Enquête indépendante sur l'événement survenu à La Tuque le 6 juin 2023 : le DPCP ne portera pas d'accusation
QUÉBEC, le 13 juin 2024 /CNW/ - Après examen du rapport produit par le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI), le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) conclut que l'analyse de la preuve ne révèle pas la commission d'une infraction criminelle par les policiers de la Sûreté du Québec (SQ).
L'analyse portait sur l'événement entourant le décès d'un homme à La Tuque le 6 juin 2023.
L'examen du rapport d'enquête préparé par le BEI a été confié à une procureure aux poursuites criminelles et pénales (procureure). Cette dernière a procédé à un examen complet de la preuve afin d'évaluer si à la lumière de la preuve retenue, celle‑ci révèle la commission d'infractions criminelles. La procureure a rencontré et informé les proches de la personne décédée des motifs de la décision.
Le 6 juin 2023, deux policiers de la SQ, munis de deux mandats d'arrestation relatifs à diverses accusations, se rendent à la résidence d'un homme à La Tuque. Il est convenu qu'il lui sera offert de se rendre au poste de police où il sera mis en état d'arrestation. Les policiers tenteront de l'interroger et il sera libéré avec des conditions à la suite de sa comparution devant un juge en après-midi.
Sur les lieux, le numéro de téléphone en possession des policiers pour contacter l'homme est hors service et l'un d'eux cogne à la porte de la résidence. Un proche de l'homme leur ouvre la porte et l'un des policiers demande à parler à l'homme. Celui-ci se présente peu après en fauteuil roulant et une fois à l'extérieur, seul avec l'homme, les policiers se présentent et l'un d'eux l'informe qu'ils sont là pour procéder à son arrestation conformément à deux mandats d'arrestation.
Ce policier fait la lecture des deux mandats et des chefs d'accusation. Le policier lui propose de l'accompagner, en conduisant toutefois son véhicule adapté, au poste de police où il sera placé en état d'arrestation. Le policier ajoute qu'ils discuteront ensuite avec lui, qu'il comparaîtra devant un juge et sera remis en liberté avec des conditions à respecter.
Le policier explique à l'homme qu'il n'est pas obligé de les suivre au poste et que dans ce cas, un mandat d'entrée sera obtenu pour pouvoir procéder à son arrestation à sa résidence. L'homme est informé de ses droits constitutionnels. Il est calme et consent à se rendre au poste de police. L'homme retourne ensuite à l'intérieur de la résidence afin de se préparer. Les policiers attendent dans le véhicule banalisé.
L'homme sort de nouveau et monte dans son véhicule adapté afin de se rendre jusqu'au poste de police, suivi par les enquêteurs dans leur véhicule.
Les deux véhicules arrivent au poste de police vers 9 h 02. Les policiers s'approchent du véhicule adapté pour accompagner l'homme jusqu'à l'intérieur du poste. Environ dix minutes après leur arrivée, l'homme est toujours à l'intérieur de son véhicule. Les policiers croient jusque-là que l'homme parle avec un avocat. Les portes sont verrouillées. Les policiers ne sont pas en mesure de voir à l'intérieur du véhicule en raison des vitres teintées et de la fumée causée par les feux de forêt en cours. L'un des policiers croit entendre un bruit court et sourd venant de l'intérieur du véhicule, mais il est possible qu'il provienne d'une usine avoisinante. Vers 9 h 18, ce policier cogne très fort sur une fenêtre du véhicule.
Vers 9 h 27, pendant que l'un des policiers consulte une supérieure à l'intérieur du poste, l'autre policer constate le reflet d'une substance liquide à l'intérieur du véhicule. Celui-ci conclut qu'il s'agit fort possiblement d'une tache de sang. Il brise donc la fenêtre du côté passager à l'aide d'un poinçon. Une ambulance est demandée sur les lieux. Les policiers constatent que l'homme est couché sur le plancher avec une blessure grave au visage vraisemblablement causée par le tir d'une arme à feu. Des manœuvres de réanimation sont entreprises dans l'attente de l'arrivée des ambulanciers. La pathologiste conclut que le décès est attribuable à un traumatisme craniocérébral par arme à feu. Selon elle, ses observations sont compatibles avec l'automanipulation du type d'arme à feu qui aurait été utilisée.
La preuve révèle également que l'homme a transmis un courriel à un proche vers 9 h 15 contenant des propos permettant de conclure à une décision de mettre fin à ses jours.
À la suite de son analyse, le DPCP est d'avis que la preuve ne révèle pas la commission d'une infraction criminelle par les policiers de la SQ impliqués dans cet événement.
Le DPCP fournit, au nom de l'État, un service de poursuites criminelles et pénales indépendant de toute considération de nature politique, et ce, de façon à préserver l'intégrité du processus judiciaire tout en assurant la protection de la société, dans la recherche de l'intérêt de la justice et de l'intérêt public, de même que dans le respect de la règle de droit et des intérêts légitimes des personnes victimes et des témoins.
Chaque dossier soumis au DPCP est analysé avec rigueur et impartialité. La norme qui guide les procureurs concernant l'opportunité d'entreprendre une poursuite est prévue à la directive ACC-3. En droit criminel, le fardeau de la preuve que doit satisfaire la poursuite est très exigeant. En raison du principe de la présomption d'innocence, la poursuite doit en effet faire une démonstration hors de tout doute raisonnable de la culpabilité de l'accusé devant le tribunal.
La décision de poursuivre ou non est une décision discrétionnaire prise par le procureur dans l'exécution de ses obligations professionnelles sans crainte d'ingérence judiciaire ou politique et sans céder à la pression médiatique. Par ailleurs, ce n'est pas la tâche du procureur de se prononcer sur une possible faute civile ou déontologique. Il ne cherche que les éléments lui permettant de conclure qu'un acte criminel a été commis et de déterminer s'il peut raisonnablement en faire la preuve. Il ne lui appartient pas non plus de formuler des commentaires ou des recommandations concernant les méthodes d'intervention policière.
La publication des motifs qui étayent la décision de ne pas porter d'accusation dans certains dossiers revêt un caractère exceptionnel et s'appuie sur des lignes directrices.
SOURCE Directeur des poursuites criminelles et pénales
Source : Me Patricia Johnson, Porte-parole adjointe, Directeur des poursuites criminelles et pénales, 418 643-4085, [email protected]
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