Enquête indépendante sur l'événement survenu à Dorval le 29 avril 2022 : le DPCP ne portera pas d'accusation
QUÉBEC, le 5 déc. 2023 /CNW/ - Après examen du rapport produit par le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI), le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) conclut que l'analyse de la preuve ne révèle pas la commission d'une infraction criminelle par les policiers du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM).
L'analyse portait sur l'événement survenu à Dorval le 29 avril 2022 à la suite duquel le décès d'un homme a été constaté peu de temps après.
L'examen du rapport d'enquête préparé par le BEI a été confié à une procureure aux poursuites criminelles et pénales (procureure). Cette dernière a procédé à un examen complet de la preuve afin d'évaluer si à la lumière de la preuve retenue, celle‑ci révèle la commission d'infractions criminelles. La procureure a rencontré et informé les proches de la personne décédée des motifs de la décision.
Le 29 avril 2022, à 23 h 16, deux policiers du SPVM circulent à bord d'un véhicule de patrouille sur l'avenue Dorval. Ils constatent la présence d'un homme qui marche sur le trottoir de manière chambranlante. L'homme tient dans ses mains une bouteille transparente qui s'apparente à une bouteille d'alcool fort. Il échappe celle-ci à quelques reprises.
L'homme quitte le trottoir qui longe l'avenue où circule le véhicule de patrouille pour emprunter une voie piétonnière. Un des policiers constate que l'homme porte ses mains à son pantalon comme s'il allait les retirer.
À ce moment, les policiers immobilisent leur véhicule de patrouille et se dirigent à pied vers l'homme. Ils interpellent celui-ci pour faire cesser des comportements d'incivilité et pour vérifier son état général.
Les policiers constatent que l'homme vient tout juste de déféquer sur la pelouse adjacente au passage piétonnier. Questionné par les policiers, l'homme explique qu'il séjourne dans un hôtel et qu'il compte prendre un taxi pour y retourner. Un des policiers lui demande de vider sa bouteille d'alcool avant de poursuivre son chemin. L'homme obtempère sans réticence. Constatant que les vêtements de l'homme sont souillés, un policier lui suggère d'aller se laver dans une station d'essence située à proximité avant de prendre un taxi en direction de son hôtel.
Les policiers ne donnent pas de constat d'infraction pour les contraventions constatées aux règlements municipaux; ils préfèrent donner un avertissement verbal à l'homme.
Tout au long de l'interpellation policière, l'homme est coopératif. Malgré une démarche chambranlante et une allocution légèrement pâteuse qui laissent croire aux policiers qu'il est intoxiqué par l'alcool, l'homme s'exprime bien et est cohérent et orienté dans l'espace. Il ne présente aucune blessure et ne tient aucun propos inquiétant.
À 23 h 26, les policiers quittent l'homme, retournent dans leur véhicule de patrouille et reprennent la route.
À 23 h 34, un appel est fait au 911 concernant un accident ferroviaire survenu à la gare Dorval, lors duquel un homme a été frappé par un train.
À 23 h 35, plusieurs agents de police sont réquisitionnés sur le lieu de l'accident en plus des services médicaux d'urgence. Parmi eux se trouvent les deux policiers qui avaient procédé à l'interpellation de l'homme près de l'avenue Dorval.
À 00 h 02, le corps de la personne impliquée dans l'accident ferroviaire est retrouvé inerte sur le bord de la voie ferrée. Les deux agents de police identifient celui-ci comme étant l'homme ayant fait l'objet de l'interpellation survenue plus tôt.
À 1 h 25, un médecin émet un constat de décès à l'égard de l'homme.
Selon les témoins de l'accident et les enregistrements vidéo captés par une caméra située sur le train impliqué dans l'événement, l'homme se trouvait seul sur le bord du quai de la gare. À l'arrivée du train, il a marché en direction du chemin de fer. Alors qu'il se trouvait au niveau des rails du chemin de fer, l'homme s'est immobilisé et a levé la tête en direction de la locomotive qui se dirigeait vers lui. La collision est survenue à cet instant.
La preuve révèle que l'accident ferroviaire n'est aucunement relié à l'intervention policière menée plus tôt en soirée auprès de l'homme. Par ailleurs, lors de l'intervention policière, l'homme n'a manifesté aucun comportement ni parole qui permettaient aux policiers de croire que l'homme présentait un danger pour lui-même ou pour autrui. De même, son état de santé général n'était pas inquiétant selon les observations des policiers.
Finalement, les policiers sont intervenus rapidement lorsque l'accident est survenu, en collaboration avec les services médicaux d'urgence.
À la suite de son analyse, le DPCP est d'avis que la preuve ne révèle pas la commission d'une infraction criminelle par les policiers du SPVM impliqués dans cet événement.
Le DPCP fournit, au nom de l'État, un service de poursuites criminelles et pénales indépendant de toute considération de nature politique, et ce, de façon à préserver l'intégrité du processus judiciaire tout en assurant la protection de la société, dans la recherche de l'intérêt de la justice et de l'intérêt public, de même que dans le respect de la règle de droit et des intérêts légitimes des personnes victimes et des témoins.
Chaque dossier soumis au DPCP est analysé avec rigueur et impartialité. La norme qui guide les procureurs concernant l'opportunité d'entreprendre une poursuite est prévue à la directive ACC-3. En droit criminel, le fardeau de la preuve que doit satisfaire la poursuite est très exigeant. En raison du principe de la présomption d'innocence, la poursuite doit en effet faire une démonstration hors de tout doute raisonnable de la culpabilité de l'accusé devant le tribunal.
La décision de poursuivre ou non est une décision discrétionnaire prise par le procureur dans l'exécution de ses obligations professionnelles sans crainte d'ingérence judiciaire ou politique et sans céder à la pression médiatique. Par ailleurs, ce n'est pas la tâche du procureur de se prononcer sur une possible faute civile ou déontologique. Il ne cherche que les éléments lui permettant de conclure qu'un acte criminel a été commis et de déterminer s'il peut raisonnablement en faire la preuve. Il ne lui appartient pas non plus de formuler des commentaires ou des recommandations concernant les méthodes d'intervention policière.
La publication des motifs qui étayent la décision de ne pas porter d'accusation dans certains dossiers revêt un caractère exceptionnel et s'appuie sur des lignes directrices.
SOURCE Directeur des poursuites criminelles et pénales
Source : Me Patricia Johnson, Porte-parole adjointe, Directeur des poursuites criminelles et pénales, 418 643-4085, [email protected]
Partager cet article