Enquête indépendante sur l'événement survenu à Longueuil le 3 septembre 2022 : le DPCP ne portera pas d'accusation
QUÉBEC, le 7 nov. 2024 /CNW/ - Après examen du rapport produit par le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI), le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) conclut que l'analyse de la preuve ne révèle pas la commission d'une infraction criminelle par les policiers du Service de police de l'agglomération de Longueuil (SPAL).
L'analyse portait sur l'événement survenu à Longueuil le 3 septembre 2022 à la suite duquel le décès d'un homme a été constaté le 13 septembre 2022.
L'examen du rapport d'enquête préparé par le BEI a été confié à une procureure aux poursuites criminelles et pénales (procureure). Cette dernière a procédé à un examen complet de la preuve, afin d'évaluer si à la lumière de la preuve retenue, celle-ci révèle la commission d'infractions criminelles. La procureure a rencontré et informé une proche de la personne décédée des motifs de la décision.
Le 3 septembre 2022, un homme quitte son logement en fin d'après-midi après avoir consommé 4 à 5 bières pour se diriger dans un bar à Longueuil. À ce bar, il consomme à nouveau de l'alcool.
Une altercation survient durant la soirée entre lui et un autre client du bar. À la suite de celle-ci, l'homme se retrouve assis au sol, mais n'est pas blessé. Il poursuit ensuite ses activités puis quitte l'endroit.
Par après, l'homme est vu près d'un dépanneur situé à proximité par deux de ses amies. Celles-ci notent toutes les deux que l'homme n'a aucune blessure apparente.
Vers 21 h 35, un groupe de jeunes cyclistes attire l'attention des policiers en autopatrouille et leur pointe un homme couché au sol sur le trottoir, sur son côté gauche, face à l'intersection du chemin de Chambly et de la rue Brodeur. L'homme a une ecchymose et des saignements récents sur le front, côté gauche. L'homme est en état d'intoxication et s'est uriné dessus. Les cyclistes affirment avoir trouvé l'homme ainsi.
Les deux agents vont à la rencontre de l'homme. Ils lui demandent de se lever à plusieurs reprises, mais l'homme refuse.
Les policiers aident l'homme à se lever. Celui-ci parvient à se tenir debout. Quelques instants plus tard, l'homme vacille et titube vers l'arrière. Il chute de sa hauteur et se cogne l'arrière de la tête sur le trottoir. Il perd connaissance quelques minutes puis reprend connaissance à la suite des manœuvres des policiers. Selon le rapport des policiers, ceux-ci n'ont pas réussi à retenir la chute.
À 21 h 41, un appel est fait au 911. L'ambulance arrive sur les lieux à 21 h 45. L'homme est transporté à l'hôpital à 22 h et y est admis à 22 h 05. Il subit une opération d'urgence. Selon les prélèvements effectués, son taux d'alcoolémie se situe entre 294 et 339 mg/100 ml de sang.
Il y décède le 13 septembre 2022 en raison d'un traumatisme craniocérébral contondant. Le pathologiste conclut que la cause du décès est compatible avec la chute de l'homme, survenue de sa hauteur.
Analyse du DPCP
La preuve au dossier d'enquête ne permet pas de conclure que les policiers impliqués ont fait preuve de négligence criminelle causant des lésions corporelles ou causant la mort.
En matière de négligence criminelle, il est interdit à une personne d'accomplir un geste ou d'omettre de poser un geste que la loi exige qu'il pose, lorsque cela montre une insouciance déréglée ou téméraire à l'égard de la vie ou de la sécurité d'autrui.
La simple négligence dans l'accomplissement d'un acte, ou le fait de ne pas remplir une obligation imposée par la loi, sont toutefois insuffisants pour conclure à la négligence criminelle. La conduite doit représenter « un écart marqué et important par rapport à la conduite d'une personne raisonnablement prudente », en l'occurrence, un policier placé dans la même situation, distinguant ainsi la faute civile de la faute criminelle.
Par ailleurs, la négligence criminelle ne constitue pas une infraction autonome. La négligence, pour être de nature criminelle, doit conduire à la mort ou à des lésions corporelles. De plus, toute forme de contribution à la mort ou aux lésions corporelles n'est pas criminelle. Pour être punissables, les gestes ou les omissions doivent avoir contribué de façon appréciable, c'est-à-dire plus que mineure aux lésions corporelles ou encore au décès d'une autre personne.
L'analyse de l'ensemble de la preuve au dossier d'enquête révèle que les policiers sont intervenus auprès de l'homme afin de lui porter assistance et qu'ils n'ont fait aucun usage de l'emploi de la force. Les circonstances de la chute sont peu détaillées, mais indiquent que celle-ci est due au degré d'intoxication de l'homme et que les policiers n'ont pas été en mesure de prévenir cet accident.
Conséquemment, à la suite de son analyse, le DPCP est d'avis que la preuve ne révèle pas la commission d'une infraction criminelle par les policiers du SPAL impliqués dans cet événement.
Le DPCP fournit, au nom de l'État, un service de poursuites criminelles et pénales indépendant de toute considération de nature politique, et ce, de façon à préserver l'intégrité du processus judiciaire tout en assurant la protection de la société, dans la recherche de l'intérêt de la justice et de l'intérêt public, de même que dans le respect de la règle de droit et des intérêts légitimes des personnes victimes et des témoins.
Chaque dossier soumis au DPCP est analysé avec rigueur et impartialité. La norme qui guide les procureurs concernant l'opportunité d'entreprendre une poursuite est prévue à la directive ACC-3. En droit criminel, le fardeau de la preuve que doit satisfaire la poursuite est très exigeant. En raison du principe de la présomption d'innocence, la poursuite doit en effet faire une démonstration hors de tout doute raisonnable de la culpabilité de l'accusé devant le tribunal.
La décision de poursuivre ou non est une décision discrétionnaire prise par le procureur dans l'exécution de ses obligations professionnelles sans crainte d'ingérence judiciaire ou politique et sans céder à la pression médiatique. Par ailleurs, ce n'est pas la tâche du procureur de se prononcer sur une possible faute civile ou déontologique. Il ne cherche que les éléments lui permettant de conclure qu'un acte criminel a été commis et de déterminer s'il peut raisonnablement en faire la preuve. Il ne lui appartient pas non plus de formuler des commentaires ou des recommandations concernant les méthodes d'intervention policière.
La publication des motifs qui étayent la décision de ne pas porter d'accusation dans certains dossiers revêt un caractère exceptionnel et s'appuie sur des lignes directrices.
SOURCE Directeur des poursuites criminelles et pénales
Source : Me Patricia Johnson, Porte-parole adjointe, Directeur des poursuites criminelles et pénales, 418 643-4085, [email protected]
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