, un phénomène inquiétant qui, selon Santé Canada, a substantiellement augmenté auprès des élèves du secondaire du Québec. Le ministre n'a pas fourni plus de détails ni d'échéancier précis pour le déclenchement d'un processus réglementaire ou législatif autre que de compter s'y attarder « rapidement » pour ce qui est de ces deux mesures.
« L'ouverture du ministre envers l'interdiction des saveurs et des concentrations en nicotine s'avère décidément positive. Une fois mises en œuvre, ces deux mesures auront un impact immédiat et considérable sur l'engouement des jeunes face au vapotage » dit Flory Doucas, codirectrice et porte-parole de la Coalition québécoise pour le contrôle du tabac. En effet, « interdire les saveurs et limiter le taux de nicotine à 20mg/ml font l'objet d'un consensus généralisé parmi les chercheurs et les groupes de santé depuis un bon moment, les saveurs étant le facteur numéro un expliquant l'attrait de ces produits chez cette cohorte et les concentrations extrêmement élevées de nicotine provoquant une dépendance plus puissante et plus rapide que les cigarettes conventionnelles. »
Kévin Roy, président de la Fédération des comités de parents du Québec, ajoute : « Les parents sont très conscients de leur rôle de première ligne face à l'éducation de leurs enfants, notamment au niveau des comportements dommageables à leur santé. Cela dit, les parents ne sont pas toujours en mesure de faire contrepoids aux techniques de marketing sophistiquées et insidieuses de l'industrie du vapotage. C'est pourquoi nous applaudissons l'ouverture du gouvernement du Québec d'interdire les saveurs dans les produits de vapotage et d'en limiter le contenu en nicotine, tout en l'exhortant d'agir rapidement pour que ces mesures s'appliquent le plus tôt possible. »
Dr Nicholas Chadi, pédiatre et clinicien-chercheur spécialisé en médecine de l'adolescence et en toxicomanie au CHU de Sainte-Justine et porte-parole de l'Association des Pédiatres du Québec, renchérit « Bien que je suis rassuré par les propos du ministre, j'espère voir des mesures concrètes et applicables dans les prochains mois. On sait depuis des décennies que la nicotine crée une forte dépendance et je vois chaque jour dans ma pratique des adolescents qui ont de grandes difficultés à cesser ou diminuer leur consommation de produits de vapotage. Agir en amont avec des mesures préventives robustes, c'est primordial. »
Dr Richard Bélanger, médecin de l'adolescence, clinicien-chercheur au CHU de Québec-Université Laval, et lauréat 2020 du Prix Victor Marchessault de défense des enfants de la Société canadienne de pédiatrie ajoute que : « les première études indiquant que le vapotage est associé à une augmentation du risque de tabagisme chez les jeunes sont apparues dans les revues scientifiques dès 2017, il y a maintenant plus de trois ans. Aujourd'hui, une méta-analyse précise que vapoter peut jusqu'à tripler le risque de fumer, une récente étude chiffrant cette probabilité à plus de quatre fois. Dans certaines écoles secondaires du Québec, c'est près du tiers des jeunes qui vapotent. Plus la mise en œuvre de ces mesures tarde, plus il y aura de jeunes aux prises avec ce comportement délétère pour la santé sur plus d'un aspect. Je salue l'annonce d'aujourd'hui, mais il faut passer aux actions concrètes le plus rapidement possible. »
Dr Sean Gilman, professeur adjoint à la Faculté de médecine de l'Université McGill et directeur du programme d'abandon du tabac au Centre universitaire de santé McGill explique « bien que la cigarette électronique pourrait aider certains de mes patients adultes, ces produits sont hautement déconseillés pour les non-fumeurs et n'ont pas encore démontré leur efficacité comme outil de cessation tabagique chez les adolescents. Je demeure fortement préoccupé par l'engouement des jeunes pour le vapotage avec nicotine car, en plus d'entrainer une forte dépendance, ces produits engendrent toute une gamme d'autres risques pour la santé pulmonaire et cardiaque. »
Rapport du Groupe spécial d'intervention
L'annonce de ce matin a été accompagnée par la publication du rapport du directeur national de Santé publique, Dr Horacio Arruda, qui présente sept principales recommandations qui font état, entre autres, des constats du « groupe spécial d'intervention » mis sur pied le 25 novembre 2019 et dont les travaux se sont terminés au printemps dernier. Sans surprise, les recommandations du directeur s'arriment avec celles proposées par le Conseil des médecins en chef du Canada en janvier 2020, celles mises de l'avant par la Coalition dans un mémoire détaillé déposé en mars dernier, et celles incluses dans les lettres envoyées au ministre par plus de 130 autres organisations et intervenants scolaires, communautaire et en santé.
« Ces recommandations renforcent encore davantage l'urgence de passer à l'action pour protéger les jeunes contre le vapotage, notamment en s'attardant sur les produits eux-mêmes, » ajoute Flory Doucas. « Le temps des consultations, des réflexions et des analyses est maintenant révolu. Il est difficile de justifier pourquoi on devrait encore attendre avant d'entamer le processus réglementaire ou législatif étant donné que de nombreuses juridictions, au Canada comme ailleurs, ont déjà interdit les saveurs, limité le taux de nicotine et diminué l'abordabilité pour les jeunes par la taxation. »
Réaction de l'industrie
Le 30 novembre dernier, l'Association canadienne du vapotage, qui représente les fabricants et boutiques de vapotage, a déclaré que limiter la teneur en nicotine et interdire les saveurs seraient malavisés, prétendant que la solution serait de restreindre « la vente aux magasins spécialisés dont l'accès est limité aux 18 ans et plus » pour ainsi éliminer les « points d'accès pour les jeunes ». Or, le phénomène du vapotage chez les jeunes a commencé bien avant la légalisation des cigarettes électroniques en mai 2018, alors que le marché était majoritairement composé de boutiques de vapotage spécialisées (illégales mais tolérées) qui, en principe, devaient refuser l'accès aux mineurs. De plus, une enquête effectuée en février et juin 2019 pour le compte de Santé Canada révèle que les boutiques spécialisées constituent pour les mineurs une principale source d'approvisionnement. Enfin, Santa Canada a effectué plus de 3 000 inspections en 2019 auprès des points de vente de produits de vapotage, et a constaté qu'en ce qui concerne les boutiques spécialisées, les types de non-conformité les plus fréquents étaient la promotion du vapotage par l'entremise d'attestations ou de témoignages et la vente de saveurs illégales, soit celles qui sont particulièrement attrayantes pour les jeunes, tout en constant que les « taux de non-conformité [étaient] élevés ».
À la lumière de tels constats, il serait important d'intervenir également sur les points de vente et le prix. En effet, « nous espérons voir adoptées une série de mesures, en plus de celles qui retiennent l'attention du ministre, et ce rapidement, car chaque jour permet à l'industrie de recruter de nouveaux jeunes qui tombent dans le piège insidieux de la dépendance à la nicotine, » conclut la porte-parole.
SOURCE Coalition québécoise pour le contrôle du tabac
Contact et information: Flory Doucas: 514-515-6780; [email protected]; Dr Nicholas Chadi : : via le service de communications de l'Hôpital Sainte-Justine au [email protected]; Dr Richard Bélanger : via le service de communications du CHU de Québec au [email protected] ou 418-525-4387 ; Dr Sean Gilman : via le service de communications du CUSM au [email protected] ou 514-843-1560; Kévin Roy, via le service de communications de la FCPQ au [email protected] ou 581-985-7137
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